- La Mathilde est revenue ! Big Jack chantait déjà ça au milieu du siècle dernier. Rien de bien nouveau donc…
- Meuh non, grosse (Jacques) brèle ! La Mathilde, c’est le renouveau de la chanson française pur jus.
La Mathilde du XXIème siècle, c’est donc ce combo de mecs trentenaires ou presque qui nous livrent ici leur troisième opus : Du Sang Dans La Terre.
Pour ceux qui sont des familiers du groupe, l’évolution par rapport au précédent Equilibriste est flagrante. Quelques petits changements dans le line-up et voilà que le combo intègre un bassiste issu de la scène "emo" francilienne. Retraité de chez Madame de Montespan, encore actif chez Cathedraal, le gars apporte une touche beaucoup plus rock à l’édifice.
Les morceaux se font donc musicalement plus violents. "Je Mens" envoie la purée copieusement. Chanson française certes mais énervée. Engagée aussi. La voix du chanteur Elliott renvoie forcement aux grands noms du genre. On évoque le souvenir de Bertrand Cantat. Par rapport aux premiers albums, le tempo se fait plus violent. On est dans un esprit plus rock qu’auparavant. On ne lésine pas sur la disto. Idem pour "ABCDR" avec des textes peut-être un peu moins bruts (ou brutes) que les bordelais. Mais y a pas à chier, faudrait envoyer cet abécédaire aux Académiciens Français, ça pourrait sauver une génération de pauvres élèves qui sont en train de bouffer à outrance de la nouvelle orthographe ! Ca finit en joyeux bordel limite hardcore, bien fait pour la grammaire !
Pour rester dans le scolaire, voici le clip de Je Mens
Le chant reste toujours mis en avant. Les textes sont forts et poignants, souvent dans le registre du loser un peu désabusé mais qui sait très bien où il veut aller. Ca ne respire pas la joie de vivre mais bon avec des titres comme "Mise A Mort", on ne peut pas s’attendre à des scènes de liesse débordantes.
On a ici de la chanson française écorchée vive. Mais la grande force c’est la manière de jouer avec les mots (je sais que le nouveau bassiste vient du monde sous-marin de l’emo mais rien à voir). Les textes peuvent avoir la finesse des grands Renaud avant que le pastaga n’ai bouffi son inspiration ou encore la subtilité corrosive d’un Thiéfaine à l’époque ou son corps était moins marqué par les affres de la dive bouteille. On est sur le créneau chanson française mais avec une inflexion marquée vers le rock plus sauvage.
Dans Les parties de sax on trouve même quelques relents ska-core sur "Arrache Tes Yeux", avec le saxophone distordu. Parfois on s’approche du son des rock fifties notamment avec "Les Marins". Comme le disait Francis Blanche : "c’est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases". Les images sont justes. Dans "L’Avant Dernière Semaine" les évocations des Corbières, montagnettes sacrées des audois sont très colorées et collent vraiment à mes souvenirs de ces paysages là. Grande classe ! On sent le vécu, on est complètement transportés.
La Mathilde sait aussi faire de belles ballades acoustiques comme "La Vie Le Vent Le Vin", pleines de jolies références littéraires et abordant des sujets des choses de la vie. Elle donne aussi dans les ambiances plus lourdes comme avec "Brule", beaucoup plus sombre avec des histoires plus compliquées. C’est le morceau "dark" de l’album. "Idora" est dans la même veine. On démarre doucement puis le rouleau compresseur se met en place. La Mathilde ravage tout sur son passage. "Idora" n’a rien à envier à Attila et ses Huns tant le morceau inspire la désolation. Les parties de basses rajoutent une ambiance caverneuse et le riff hypnotique nous tiens par la peau des oreilles (vous croyiez quoi ???). Ca me rappelle, pour le coté revendicatif, un groupe excellent : Les Kargol’s ! Si vous avez aimé La Mathilde, je pense que malgré leur coté un peu plus violent vous accrocherez bien.
Du Sang Dans La Terre est donc un album que je qualifierai volontiers de rock écorché vif avec des textes en français véhiculant un message moins basique que « sex, drugs and rock ‘n’ roll » mais quand même intéressant. L’album est varié. Du bon boulot. On se laisse prendre au jeu et à la fin de l’album on se rend compte que La Mathilde a réussi à nous emprisonner dans son univers. Une belle réussite.