Au rayon pop française classieuse, je demande La Position du Tireur Couché. Un nom à coucher dehors, inspiré d’un polar série noire de J.P. Manchette publié début 80. Original. Le groupe clermontois après quelques années d’abstinence vinylique sort de sa réserve et nous livre les deux premiers singles du prochain album. Question emballage, c’est du haut de gamme. Pochettes soignées, disponibles seulement en 45 tours. Dans l’esprit ! Coté musique, la qualité est au rendez-vous.
"Tu ne me diras plus rien" ouvre le bal des singles. On pense à Françoise Hardy ou à d’autres tout aussi célèbres. On parle du quotidien. On raconte une scène de vie. Pas de philosophie. Ici c’est carpe diem, on savoure l’instant présent. On voit le soin du détail chez La Position du Tireur Couché. Ceci peut expliquer la si longue attente depuis Acapulco, leur premier album. Ca valait le coup.
"Ca me travaille", en face B est un morceau plein de légèreté sur un fond de guitares twangy et avec de la verdure. Le solo aurait pu se trouver dans n’importe quelle série sixties digne de ce nom. La Position du Tireur Couché nous sert de magnifiques chansons tantôt sucrées tantôt acidulées qui raviront forcement n’importe quel cocktail lounge. A savourer comme le grand James avec un Martini et trois olives.
"Sinatra", deuxième single séduit avec ses guitares saturées derrière une voie féminine évoquant toujours la Bardot. La voix mâle évoque les plus grands machos sixties comme Hubert Bonnisseur de la Bath bien mieux que Jean Dujardin bien que celui-ci ne s’en sorte pas si mal. Sur les solos, la fuzz fonctionne bien. On est à fond dans l’esprit. On se placera parfois entre l’hommage et la parodie.
"Je n’ai peur de rien" en face B enfonce le clou. Si Born Bad avait entendu ça, les compils Wizzz n’auraient pas eu la même gueule. Les chœurs de la fille gnagnasse et amoureuse sont tout simplement parfait. Le morceau pop par excellence, terriblement bien fait.
Comment ne pas adhérer à cette Position du Tireur Couché tant la fraicheur des compos est irrésistible ? Pour en savoir un peu plus, j’ai pu poser quelques questions à Fred Pradelle, guitariste-compositeur du combo.
La Grosse Radio : Peux-tu rapidement présenter le groupe ?
Fred : La position du Tireur Couché, groupe de Pop Française créé à la fin des 90's par des étudiants fans de rock "indé", des Inrocks et ne sachant pas très bien jouer. Puis premiers concerts, Découverte du ¨Printemps de Bourges, EP en 2003, une voix féminine qui arrive et un premier album "Acapulco" en 2005 chez Naïve. Pour le reste, voir la Bio sur notre site www.laposition.fr.
LGR : Acapulco votre premier album est sorti en 2005 ? Pourquoi tant d’attente avant la seconde livraison ? Perfectionnistes ou branleurs ?
Fred : Ni l'un ni l'autre, je dirais branleurs appliqués... Et puis le résultat d'un processus de création très lent, d'autres activités pour chacun d'entre nous, d'un décalage certain par rapport à l'industrie de la musique et d'un peu de malchance dans tout ça.
La Position Du Tireur Couché - Athlétique... par EspritMusique
LGR : D’où vous viens cette passion des sixties ? Ce gout du vinyle ? Qu’est ce qui vous séduit dans cet univers ?
Fred : Globalement, nous partageons le gout du paradoxe, de la dualité, des choses raffinées et minimalistes, travaillées et spontanées, esthétiques mais subversives... Et beaucoup de toutes ces choses se retrouvent dans les sixties, dans les chansons d'un Gainsbourg classieux, délicat, dandy et crade à la fois. Pour le vinyle, c'est plus le gout du 45 tours, du single, de la bonne chanson que l'on découvre un jour, que l'on écoute dix fois et qui fait que l'on attend impatientent la suivante. C'est une façon particulière de découvrir un groupe, progressive, à contre courant de la tendance actuelle et à mon sens beaucoup plus excitante.
LGR : L’étiquette pop française sixties vous convient-elle ou la trouvez-vous réductrice ?
Fred : Cela ne nous dérange pas car les influences sont là, mais notre musique ne s'inscrit pas dans une démarche vintage ou nostalgique. C'est plus un choix du décalage, de paroles un peu désuètes, de voix placées très en avant, de duos masculins / féminins. Je dirais plus que nous nous appuyons sur un style, une esthétique et des techniques qui étaient particulièrement utilisés dans les sixties. Pour le reste, les histoires d'amour, les filles, les plages et tout ce qui fait notre petit quotidien et nos rêves n'ont pas dû beaucoup changer depuis 1969.
LGR : Quels sont le groupes qui semblent importants ou que vous appréciez aujourd’hui ?
Fred : Chacun de nous te donnera sans doute une réponse différente, donc je ne vais parler que pour moi. J'écoute beaucoup moins de disques qu'il y a quelques années, et je préfère écouter dix fois un disque qui me plait, quitte à revenir sur des trucs un peu daté, que de chercher l'exhaustivité, la nouveauté et le classement de fin d'année. Pour répondre à ta question et sans aucun calcul, je te dirais le dernier album de Low, des XX, un 33 tours des Silver Jews acheté à New York et des tubes d'Aretha Franklin que mon fils découvre en ce moment.
LGR : Quelles sont vos influences musicales majeures ?
Fred : Très larges et pointues à la fois. Pour la faire très simple, beaucoup de sixties (du Surf au Garage), du rock indé des années 90 et de la chanson Française.
LGR : Y a –t-il une tournée prévue pour promouvoir le futur album ? D’autres projets ?
Fred : Pour l'instant nous allons au bout du projet, soit sortir les 2 derniers 45 tours de la collection avant le mois de juin, avec à chaque fois un petit évènement de lancement. Sinon quelques dates en cours de calage pour cet été, et sans doute une compilation de l'ensemble des singles à l'automne si tout se goupille bien.
Résultat des courses : on tient dans l’hexagone en 2013 un renouveau de la pop classieuse avec en fer lance des groupes comme les Liminanas ou la Position du Tireur Couché, tous deux repérés aux printemps de Bourges. C’est un gage de qualité quand même... Bon vent à eux ! On attend la suite…
