Profitant de la pandémie et des confinements successifs, le combo américain s’est autorisé à enfin regarder dans le rétroviseur pour proposer la suite de Colors. Si BTBAM est coutumier des suites (rappelez-vous des diptyques Parallax ou encore Automata dont les sorties s’étaient effectuées en deux temps, mais avaient été composés en une seule fois), la principale difficulté ici consistait à retrouver l’état d’esprit dans lequel le combo était il y a désormais près de quinze ans. Et pour le coup, on peut dire que Between s’en est sorti avec les honneurs.
Le quintette retrouve ici un schéma familier dans la tracklist qui ne peut que faire penser à son brillant aîné. C’est le cas avec l’ouverture « Monochrome »/ « The Double Helix of Extinction » rappelant celle de 2007 avec « Foam Born (A) The Backtrack » / « Foam Born (B) The Decade of Statue », ou encore du final en deux temps « Sfumato » / « Human is Hell » qui résonne comme un bel hommage à « Viridian » / « White Walls ». Et comment ne pas penser à la folie d’ « Ants of the Sky » sur « Prehistory » ou « Bad Habit »?
Pourtant, bien loin de n’être qu’un vulgaire copier / coller de l’album de 2007, Between the Buried and Me va au-delà des espérances des fans, en proposant des titres toujours novateurs (« Prehistory »), lorgnant vers des styles musicaux totalement improbables (le shuffle jazz de « Prehistory », le passage acoustique à 2:05 sur « Never Seen/Future Shock » que l’on aurait bien plus imaginé chez un groupe de folk metal à la Ensiferum que chez BTBAM). C’est bien simple, si Colors avait un grain de folie qui a permis de le démarquer et d’en faire une référence chez le combo, Colors II est encore plus rafraîchissant et déstabilisant que son aîné tout en faisant une belle synthèse de la carrière du groupe (« Revolution in Limbo »).
Le point fort de BTBAM depuis Colors, à savoir un line-up d’une cohésion impressionnante, est une fois de plus présent, puisque chaque membre du groupe parvient à se démarquer (ce son de basse de Dan Briggs, notamment sur le solo de « Prehistory » !) tout en sonnant naturel et en proposant un ensemble homogène. Tommy Rodgers sait se faire enchanteur (le refrain de « Human is Hell » à 4:14) et rageur, le duo de guitaristes Dustie Waring et Paul Waggoner semble indivisible et Blake Richardson se paie même le luxe d’un solo de batterie, accompagné de Mike Portnoy (ex-Dream Theater), Navene Koperweis (ex-Animals as Leaders) et Ken Schalk (Candiria) sur « Fix the Error ».
En proposant un opus de 78 mn (soit 14 de plus que son prédécesseur), BTBAM ose prendre le risque d’un album long. Pourtant, avec une telle diversité et richesse (essayez de ne pas vous dandiner sur les passages jazz de « Prehistory », ou celui de « Revolution in Limbo » à 5:45, qui propose un air latino bien amené), l’auditeur ne s’ennuie à aucun instant, est sans cesse bousculé et redécouvre des détails à chaque nouvelle écoute. Nous évoquions précédemment l’enchaînement final « Sfumato » / « Human is Hell », comme un clin d’œil à « Viridian » / « White Walls ». Le final de Colors a grandement contribué à la réussite de cet album il y a quinze ans. Et bien, le final de Colors II est du même acabit, alliant puissance et émotion (« Sfumato » et le rappel de ce même thème à 7:20 sur « Human is Hell »).
Le pari est donc amplement réussi pour Between the Buried and Me, avec un Colors II qui se hisse largement à la hauteur du premier volume et qui sera à n’en pas douter un nouveau mètre étalon pour le metal progressif. Et si seul le temps nous dira s’il surclasse le premier Colors dans le cœur des fans, d’ici là ce dixième album contribuera à faire rayonner une discographie exemplaire. Un chef d’œuvre, on vous dit !
Tracklist Colors II:
Monochrome
The Double Helix of Extinction
Revolution in Limbo
Fix the Error
Never Seen / Future Shock
Stare into the Abyss
Prehistory
Bad Habits
The Future is Behind Us
Turbulent
Sfumato
Human is Hell (Another One with Love)
Disponible depuis le 8 octobre chez Sumerian Records
Photographie live : Watchmaker