Cinquième édition en dix ans d'existence pour ce festival bisannuel. Le Trolls & Légendes est devenue rapidement une institution immanquanble pour les fans de Fantasy et autres univers fantastiques, à tel point que cette édition remporte des records d'audiences. Si les journées sont consacrées au salon qui habrite des coins littérature, jeux ou encore cinéma, les soirées du festival sont dédiés aux musique folks, celtiques et médiévales. Récit de ces trois soirée musicales.
Vendredi 3 avril
La soirée d’ouverture du Trolls & Légendes 2015 est indéniablement placée sous le signe de l’humour et cela s’entend et se voit avant même que le concert de La Horde ne débute. En guise de (longue) intro, les quatre joyeux Belges ont décidé de diffuser une interprétation bien particulière de "Li ptite gayole" (chanson traditionnelle bien connue en Belgique) pendant que des figurants cachés sous des toges se promènent dans le public avec des torches en distribuant des… œufs en chocolat.
Lors-ce que le groupe fait finalement son apparition sur scène, c’est par une reprise de "Prince Ali" extrait du dessin animé Aladdin qu’ils entament ce concert. Car La Horde c’est ça, un mélange de compositions originales et de reprises avec une bonne dose d’humour. Le public, déjà présent en masse pour ce tout premier concert du week-end (le groupe lui-même rigole de l’heure à laquelle il joue et dit participer à un thé dansant), d’abord surpris rentre assez vite dans le jeu et commence à reprendre les paroles en chœur, mais c’est véritablement avec "Drunken Sailor" que l’ambiance décolle.
Voulant marquer le coup, La Horde a décidé de nous offrir ce soir trois extraits de son futur album. Si les deux premiers titres ("Musclor" et "Jayce et les Conquérants de la Lumière") semblent assez faibles (peut-être parce que c’est la première fois qu’ils sont joués sur scène) le troisième, "Au Poney Fringuant", avec son air festif et dansant est déjà bien plus prometteur. C’est avec un medley de tubes pop des années 90 repris façon musique médiévale que le groupe prend congé, non sans s’être auparavant gentiment moqué des spectateurs français présents en leur demandant pourquoi ils ne disent pas septante-dix au lieu de soixante-dix…
Mélangeant humour, nostalgie et fête, La Horde et ses invités (Sabrina d’Ithilien, Florian des Compagnons du Gras Jambon et Lili de Naheulband venant chacun à leur tour interpréter un titre) ont fait du très bon boulot ce soir et le public est à présent chaud pour le reste de la soirée !
Setlist de La Horde :
• Li ptite gayole (sur bande)
• Prince Ali
• Drunken Sailor
• Musclor (nouveau titre)
• Jayce et les Conquérants de la Lumière (nouveau titre)
• Inferno
• Ulfedhnar
• Au Poney Fringuant (nouveau titre)
• La Porte
• Pour La Horde
• 90’s Medley
Pour rester dans l’ambiance légère et humoristique installée par La Horde, les Allemands de Feuerschwanz viennent nous proposer leur rock médiéval déjanté. Si les chansons du groupe sont toutes entièrement interprétées en allemand la communication passe plutôt bien entre le chanteur, Prinz R. Hodenherz III (qui s’exprime dans un anglais hésitant, mais compréhensible) et le public.
La fête redémarre donc de plus belle avec les six Allemands déguisés en chevaliers et leur danseuse et pour cela, ils sont armés non seulement de leur musique aussi de quelques artifices. C’est ainsi que pour interpréter "Herz im Sturm" ils sortent une petite tour en carton et demandent à une fille du public de se tenir dessus pendant que le chanteur essaye de la séduire (il finira même par l’embrasser à la fin du titre). Encore une fois, dommage que le sens exact des paroles en allemand nous échappe, car le tout semble très drôle.
Feuerschwanz aime interagir avec le public et parvient à le faire chanter en allemand ! Ils iront même jusqu’à faire monter un homme sur scène pour le faire revenir un peu plus tard, torse nu et muni d’une planche de surf pour le faire slammer sur le public ! Un concert fun du début à la fin ! Mention spéciale à ce wall of passion qui voit le public se séparer en deux puis se rapprocher pour se faire un gros câlin (dommage que nous n’avons pas eu droit au circle kiss mentionné par le guitariste…).
Cinquième édition du festival et cinquième participation du Naheulband ! Et ce soir le groupe, soutenu par un public qui lui est tout dévoué, a décidé de sortir le grand jeu. En plus de nous proposer "PNJ’s Can’t Dance", leur nouveau titre, les Français nous proposent une setlist piochant dans toute leur discographie ! Les fans prennent ainsi un véritable plaisir à reprendre en chœur les titres iconiques de la formation que sont "La Vie d’Aventurier", "A L’Aventure Compagnon" ou encore l’ultra connu "Mon Ancêtre Gurdil".
Seulement voilà, cette setlist est longue, très longue ! Et quand on n’est pas familier de l’univers du groupe, cela paraît même trop long ! Évidemment, les chansons sont loin d’être mauvaises, mais le trop-plein de private jokes que seuls les habitués de l’univers de Naheulbeuk ou les rôlistes peuvent comprendre fait qu’on peut facilement décrocher de ce concert.
Pourtant la bonne humeur règne autant sur scène (les six musiciens sont apparemment des grands fans de la Cuvée Des Trolls, la bière servie durant le festival) que dans le public qui ne se prive pas pour donner tout ce qu’il a, que ça soit en se lançant dans des pogos sur les titres les plus metal ("Crom !" en étant le meilleur exemple) ou pour scander le chant « poulet, poulet » qui deviendra l’hymne officieux du festival (Eluveitie en fera les frais le lendemain). Pâques étant proche, nous avons même droit à une chanson de … Noël !
En guise de rappel, Naheulband souhaite un joyeux dixième anniversaire au festival avant de prendre congé sur une interprétation du classique irlandais "Bugger Off!". Un concert pas mauvais, mais qui aurait gagné à être plus court et concis. Le groupe a voulu trop en faire ce soir malheureusement.
Setlist de Naheulband :
• Intro: instru POC orchestral (sur bande)
• La vie d'aventurier
• Nanana de l'Elfe
• À l'aventure, compagnons
• Courte: Le petit gobelin
• PNJs can't dance (nouveau titre)
• Hé la petite dame
• Pub: La Hache Durandil
• Troll Farceur Et Elfe Farci
• Courte: La polka du ménestrel
• La Compagnie du Chien Rugissant
• Chicken Quest !
• Noël en Mordor
• Pub: Gorzyne
• Crom !
• Pub: Chiantos
• Maître du Donjon
• Le laridé du poulet
• Pub: Les épées Durandil
• La Marche Barbare
• Courte: Rien à dire
• Massacrons-nous dans la taverne
• Tralala du Nain
• Mon ancêtre Gurdil
• Courte: Beatles Revenge (Tu Dis Bonjour)
Rappel :
• Sauvons les rôlistes
• Joyeux Trollaniversaire
• Bugger Off !
Samedi 4 avril
Si cette deuxième soirée de concerts est plutôt placée sous le signe du metal, la formation qui ouvre les festivités est pourtant bien loin de ce registre. Nook Karavan distille avec sa musique une ambiance presque chamanique devant un parterre encore assez clairsemé. Peut-être est-ce dû à l’horaire ou simplement au style de musique pratiqué, qui est plutôt contemplatif, mais l’assistance semble relativement peu impliquée et se contente de répondre poliment au discours un brin formaté de la chanteuse Lucile. Le chant de cette dernière rappelle d’ailleurs parfois celui de Masha d’Arkona dans les parties incantatoires de la musique.
L’étalage de différents instruments exotiques sur scène est en tout cas plutôt intéressant et si la musique mélangeant inspirations orientales et celtiques n’est pas déplaisante, il manque pourtant un petit quelque chose pour rendre cette prestation vraiment prenante.
C’est avec Huldre que les premières distorsions se font entendre. Et il ne fait aucun doute que ça réveille le public ! La formation danoise joue un folk metal à chant féminin allant des vocalises presque opératiques à des incantations chamaniques, le tout avec une aisance et une logique assez étonnantes.
D’ailleurs la chanteuse Nanna Barslev assume son rôle de frontwoman en s’adressant souvent au public et en faisant même l’effort de parler quelques petits mots de français (essentiellement « bonsoir » et « merci beaucoup »). En tout cas la foule déjà plus dense que précédemment semble apprécier et pendant que certains dansent sur le côté, le milieu de la fosse voit se créer les premiers pogos de la soirée. Huldre, malgré une musique manquant parfois d’originalité, semble avoir marqué des points et s’être fait des nouveaux fans ce soir.
Si vous ne connaissez pas Tanzwut, ce groupe pourrait bien vous surprendre. À l’origine pensé comme un side project de Corvus Corvax (qui se produira sur ce même festival le lendemain), le groupe allemand joue une musique qui mélange folk metal et indus. Et ce mix qui peut paraître contre nature sur le papier fait un véritable carton sur scène avec une ambiance de folie. C’est bien simple, du début à la fin du set, les pogos et le slams affluent.
La musique se suffit tellement à elle-même que le chanteur, Teufel, ne prend même pas la peine de parler en anglais ou en français (mis à part un timide et hésitant « merci beaucoup ») et introduit chaque titre en allemand. Tanzwut transforme ainsi la salle en immense fête que ça soit avec ses titres plus folk qui nécessitent parfois la présence de jusqu’à quatre types de cornemuses différentes ou avec les morceaux indus qui rappellent Rammstein (sûrement à cause du chant en allemand).
Après avoir bien retourné le public notamment avec un joli wall of death, Tanzwut interprète un dernier titre instrumental puis… s’en va sans même dire au revoir. Dommage, car cela laisse comme un goût de trop peu à ce concert intense et très visuel.
Tanzwut avait allumé le feu, Eluveitie va remettre une bonne dose d’huile dessus ! Cinq mois après leur dernière prestation en tête d’affiche en Belgique, les Suisses sont déjà de retour et il ne fait aucun doute qu’une grande partie du public de ce soir est là pour eux. Pour en juger, il suffit de voir le nombre de personnes portant des t-shirts aux couleurs du groupe et d’entendre l’ovation qui débute lorsque l’intro "Origins" résonne dans le Lotto Mons Expo. Chrigel Glanzmann (chant et divers instruments) semble particulièrement heureux de l’accueil qu’il reçoit et prendra même la parole dans un français presque impeccable après "Nil".
Les pogos et slams s’intensifient encore plus dès les premières secondes de "King". Certaines personnes étant visiblement toujours coincés dans l’ambiance du concert de Naheulband de la veille commencent alors à reprendre le chant « poulet, poulet » des Français, ce à quoi le pauvre chanteur d’Eluveitie, un peu perdu répondra juste un « what the hell ?! » plein de surprise.
Pour se démarquer du concert d’Anvers en novembre dernier, le groupe a remanié sa setlist et l’a même spécialement agencée pour ce festival avec un set acoustique de trois titres : le rare instrumental "Memento", "Brictom" et "A Rose for Epona" d’habitude joué en version « amplifiée ». Autre nouveauté depuis la dernière prestation, Päde Kistler a quitté le groupe et c’est à présent Matteo Sisti (Krampus) qui s’occupe des flûtes et des cornemuses. Et ce dernier semble on ne peut plus à l’aise sur scène avec Eluveitie, n’hésitant pas à se mettre en avant sur les promontoires placés de chaque côté à l’avant de la scène.
Anna Murphy chante toujours plus de titres en concert, ce qui plaira ou déplaira selon les personnes, mais ce soir à Mons (ou « Monne » comme le prononce Chrigel), devant un public en partie profane pour ce qui est du metal, ce choix remporte un franc succès, les titres interprétés par la demoiselle étant souvent plus calmes. D’ailleurs, ce soir c’est la version française de "Call of the Mountains" qui sera interprétée par la chanteuse selon choix de la foule.
Comme à l’accoutumée, les membres d’Eluveitie perdent très peu de temps en bavardages et enchaînent les titres. Le set acoustique sera d’ailleurs un moment de calme bienvenu avant que l’intensité du show ne reprenne avec "The Nameless" pour lequel Chrigel demande un wall of death bien suivi par les fans. D’humeur joueuse, le chanteur demandera ensuite, avant d’interpréter "Kingdom Come Undone", que le public participe au « security stress test ». Jugeant que les agents de sécurité ont l’air de s’ennuyer, le frontman demande de voir une marée de crowd surfers arriver vers lui… Inutile de demander deux fois !
En guise de rappel, le tube du groupe "Inis Mona" fait des ravages avant que le tout ne finisse en immense fête grâce à "Tegernakô" (trop longtemps écartés des setlists, mais enfin de retour) qui fait danser toute la fosse. Ce soir, nous avons assisté au meilleur show qu’il nous ait été de voir de la part des Helvètes depuis des années. Eluveitie est venu, a vu et a vaincu.
Setlist d’Eluveitie :
• Origins (sur bande)
• King
• Nil
• From Darkness
• Uis Elveti
• Thousandfold
• Primordial Breath
• Sucellos
• Omnos
• L'Appel des montagnes (en français par choix du public, dernier refrain en anglais)
• Inception
• Memento (acoustique)
• Brictom (acoustique)
• À Rose for Epona (acoustique)
• The Nameless
• Kingdom Come Undone
• The Silver Sister
• Quoth the Raven
• Alesia
Rappel :
• Inis Mona
• Tegernakô
• Epilogue (sur bande)
Dimanche 5 avril
La dernière soirée commence plutôt calmement avec les Hollandais de Cesair. Leur musique mélange habilement les influences orientales et occidentales pour faire voyager l’auditeur. Les titres étant présentés un peu comme des contes par la chanteuse Monique van Deursen, une ambiance sereine s’installe dans le public. Ou serait-ce simplement la fatigue des trois jours qui commence à se faire sentir ? Toujours est-il que si les applaudissements sont nourris, il y a pour le moment peu de mouvement dans la foule. Grâce à un chant et des percussions hypnotiques, Cesair créée une ambiance hypnotique pour débuter ce dimanche soir.
Les membres de Cuélebre jouent un style de musique plutôt original étant donné leur pays d’origine puis qu’ils nous viennent d’Espagne. Principalement en mid-tempo, les compositions médiévales sont agrémentées de percussions envoûtantes rappelant l’origine sudiste du combo.
La chanteuse María Cobos Vaos ne cache pas son plaisir d’être là, affichant un immense sourire et se fendant de quelques mots en français dès la fin du premier titre. Cette dernière sort d’ailleurs des vocalises très impressionnantes. Dommage que ses prises de paroles soient encore parfois hésitantes.
En tout cas le public semble beaucoup apprécier la musique des Espagnols qui n’est parfois pas très éloignée de ce que peux proposer Wardruna niveau atmosphères. Une très chouette découverte.
Visiblement très attendus par le public, les membres de Rastaban investissent les planches sous les ovations. Et si l’ambiance était plutôt calme et recueillie jusqu’ici (seuls quelques motivés dansaient pendant les précédents concerts), l’intensité et la ferveur de la foule montent d’un sacré cran dès le début du set. Marine Libert (décidément ce dimanche est placé sous le signe des voix féminines) déborde d’énergie, à l’image des titres interprétés ce soir, à tel point qu’elle prend constamment la parole en criant… Marrant au début, mais vite énervant.
Ayant choisi de faire de ce concert une occasion spéciale, Rastaban invite tout au long de son concert plusieurs invités à les rejoindre sur scène. C’est ainsi que l’on voit tour à tour défiler des membres de Cesair et de La Horde, mais aussi de groupes qui n’étaient pas à l’affiche du festival comme Omnia ou Prima Nocta. Dans le public ça danse et ça chante. La fête est autant dans la fosse que sur scène et Rastaban nous donne l’énergie nécessaire pour le dernier concert du week-end !
Le site internet du festival annonce le concert de Corvus Corax comme un « grand moment »… Les mots sont faibles pour décrire la réalité de ce set inoubliable ! C’est bien simple, jamais tout au long des droits un groupe n’aura autant fédéré ! Partout dans le public, ça saute, ça danse et ça headbangue. Le public répond très positivement à la musique du groupe et aux discours du chanteur comme lorsqu’il demande à tout le monde de faire bouger ses bras en rythme comme des ailes pour « la danse du corbeau ». Et dès les premières notes jouées un constat apparaît : la scène paraît bien petite lorsque les sept musiciens et leurs instruments (tous plus incongrus et encombrants les uns que les autres) se trouvent dessus.
Si hier les membres de Tanzwut avaient fait le choix de ne parler qu’en allemand, il n’en est rien pour Castus, frontman de la formation, qui va souvent prendre la parole en français (comme lorsqu’il traduit "Saltatio Mortis" par son nom français « la danse des morts » ou simplement pour nous dire « à votre santé ») bien qu’il nous avoue avoir appris le russe à l’école plutôt que le français. Visiblement de très bonne humeur, à la fin du concert il remerciera même le public en espagnol et en japonais… D’ailleurs ses prises de paroles sont souvent pleines d’humour comme lorsqu’il crie un joli « voulez-vous coucher avec moi ce soir » (en français évidemment) juste avant ce qu’il décrit comme une chanson d’amour.
La musique de Corvus Corax est juste parfaite pour clôturer ces trois jours de festival ! Leur musique médiévale et un quelquefois guerrière invite à la fête, à lever le poing et à chanter. Partout dans la folle, des farandoles se forment et des gens chantent (notamment sur "Béowulf is mín nama", au refrain bien repris). Le tout étant aidé par un jeu de lumière assez simple, mais efficace (par exemple, la scène se retrouve baignée de rouge lors d’un titre à propos de Dracula). Et que serait une fête sans boisson ? Les Allemands y ont pensé et distribuent à boire dans les premiers rangs grâce à une gigantesque corne.
Corvus Corax était le meilleur choix pour clore ce festival ! Une prestation marquante et réussie de bout en bout qui clôt en apothéose trois de festivals marqués par des prestations de qualité. Si vous êtes fans de musique folk (au sens large et pas seulement metal) et médiévale, ce festival est à faire absolument.
Setlist de Corvus Corax :
• Saltatio Mortis
• Urmawi
• Skudrinka
• Totus Floreo
• Crenaid brain
• Milli Anni Passi Sunt
• Venus Vina Musica
• Bacchus
• In taberna
• Spielmannstanz
• Albanischer
• Havfrue
• Sverker
• Béowulf is mín nama
• Heiduckentanz
• Saltarello
• Das Pack
• Ragnarök
Rappel:
• Chou Chou Sheng
• Stella Splendens
Photos : © 2015 Thomas Orlanth
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Reportage par OrmaGodden