Errances est le tout premier album d'un jeune groupe français, créé aux alentours d'Avignon, et répondant au doux nom d'Angellore.
Avant de vous conter les histoires musicales de cet opus à paraître en février chez Dreamcell11 et déjà disponible en téléchargement légal, nous vous proposons cet entretien que nous avons eu avec les trois membres du groupe, à savoir Rosarius (guitares, chant), Walran (claviers, chant) et Ronnie (batterie).
Pour une conversation autour de leur doom atmosphérique évocateur...
Ju de Melon : Tout d'abord bonjour à vous et meilleurs vœux pour cette nouvelle année que l'on espère riche en aventures pour vous. Première question on ne peut plus banale mais fort utile pour ceux qui ne connaissent pas encore Angellore, pouvez-vous nous présenter rapidement le groupe et son historique?
Walran : Merci pour vos vœux, nous adressons les nôtres à votre équipe et à vos lecteurs. 2013 devrait en effet être une bonne année pour Angellore, puisqu’elle débute avec la sortie d’Errances... Un moment que nous attendions depuis déjà un bon bout de temps ! (rires) L’aventure Angellore a débuté en 2007. J’ai rencontré Rosarius via Internet, car nous partagions le même amour pour le doom metal. Peu de temps après avoir commencé à échanger, nous avons évoqué l’idée de débuter un projet musical ensemble, s’inscrivant dans la lignée des groupes que nous admirions par dessus tout : Saturnus, Draconian, Shape Of Despair, Empyrium, Tristania... La frange la plus romantique et évocatrice du dark/doom metal à claviers ! Après avoir composé et enregistré en duo quelques démos dans des conditions sommaires, nous avons recruté Ronnie, un ami batteur, et sommes entrés en studio à la fin de l’année 2009 pour enregistrer notre premier opus Errances dans des conditions professionnelles. Une tâche qui s’est avérée bien plus ardue que nous ne l’imaginions, mais dont nous sommes finalement venus à bout !
Pour quelle raison avoir choisi ce nom ? Certains penseront de suite au morceau "Angellore" de Tristania, y a-t-il un lien ?
Rosarius : Oui. C’est un très beau titre, en plus d’être une très belle chanson. Nous aimons Tristania, nous aimons Widow’s Weeds et ce fragment particulier qu’est „Angellore“, et nous trouvons ce nom musical, et grâcieux. Presque comme s’il n’était plus tout à fait en anglais. C’est un peu comme un prénom, oui.
Rosarius (à gauche), Walran (au centre) et Ronnie (à droite)
Le titre d'un album, surtout le premier, est un choix souvent mûrement réfléchi et parfois délicat. Pourquoi Errances ? Le choix du français était-il ici une volonté précise du groupe ?
Rosarius : Si nous ne nous imaginons pas chanter en français – dans un genre tel que celui que nous pratiquons, cela serait sans doute difficile à réaliser –, nous aimons le français. Beaucoup. C’est une langue merveilleuse, qui se prête bien à notre univers. Ne pas l’exploiter un minimum aurait été dommage. Pour ma part, la littérature est ma passion essentielle, et la langue française trouve naturellement sa place dans l’histoire d’Angellore. Nous verrons, dans le futur, si elle prend plus d’importance.
Ronnie : À la base, nous étions partis sur une autre idée de titre (non vous ne saurez pas!), mais je n'étais pas vraiment pour. Si mes souvenirs sont bons, nous avons de nouveau évoqué le changement de titre en voyant l'image qui allait nous servir pour la pochette. L'escalier avec cet appel au voyage, l'interlude éponyme qui n'a rien à voir avec le reste de l'album tout en développant la même émotion, etc. Tout coïncidait. En quelques secondes la décision était prise et irrévocable !
Un mot sur la pochette. Qui a eu l'idée et comment a-t-elle été réalisée ?
Walran : C’est en surfant sur Internet un soir de solitude que je suis tombé sur la page myspace d’une jeune infographiste française, surnommée Mayitabel. Elle avait publié certaines de ses créations dont cette image, qui m’a immédiatement séduit. J’aime l’univers qu’elle véhicule, ses tons bleu nuit, la présence de cette rose en éclats au pied d’un escalier menant vers un ailleurs mystérieux et impénétrable, ses statues d’anges, immuables et majestueux gardiens... Les autres membres du groupe ayant partagé mon enthousiasme, nous l’avons achetée à sa créatrice et avons chargé un ami proche du groupe, Florent Castellani, d’effectuer quelques menues modifications et de créer notre logo. Je ne saurais en revanche trop en dire sur sa réalisation. Je sais seulement que cette statue d’ange existe réellement. Peut-être un jour la croiserez-vous si vous vous aventurez dans un cimetière des Etats-Unis...
Je crois savoir que pas mal d'embûches ont précédé la sortie de ce premier opus qui a été longtemps attendu par les fans du groupe, quelles sont les anecdotes les plus "marquantes" concernant son enregistrement et sa sortie ?
Walran : Effectivement, la réalisation d’Errances a été un véritable chemin de croix ! Concernant l’enregistrement, plusieurs moments assez pénibles me reviennent fréquemment en mémoire : une coupure de courant générale qui nous a immobilisés pendant près d’une heure au cours de notre première matinée-studio, des sessions annulées à la dernière minute car notre producteur était malade, des pistes de morceaux qui se décalaient systématiquement à cause de bugs d’ordinateurs, des problèmes de logiciels persistants... Je ne sais pas si ce sont les anecdotes les plus marquantes, mais en termes d’enregistrement, voilà le genre de galères que nous avons rencontrées. J’imagine que beaucoup de jeunes groupes passent par là lorsqu’ils découvrent le studio ! Ce sont plutôt les à-côtés, les trajets pour aller jusqu’au studio par exemple, qui se sont fréquemment transformés en aventures invraisemblables...
Niveau composition et écriture, on sent par contre que les soucis ont été moindres tant les chansons respirent la sincérité. Racontez-nous un peu comment est né Errances à ce niveau...
Walran : En effet, le processus de composition est probablement l’étape la plus agréable et la moins ardue pour nous ! Entre 2007 et 2009, Rosarius et moi avons composé plusieurs EP, qui contenaient des morceaux typés metal reliés entre eux par des interludes et pistes acoustiques, qui permettent de créer une unité et une ambiance, et de faciliter l’immersion des auditeurs dans notre univers. Rosarius et moi avons une belle complémentarité à ce niveau-là : nous écrivons tous nos textes ensemble, et en discutons jusqu‘à être entièrement d’accord (en général, cela va assez vite !). Quant à la musique, Rosarius apporte l’essentiel des idées mélodiques, et nous les arrangeons ensemble. Par la suite, nous nous répartissons les lignes vocales et Rosarius me laisse toujours le mot de la fin en ce qui concerne les arrangements, les structures des morceaux, les enchaînements et transitions. Après avoir engagé Ronnie, nous avons décidé de sortir les morceaux metal de leurs contextes d’origine et de les réarranger, avec une vraie batterie en lieu et place des rythmiques monotones et répétitives de la boîte à rythme. Nous avons longuement répété pour redécouvrir nos morceaux, allonger ou raccourcir certains passages, et avons engagé une violoniste professionnelle, Cathy, qui a accepté de mettre sa virtuosité au service de nos chansons. Ce processus de transformation a été merveilleux pour nous. Nos œuvres quittaient leur état de démo pour se révéler plus complexes, plus puissantes, plus chargées en émotion, plus matures aussi. Pour compléter l’album, nous avons tout de même repris un interlude qui nous tenait à coeur, “Errance“, et Rosarius a composé une nouvelle pièce, “...Where Roses Never Die...“, qui n’apparaissait pas sur nos EP précédents.
Avec le recul, avez-vous quelques choses que vous auriez aimé changer sur ce premier album ? Que ce soit au niveau des compositions ou du mixage/mastering.
Walran : Avec le recul, il y a quelques menus détails que j’aimerais changer, en effet. J’aurais aimé que certains passages soient plus lents, que nous options pour un son de piano plus cristallin, et peut-être que les nappes de claviers soient placées un peu plus en avant et la batterie un soupçon plus en retrait. Au niveau mixage, je ne vois rien d’autre à redire. Et nous sommes à 100% satisfaits du mastering, aucun regret à ce niveau-là !
Les doomeux-gothiques ont aussi le sens de l'humour !
Parlons un peu des paroles, est-ce que certains thèmes ou histoires précises sont relatées dans celles-ci ?
Walran : Oui, mais cela reste très métaphorique et imagé, afin que les auditeurs puissent développer une interprétation personnelle. S’il y a certains thèmes récurrents qui font partie intégrante de l’univers d’Angellore (description de lieux oniriques et désolés, amours tragiques, voyages émotionnels intérieurs ponctués de mélancolie, exaltation de la mystique de la nature...), les histoires racontées varient de titre en titre. « I Am The Agony », par exemple, se présente sous la forme d’un dialogue, renouant un peu avec la dimension « Belle et la Bête » chère à nombre de formations gothic ou doom metal, tandis que « Tears Of Snow » décrit une vision fantomatique d’une grande beauté... Les thèmes varient, et le nom d’album « Errances » synthétise justement tous ces voyages. De manière générale, on ne peut pas dire que nos paroles dérogent beaucoup des clichés romantiques et morbides chers à la scène doom ! Mais c’est avec plaisir que nous exploitons cette imagerie et ces thèmes, classiques mais qui nous ont toujours séduits.
Quelques titres de chansons sont en français, mais tous les textes sont bel et bien en anglais. Est-ce qu'à l'avenir il est prévu certaines paroles écrites dans la langue de Molière ?
Walran : Personnellement, je n’ai jamais été trop favorable à l’usage du français dans la musique metal. Mais si Rosarius me proposait quelque chose de vraiment pertinent, une narration en français sur un bref passage par exemple, peut-être changerais-je d’avis.
Rosarius : Cela n’arrivera probablement pas. Je n’ai pas tellement envie qu’il y ait des textes français dans la musique d’Angellore. Peut-être cela changera-t-il, on ne sait jamais… mais pour l’instant, je n’en ai pas le moindre désir.
L'avenir, parlons-en... que pouvons-nous attendre d'Angellore en 2013 à la suite de la sortie de ce premier opus ? Quelques concerts ? La préparation d'un nouveau disque ?
Walran : En 2013, sans doute pas grand chose ! A part assurer la promotion d’Errances, je pense que nous resterons plutôt discrets. A vrai dire, nous avons déjà entamé la préparation de notre deuxième album et allons sans doute nous y concentrer dans les mois qui viennent. Pour l’instant, nous avons surtout Errances présent à l’esprit, car c’est une immense satisfaction de voir notre disque enfin sorti. Mais le processus de composition de son successeur est très avancé, car nous avons eu pas mal de temps depuis la fin de l’enregistrement en 2011... Les concerts viendront plus tard, peut-être l’année suivante, qui sait ? A notre grand étonnement, nous avons déjà reçu des propositions très intéressantes. Nous essaierons donc de travailler avec des musiciens de session à partir de l’été prochain.
Ronnie : Professionnellement nous sommes tous très occupés, et nous allons être dispersés géographiquement durant quelques mois. Au niveau des études, 2013 est une année charnière pour certains d'entre nous donc nous voulons avancer à notre rythme pour les compositions pour n'en garder que le meilleur et surtout se concentrer sur la promotion de Errances. Après tant de temps nous y sommes enfin, alors nous voulons le présenter de la meilleure façon possible. Derrière le rideau, Angellore sera donc très actif.
Avez-vous déjà quelques exclusivités à lâcher à vos fans concernant cette deuxième offrande ? Des surprises ? Une orientation stylistique en évolution ?
Walran : Nous ne voulons pas en dire trop pour l’instant, mais l’album contiendra en effet de belles surprises. Le style évoluera également. Les titres seront globalement plus longs, plus aboutis, plus riches...
Ronnie : Le but n'est pas de faire "plus ci ou ça", en fait il n'y a juste...pas de but ! Nous faisons ce que l'émotion nous dicte tout simplement. Mais effectivement pour l'instant ça s'amorce être plus abouti, nous avons tout simplement appris de ce qui nous semblait perfectible sur Errances.
Une question plus globale, un peu torture je l'avoue en un sens : selon vous, en quoi Angellore se diffère d'autres groupes du style ? Il est temps de défendre votre bébé de la plus belles de manières qu'il soit ! (rires)
Walran : Selon moi, Angellore a le mérite de se tenir éloigné des modes et tendances actuelles et de proposer une vision du doom assez différente des autres groupes. Depuis quelques années déjà, le mot doom est plus facilement associé à Electric Wizard qu’à Swallow The Sun, par exemple. Ce n’est pas un reproche, mais alors que certains styles doom ou voisins du doom comme le stoner, le sludge ou le doom traditionnel (inspiré par Black Sabbath et Candlemass) ont le vent en poupe, le doom atmosphérique ou romantique semble un peu dépassé ou oublié. Il y a de moins en moins de groupes qui évoluent dans cette mouvance, alors qu’il y avait une vraie scène doom atmo/dark/goth dans les années 90. Par ailleurs, Angellore a le mérite d’être accrocheur, ce qui ne va pas forcément de soi lorsqu’on s’exprime dans un registre lent, avec une certaine lourdeur rythmique. Je pense que nos morceaux proposent des mélodies fortes et prenantes, qui devraient intéresser ceux qui n’écoutent pas forcément de doom en général. Enfin, je pense que notre musique est intéressante et assez accessible car très contrastée. Il y a des passages acoustiques, des moments plus heavy/dark metal, des influences allant du folk au gothique, une alternance constante entre différentes voix claires et voix extrêmes... Je suis tout sauf objectif, c’est évident, mais selon moi la musique d’Angellore n’est jamais ennuyeuse ou monotone. Et cela me fait très plaisir !
Si vous pouviez choisir disons trois autres groupes pour former une tournée de rêve lesquels choisiriez-vous ?
Walran : Draconian, Saturnus (deux de nos influences majeures) et sans doute Ava Inferi, combo extrêmement prometteur avec qui nous entretenons d’excellentes relations. J’aurais également volontiers cité Empyrium ou While Heaven Wept, mais le premier ne donne que très peu de concerts et le second s’éloigne de plus en plus du doom metal au fil des années...
Ronnie : Draconian, Saturnus et personnellement je rajouterai Sólstafir. Je parle des 3 + Nous bien entendu ! Haha. Sinon il y a quelques temps j'ai vu qu'il y avait eu une tournée en 1999 : Theatre Of Tragedy + Tiamat + Anathema... Avouez qu’en 1999, replacé dans le contexte de l'époque, pour les fans du style ça avait quand même de la gueule !
Rosarius : Draconian, Shape Of Despair et Saturnus.
Je sais aussi que chacun d'entre vous a des projets musicaux parallèles en marge d'Angellore, qu'en est-il exactement au jour d'aujourd'hui ?
Walran : Je travaille actuellement sur le retour de mon projet folk/metal atmosphérique/ambient Betray-Ed. Un EP devrait être mis en ligne cette année. Ce sera un travail tout à fait spécial, enregistré dans des conditions semi-professionnelles. Le son sera bien meilleur qu’autrefois ! Je suis curieux de voir comment les auditeurs l’accueilleront. Quant à mon groupe de black metal Abduction, nous planchons actuellement sur notre premier album. Il y a encore du travail car Guillaume, le guitariste et compositeur, est quelqu’un de très perfectionniste. Mais cela promet un résultat formidable !
Rosarius : Mon projet coldwave Abyssanctum est un peu en sommeil depuis quelque temps. Il se réveillera un jour, c’est certain, mais je ne sais pas encore quand.
Ronnie : je m'entraîne au cas où Mike Mangini s'en aille de Dream Theater. Blague à part, si vous aimez le Doom à tendance Sludge je vous propose de chercher mon ancien groupe Mudbath excellent dans leur style !
Il est temps de passer au mot de la fin. Qu'avez-vous à dire à nos lecteurs et auditeurs pour conclure cette entrevue ?
Walran : Merci d’avoir lu cette interview jusqu’au bout, et... Quel que soit le style de musique que vous préférez, donnez une chance à Angellore ! Notre démarche peut toucher un autre public que les seuls fans de doom ou de metal gothique. D’avance, un grand merci et à bientôt !
Ronnie : Merci mille fois à toi qui viens de lire cette interview et merci à La Grosse Radio qui nous soutient depuis le début de façon très sincère, ça fait plaisir. N'hésitez pas à nous faire des retours (positifs ou négatifs) directement sur notre page Facebook, nous aimons partager notre passion. Et enfin je dirai : Buy it, steal it, trade it but spread the word !...Enfin télécharger c'est bien, mais acheter c'est mieux !