Autant le dire tout de suite, bien que les ambiances oniriques et contemplatives ne me laissent pas indifférent, je ne suis pas un grand amateur d’ambient pur. Pourtant, si une partie de ce split-album s’inscrit assez foncièrement dans ce registre, il reste que ce projet pourrait intéresser certains de nos lecteurs. L’album est issu de la collaboration entre le collectif brésilien Labirinto, qui ouvre le bal avec trois compositions, et Thisquietarmy, qui est le projet d’un seul homme, le canadien Eric Quach pour ne pas le nommer. Bien sûr, si le projet se situe globalement dans une veine très particulière, il n’est pas sans faire plusieurs clins d’œil au rock et a le mérite de nous permettre de découvrir des artistes encore très peu connus dans nos vertes contrées.
La première partie de l’album, dévolue à Labirinto, est celle qui reste la plus proche de notre style de prédilection. Basée sur des instruments que l’on reconnaîtra sans trop de peine, la musique du collectif pourrait être hâtivement rapprochée des ambiances du post-rock. Pourtant, ce ne serait pas véritablement rendre justice au travail effectué par les brésiliens, qui cherchent davantage à tisser des paysages dans lesquels l’auditeur pourra se promener à loisir, y insinuer ses propres images et représentations en fonction de son parcours, de ses préférences et de son humeur du moment.
A ce titre, la musique prend son temps (Labirinto est clairement influencé par la scène progressive, sans compter la longueur des compos), développe des ambiances sans poursuivre un but particulier, se rapprochant ce faisant des bandes originales de film. Les passages oniriques laissent place à des moments plus remuants, mais sans jamais dévier d’une ligne de conduite qui privilégie une progression naturelle à toute structure conventionnelle et pousse encore plus loin la démarche déjà aventureuse d'une formation comme Guns of Brixton. Le collectif a sorti précédemment plusieurs EP et un album complet en 2010, sur lesquels la qualité de ces compositions nous invitent à poser une oreille plus attentive.
Le cas de Thisquietarmy est un poil plus problématique pour l’amateur de rock lambda tel que votre serviteur. En effet, on s’éloigne de tout repère rassurant pour franchir un cap supplémentaire vers l’ambient. Ici, pas de batterie, de repère rythmique clair. Les mélodies sont présentes, mais dissimulées derrières des nappes de brouillard que l’on accueillera, selon sa sensibilité, avec agacement ou enthousiasme. Car les 4 compositions (plus courtes que celles de Labirinto) dévolues à Thisquietarmy paraissent pour l’auditeur non éclairé plus adaptées à la pratique du yoga qu’à l’écoute attentive. Question de goûts, mais qui confère un cachet supplémentaire à ce projet. Un projet intéressant et de qualité, qui ne conviendra certes pas à tout le monde, mais qui mérite le détour pour peu que vous appréciez l’écoute contemplative, voire méditative.
