Death Valley Girls, le nom parle dans doute aux âmes perdues ayant pris l’habitude de traîner leurs guêtres dans les festivals indé. Le quartet californien publie ce mois-ci son quatrième album. Si les précédents nous avaient paru agréables sans nous marquer véritablement, il en sera tout autre pour Islands In The Sky.
Dès l’entame, avec le fascinant "California Mountain Shake", le décor est posé : ce sera un album à atmosphères, de ceux qui tiennent en haleine d’un bout à l’autre. Le quatuor n’est pas là pour gifler nos joues, plutôt pour les caresser rugueusement. Le mix est épais, chaud et moite (de la musique à hamam quoi), les voix sont souvent placées dans une sorte de lointain tout à fait bien senti, elles émergent parfois à peine de la vapeur lourde et glissent sous le plafond - en tout cas dans le corps de l'album, cela ne se vérifie pas pour les singles, forcément plus radio-compatibles. Du fait de leur présence très régulière (on est bien souvent dans un format chanson, où l'accompagnement s'organise pour nous focaliser sur la partie chantée) et de leur timbre particulier, elles auraient pu lasser rapidement ; ainsi mises à distance, bien dans le mix, il n’en est rien.
Même les harmonies vocales font parfois l’effet de nappes de clavier plutôt que de véritables chœurs. Comme tout semble provenir d'une même source sonore massive, le rendu est parfois un peu brouillon, mais bon, c’est du garage, de l’aspérité. On n’est pas convaincus qu’avec une meilleure définition, l’album serait de meilleure qualité.
Les interprétations vocales sont par ailleurs parfaitement habitées, parviennent à mettre en relief des des mélodies pas forcément les plus ambitieuses – ce qui n’a rien de négatif, c’est au final ce qui nous plaît. Du simple et touchant à la fois.
Du côté de la composition, si l’on reste tout du long fiché dans cette ambiance lourde et hypnotique nous collant dans le canap la langue sur le menton, les Death Valley Girls apportent suffisamment de diversité, mélodique ou de tempo, pour n’ennuyer jamais. Du langoureux de l’ouverture, on passe à un titre plus punchy, "Magic Powers" (idéalement placé en deuxième position pour présenter rapidement Sammy Westervelt, nouvelle bassiste du groupe et au chant lead sur ce titre), mais le dansant a également sa place, notamment avec "What Are The Odds", l’un des singles, particulièrement enthousiasmant (attention ça reste dans la tête).
Une vraie personnalité émane donc de l’ensemble, que l’on qualifierait de soul mystique, chargée de ce genre de désespoir criant qui met en fait de bonne humeur : Islands In The Sky est finalement un feel-good album, spirituel et chamanique. C’est en ce sens que l’on formulera notre seule réserve quant à l’œuvre : la pochette, en dépit de son élégance, nous semble hors de propos, froide et bleue, quand l’album nous inspire plutôt des couleur chaudes, type coucher de soleil de la dernière case d’un Lucky Luke... Sauf que dans cette aventure, il ne serait pas parti s’occuper des méchants mais plutôt fait un trip à l’ayahuasca. Ce serait un préquel qui expliquerait entre autres pourquoi il est persuadé que Jolly Jumper parle.