Un sans-faute pour cet album roots’n’blues. Ben Harper signe là un bijou d’inspiration.
Bon feeling :
celui d’avoir invité Charlie Musselwhite, grandiose harmoniciste, à l’accompagner dans cette aventure.
Si Ben Harper visite avec finesse le Delta blues natif du Mississippi, Charlie Musselwhite s’exprime avec brio dans le blues de Chicago. Il serait réducteur de dire que l’un et l’autre se cantonnent à ces genres tant cet album se révèle être un voyage dans le temps. Les compositions de Ben Harper dont le jeu, les phrasés de guitare et les mélodies évoquent Robert Johnson, John Lee Hoocker, Lightning Hopkings se nourrissent des licks d’harmonica servis par Charlie Musselwhite qui, lui, entretient la flamme de ses pairs Sonny Boy Williamson ou Little Walter.
Expectative…
lorsque l’on connait l’intérêt éclectique que le guitariste porte aux collaborations : pour le pire (par aimable charité, on passera sous silence son duo avec Mylène Farmer !) et pour le meilleur (Pearl Jam, The Blind Boys of Alabama, Stephen Marley). Et lorsque l’on se souvient de précédents albums peu inspirés : le monotone fourre-tout Diamonds on the Inside (2003), le doucereux Both Sides of the Gun (pour le volume 1 du double LP, 2006), le folk-rock variéteux Lifeline (2007), le brouillon sirupeux Give Till It's Gone (2011)… forcément on attend l’homme au tournant.
Réussite :
et là c’est un coup de maître. La joute musicale de Charlie Musselwhite est indissociable des morceaux crées par Ben Harper. Son jeu subtil, vient en réponse ou à l’unisson, le phrasé à l’harmonica enveloppe les riffs et les mélodies.
Alors banco pour le duo, ça fonctionne !
Old Style donc, mais moderne de son. On a l’impression d'être les invités du studio, la guitare là, tout près et l’harmonica qui lèche les oreilles !
Les chansons, certaines en co-écriture avec le guitariste Jason Mozersky, n’empruntent pas à la culture blues originelle les fréquentes allusions crues au sexe ou les métaphores évocatrices des rapports Noirs / Blancs. Les textes sont de la teneur du blues contemporain et le songwriter tisse ses mélodies sur des thèmes qui lui sont chers : des constats, sa philosophie de la vie, des positions militantes. "I Ride at dawn", co-écrit avec Jesse Ingalls (bassiste et clavier) est une proclamation pacifiste et un hommage à Nicholas P. Spehar, jeune soldat de l'US Navy mort en Afghanistan en 2011.
Ben Harper, qui s’est aussi entouré du band Relentless7 (présent sur divers projets depuis 2009), leur laisse une place plus importante sur les british blues "I don’t believe a word you say", "Blood side out", "Get up !", sur "I ride at dawn", le fabuleux swamp blues aux évocations de Muddy Waters, sur "She got kick" rock’n’roll aux airs de B.B.King et sur ce qui semble être une révérence faite à John Lee Hoocker " I’m in, I’m out and I’m gone".
Un guilleret gospel "We can’t end this way" vient compléter la palette musicale.
Go, run, listen !
Ben Harper, qui possède déjà une signature affirmée avec son jeu au bottleneck ou en lap steel s’est magistralement illustré avec Get Up ! Charlie Musselwhite pourvoie 50 % du résultat.
Si l’homme caméléon continue à savoir si bien s’entourer, à l’instar de ses mentors, il est en passe de devenir lui-même une référence appelée à durer.
Get Up !, il n’y a rien à jeter !
Track list :
- Don’t think twice
- I’m in, I’m out, and I’m gone
- We can’t end this way
- I don’t believe a word you say
- Found another lover
- I ride at dawn
- Blood side out
- Get up !
- She got kick
- All that matters now