"Si la Terre chantait une chanson, ce serait du blues"
A la fois membre de Spiritual Beggars, d'Arch Enemy et de The Night Flight Orchestra, Sharlee D'Angelo est un bassiste qui multiplie les casquettes. Au cours d'une interview accordée à La Grosse Radio, le musicien a évoqué les détails sur la création d'Earth Blues, nouvel albumd de Spiritual Beggars et n'a pas oublié de parler de tournée et de ses autres groupes, le tout avec une bonne humeur communicative.
Que penses-tu du résultat d’Earth Blues ?
J’en ai une très bonne impression ? Ça fait un moment que je l’écoute et il me plait toujours, pourtant, des fois, quand tu passes du temps sur un album, et que tu n’arrêtes pas de l’écouter, tu finis par saturer ! [rires] Ce n’est pas le cas avec Earth Blues, je suis toujours heureux de l’écouter, donc tant mieux ! Cet album est le plus mélodique depuis que j’ai intégré le groupe, et en même temps le plus énergique et direct, plus que Demons et assurément plus que Return To Zero, qui était très épique.
Le son est plutôt chaud est brut. Est-ce là le but recherché ?
En fait, on n’avait pas assez d’argent pour la production… [rires] Non, on joue une musique qui doit être enregistrée de manière spontanée. Les prises de base se sont faites en une fois avec tout le monde dans la même salle. Les chansons avaient une atmosphère particulière au moment des répétitions, on a voulu la conserver en gardant la même manière de travailler, plutôt qu’en nous éparpillant en enregistrant plusieurs pistes et en les assemblant. On paye un petit peu cette méthode, il y a quelques erreurs, quelques bruits qui ne devraient pas être là, mais ce n’est pas grave. J’aime beaucoup la manière dont sonne l’album cela dit, ça sonne très old-school, on l’a enregistré dans cet esprit, même si c’est en numérique.
Que signifie le titre Earth Blues ?
Si la Terre devait chanter une chanson en ce moment-même, ce serait plutôt une chanson de blues, et non une chanson enjouée. On retrouve cette thématique dans la chanson « Turn The Tide » et aussi dans la pochette de l’album, qui soulève la question de l’état du monde à l’heure actuelle.
As-tu participé aux compositions ?
Pas une note ! [rires] Non, cela reste un travail de groupe, on a tous participé aux arrangements et notre interprétation a aidé au processus créatif. Malgré cela, Michael Ammot [guitare] et Per Wiberg [claviers] restent les deux principaux compositeurs et les deux génies du groupe.
Parlant de Per Wiberg, on remarque dans cet album qu’il y a une forte importance du clavier, notamment du hammond. Est-ce que Jon Lord, qui nous a récemment quittés, a joué une influence ?
Son décès ne nous a probablement pas influencés directement, mais son esprit illumine l’ensemble de l’album à mon avis. Deep Purple est une de nos plus grosses influences, et Jon Lord l’est assurément pour Per, comme le hammond. De plus, la production lui donne plus de place. On ne voulait pas d’un mur de guitares omniprésent, je trouve que le hammond et la guitare se complètent bien. Je trouve que Per joue mieux sur cet album que sur n’importe quel Spiritual Beggars, il est vraiment inspiré. Sur une chanson comme « Kingmaker », tu sens bien la patte Jon Lord quand le riff de clavier démarre. Quelque part, tu te dis qu’il est là.
Qu’est-ce ça fait d’être dans un groupe qui fête ses 20 ans cette année ?
Je suis fan du groupe depuis le premier EP qu’ils ont sorti. Quand j’ai rencontré Michael Ammot pour la première fois, au début des années 90, il parlait de ce « nouveau groupe qu’il voulait créer. Donc j’ai pu les voir dès le début avec un certain recul. C’était excellent d’être fan du groupe, mais aussi d’en faire partie. Tu commences par aimer les chansons et ensuite tu te retrouves à apposer ta marque au groupe et à contribuer à son histoire. C’est à la fois un privilège et un défi.
Comptez-vous faire quelque chose de spécial lors de votre prochaine tournée par rapport à votre anniversaire ?
Oui, le concert à Paris le 22 avril ne contiendra que des chansons vieilles et immatures ! [rires] On va essayer de mettre le plus de chansons possible de l’ensemble de nos albums, afin de passer en revue l’ensemble de notre carrière. C’est un défi à relever, nous avons pas mal de chansons à choisir. Mais au moins, on fait une vraie tournée, ce qui est déjà quelque chose de spécial en soi, vu que la dernière vraie tournée date d’il y a 10 ans ! Nous sommes tous occupés avec nos différents projets chacun de notre côté, c’est pour ça qu’il se passe autant de temps entre les albums, notamment entre Demons (2005) et Return To Zero (2010). Après avoir fini ce dernier, nous avons fait quelques festivals et tourné au Japon et nous avions toujours la tête à Spiritual Beggars, c’est pour cela qu’on a mis moins de temps à sortir Earth Blues. La suite logique était qu’on mette en place une vraie tournée. C’est autre chose que les festivals, on y joue moins longtemps et devant un public qui n’est pas forcément le notre.
Parlant de festivals, Spritual Beggars va faire le Hellfest cette année, sur la même scène que Ghost, Clutch ou encore Graveyard. Qu’en penses-tu ?
Je suis très heureux ! Je vois ce festival s’étendre d’année en année et de nouvelles scènes d’ajoutent, la notre est dans une ambiance plus intime, avec une programmation qui fait qu’on se retrouve devant un public qui aime ce type de musique en particulier. On espère que les fans des groupes que tu as cités resteront dans le coin et iront nous voir ! [rires] Si Clutch tourne depuis un moment, il y a des groupes plus jeunes comme Graveyard ou Witchcraft, qui attirent un public plus jeune probablement. J’espère qu’on pourra aussi les impressionner.
Spiritual Beggars n’est pas le seul groupe de hard rock old school dans lequel tu joues, il y a aussi The Night Flight Orchestra. Björn a dit qu’il y aurait un autre album de ce projet. En feras-tu partie ?
Oui, absolument ! Il faut juste que nos plannings s’accordent. David Andersson a dit qu’il avait assez de chansons pour tenir sur un album, pourquoi pas ? On va écrire encore un peu, et ensuite en sortir les gemmes. Mais Soilwork [groupe principal du chanteur et du guitariste de The Night Flight Orchestra] vient de sortir un album et a commencé à tourner, donc ils seront occupés pendant un moment. Mais s’ils font une pause et que je suis disponible à ce moment-là, je serai content d’enregistrer pour eux ! C’est un projet différent de ce que je fais d’habitude. Spiritual Beggars a une identité 70’s marquée, mais The Night Flight Orchestra n’a pas d’éléments heavy et hard rock, c’est plus du rock mélodique, ou du « rock à papa », comme j’ai déjà entendu ! [rires] J’adore tous les membres du groupes, Ce sont des musiciens et des compositeurs talentueux et adorables, j’apprécie leur compagnie et j’apprends beaucoup en jouant avec eux. Jouer avec d’autres musiciens est enrichissant aussi, tu d’ouvres, tu es confronté à une autre vision de la musique qui élargit la tienne.
Est-ce que ton expérience avec The Night Flight Orchestra a influencé ton jeu dans Spiritual Beggars ?
Oui, en effet. Michael Ammot et David Andersson écrivent les chansons de manière totalement différente. J’ai joué différemment sur Nightflight Orchestra et découvert de nouvelle techniques et manières d’interpréter. Il se trouve que Michael a écrit pas mal de riff très rock sur Earth Blues, donc j’ai pu utiliser ce que j’ai appris avec Night Flight pour les nouvelles chansons de Spiritual Beggars.
Et à côté de ça tu joues dans Arch Enemy, qui évolue dans le death metal mélodique. Que penses-tu de ces différences de genre ?
Je pense qu’Arch Enemy est plus exigeant physiquement. L’expression musicale est, certes, plus extrême, mais le cheminement suivi lors de le composition est similaire, c’est juste interprété différemment. Certaines idées et mélodies qui sont présentes dans Spiritual Beggars qui auraient pu marcher avec Arch Enemy, Michael a toujours des riffs en tête dont il ne sait pas dans quel groupe ils vont atterrir. On avait d’ailleurs essayé le riff d’intro de « Sweet Magic Pain » avec Arch Enemy, mais ça n’avait pas collé. La plupart du temps, quand Michael écrit une chanson, il sait dans quel groupe elle va atterrir, mais certaines idées prennent du temps avant de trouver leur place. Certaines mélodies, arrangées et jouées différemment, pourraient très bien marcher avec les deux groupes. C’est pour ça qu’il est possible, de manière générale, de reprendre des chansons d’un genre musical complètement différent, tu peux les « metaliser » ou les « dé-metaliser ».
Un dernier mot pour les fans français ?
Venez nous voir à Paris et à Toulouse bientôt, et au Hellfest aussi, nous serons très contents de jouer devant vous !