Très prolifique et florissant au début des années 2000, le « metalcore » n’a plus vraiment le vent en poupe, la faute à l’émergence de nombreuses formations toutes plus médiocres les unes que les autres. Après un bref survol de la zone sinistrée, force est de constater qu’une poignée d’irréductibles ont survécu à ce bourbier, en tête desquels KILLSWITCH ENGAGE, les fondateurs du style et…UNEARTH.
UNEARTH peut s’enorgueillir d’avoir publié l'une des pierres angulaires du genre avec The Oncoming Storm en 2004, et chacune de ses sorties est sujette à comparaison à ce dernier, mais malheureusement, aucune des livraisons qui suivirent n’arrivèrent à la cheville de celui-ci. Pire, les Américains donnaient l’impression de s’enliser avec le dernier méfait, Darkness in the Light, doué de refrains mièvres, mielleux et sirupeux, qui, pour votre serviteur, s’avèreront insupportables.
Mais pour toutes celles et ceux qui avaient apprécié ce disque, le choc sera rude à l’écoute de Watchers of Rule car ce dernier est à l’opposé de Darkness in the Light et revient vers les origines du groupe. La courte introduction est à l’avenant de ce que le gang de Boston a l’habitude de proposer, avec un bon riff et des guitares harmonisées. Mais dès le deuxième morceau, "The Swarm", la déflagration sonore se fait entendre. UNEARTH a décidé de remettre les pendules à l’heure et il ne le fait pas avec le dos de la cuillère. Cette composition débute sur une rythmique blastée et les guitares, aiguisées telles des feuilles de boucher, cisèlent à tout va. Il en sera de même sur la totalité de l’opus. Il suffit d’écouter "From the Tombs of Five Below", "Guard of Contagion", Trail to Fire", "Burial Lines" ou encore "To the Ground" et "Birth of a Legion" pour s’en convaincre.
De plus, les refrains « guimauves » sont totalement absents au profit d’un chant hurlé de bout en bout, avec un Trevor Philipps qui éructe toutes tripailles dehors et une hargne rarement atteinte chez UNEARTH. Hormis la brutalité ambiante qui ne faiblit à aucun moment (impossible de sortir le moindre single de Watchers of Rule), le combo n’a pas oublié de distiller quelques mélodies bien senties et des solos de haute volée, donnant un peu de luminosité à cet ensemble compact. Il en ressort une énergie brute et primitive qui promet une véritable guerre dans les pits. Aussi, quelques moments de bravoure sont à relever comme l’incorporation de blast qui jalonnent l’opus, les refrains de "Trail to Fire" et de "Burial Lines", très efficaces et renvoyant aux premières heures de la formation, ainsi que les accords massifs et primitifs qui émaillent l’ensemble de la galette.
Cependant, et malgré l’expérience indéniable des Américains, Watchers of rule est une sorte de boule d’énergie, qui part un peu dans tous les sens, où les structures alambiquées se multiplient. La fougue et la puissance sont bien présentes mais une canalisation de cette énergie brute aurait été opportune car le rendu sonore est difficilement suivable. Cela aurait donné une force impactante bien plus importante à ce parpaing opulent. Aussi, tous les morceaux sont agencés de façon similaire, avec quasiment pour tous les titres un final lourd et pesant, annihilant tout effet de surprise. Nous ajouterons à cela quelques lignes mélodiques bancales ("From the Tombs of Five Below"), un astiquage de manche intempestif qui vire à la démonstration technique et tombant comme un cheveu sur la soupe ("Never Cease", "Watchers of Rule", le break de "Birth of a Legion"). Pour finir, même s’il vocifère à s’en arracher les cordes vocales, l’organe de Trevor Philipps s’avère assez monocorde et son chant, à quelques rares exceptions près, manque de nuance. Cela confère à l’ensemble un sentiment de linéarité, malgré les nombreuses modulations du rythme et malgré la courte durée du disque (35 minutes). Pour terminer de noircir le tableau, quelques compositions faibles comme le morceau titre ou "To the Ground" tirent l’album vers le bas.
Manquant cruellement de moments forts, Watchers of Rule ne restera certainement pas dans les annales, malgré un regain d’énergie et de brutalité. Ce disque est un véritable bulldozer, écrasant tout sur son passage et d’une homogénéité sans faille mais cette masse compacte, difficilement pénétrable, en laissera plus d’un sur le carreau. UNEARTH a changé son bazooka d’épaule afin de regagner une crédibilité et de mettre fin à l’exode de ses fans. Ma constatation est que le challenge est à moitié relevé.
Ma note : 5.5/10
Tracklist :
1. Intro
2. The Swarm
3. Lifetime in Ruins
4. Guard of Contagion
5. From the Tombs of Five Below
6. Never Cease
7. Trail to Fire
8. To the Ground
9. Burial Lines
10. Birth of a Legion
11. Watchers of Rule