"Le Sonisphere n’a jamais eu vocation à aller à l’encontre du Hellfest."
A un peu plus de deux mois du Sonisphere 2013 qui se tiendra à Amneville les 8 et 9 juin prochain et verra entre se produire la légende Iron Maiden, Salomon Hazot, son organisateur et directeur de Nous Productions, a répondu aux questions de La Grosse Radio. Le temps de revenir sur sa carrière, l'affiche à venir et la concurrence existante avec le Hellfest.
Tout d'abord, afin de situer votre parcours à nos lecteurs, depuis combien de temps êtes-vous dans l'organisation de concerts et qu'est-ce qui vous a motivé à faire carrière dans ce métier ?
Je m’appelle donc Salomon Hazot, j’ai 58 ans et j’ai commencé dans ce métier en 1978. C’était un hobby que j’ai eu la chance de transformer en profession. Et je n’aurais jamais imaginé pouvoir l’exercer pendant 35 ans. C’est un métier compliqué qui est devenu difficile. Mais, si l’on est prudent, que l’on ne prend pas la grosse tête et que l’on garde en tête que les artistes ce n’est pas nous, mais les autres, tout continuera à bien se passer.
Vous organisez donc des concerts dans des styles musicaux très variés. Y a-t-il selon vous des spécificités propres au metal ?
Le public metal est un public très fidèle, une partie vieillit et des plus jeunes arrivent, il faut pouvoir proposer des groupes proches du « mythique » comme Metallica ou Iron Maiden mais aussi des artistes émergents, nouveaux.
Personnellement, vous sentez-vous plus proche d'un style musical que d'un autre ?
Je produis ce en quoi je crois, alors vous voyez que ça peut être très varié !
Nous Prod a été racheté en 2010 par Warner. Avec le recul, qu'est-ce que cela a modifié dans votre fonctionnement ? (facilité de travail avec certains artistes, artistes imposés par Warner etc.)
Je souhaite faire les meilleurs choix possible pour Nous Productions et c’est pour cela que l’entreprise est devenue une part de Warner en 2010. Toutefois, je garde cette liberté et cette indépendance que j’ai toujours voulu avoir en produisant ce que je souhaite.
L'édition 2012 a été un gouffre financier (vous avez parlé de pertes à 6 chiffres !). Quelles étaient vos motivations pour maintenir ce festival malgré tout ? Comment se remet-on financièrement d'un tel coup (appel aux banques, fonds propres suffisants, augmentation des marges sur les évènements suivants...) ?
L’année dernière était effectivement très dure. Il y a eu beaucoup d’argent de perdu, mais mon métier de chef d’entreprise fait que je sais gérer les pertes autant que les gains, comme tout chef d’entreprise. Je sais ce que c’est de gagner de l’argent, je sais aussi ce que c’est que d’en perdre. C’est mon métier de gérer cela. Comme pour tout, il y a des années avec et d’autres sans.
Pour cette édition 2013, l'affiche est copieuse et les fans seront sûrement très présents. Quelles sont les principales modifications apportées au niveau de l'organisation et du site depuis la controversée première édition de 2011 ?
Nous avons pris en compte l’ensemble des remarques qui nous ont été faites par les fans. Que ce soit au niveau de la programmation, que de l’organisation pure et dure, à savoir le site, le camping etc. Nous avons corrigé ce qui méritait de l’être. Les erreurs sont possibles lorsque l’on commence quelque chose, mais nous n’allons pas les reproduire !
Vous avez dit à nos confrères de Metal XS qu'on pouvait presque prévoir d'une année sur l'autre les affiches, puisque "ceux qui ne sont pas venus cette année viendront l'année prochaine". Faut-il comprendre qu'AC/DC et Metallica pourraient être les têtes d'affiche en 2014 ?
Un festival se prépare d’une année sur l’autre. Une fois que l’édition 2012 a été terminée, il a fallu commencer à réfléchir aux têtes d’affiches pour l’année suivante. Je n’aurai jamais pensé qu’on en arrive là et qu’il faille s’y prendre autant à l’avance mais à l’heure actuelle il y a plus de festivals que de weekends durant l’été. En effet, s’il y a 10 ou 12 festivals en Europe le même weekend, comme c’est le cas pour Rock en Seine par exemple, les artistes peuvent choisir trois villes maximum et vont donc aller là où il y a plus d’argent, c’est ainsi qu’entre en scène le critère financier. En dehors de cela, le planning de l’artiste ou du groupe doit s’accorder avec la saison estivale des festivals en Europe.
Cela fait donc beaucoup de conditions à remplir et à ce jour, il n’y a pas de réponse précise à cette question.
Les difficultés rencontrées par le Sonisphère anglais ne seraient-elles pas le signe avant-coureur d'un système qui court à sa perte avec la surabondance de festivals et l'augmentation des cachets d'artistes ? Avez-vous le sentiment que les groupes (et souvent leur entourage) scient la branche sur laquelle ils sont assis ?
Je pense qu’il va forcément décliner sur le Hard Rock parce que tous les deux ans ce sont les mêmes groupes qui reviennent, et c’est une constatation au niveau mondial. Dans le Hard Rock, Metal, Punk, Fusion etc,, les festivals sont arrivés à un niveau de fréquentation optimal et ils n’iront pas au delà. Ceux qui continueront à bien fonctionner sont ceux où les gens vont pour y retrouver une ambiance, une atmosphère, pour se retrouver entre amis, entre fans.
Dans le Rock Hard France de Janvier 2013, Ben Barbaud (organisateur du Hellfest) parlait d'état d'esprit trop différent et de vision trop éloignée de la vôtre ainsi que de potentiels bâtons dans les roues l'empêchant d'avoir certains groupes à son affiche. Qu'avez-vous à répondre à cela et êtes-vous prêt à entamer un dialogue cordial à l'avenir avec lui ?
Je pense qu’il faut se souvenir que si le Hellfest en est là aujourd’hui, c’est en grande partie grâce à ma collaboration et au travail que j’ai pu y accomplir pendant de nombreuses années. Le Sonisphere n’a jamais eu vocation à aller à l’encontre du Hellfest. Nous travaillons différemment, avec une expérience, des méthodes, des bases différentes.
Nous ne l’attaquons pas, nous ne sommes pas en guerre. Nous coexistons, avec nos différences et nos similitudes.
Et il faut se rappeler que je suis dans le métier depuis 35 ans, que je travaille avec certains groupes depuis quasiment autant de temps et qu’il semble logique que les choses continuent ainsi.
Merci beaucoup de nous avoir accordé cette interview. On vous laisse le dernier mot aux fans et futurs festivaliers du Sonisphere France 2013 à Amneville.
Nous espérons sincèrement que vous aurez la joie de nous rejoindre à Amnéville les 8 et 9 juin prochain !
Entretien réalisé par mail, questions de Ben l'ancien et Ju de Melon
Merci à Karine Sancho de Warner pour l'organisation