"Nous combattons pour la liberté de la musique"
Après son concert avec Waltari qui a ouvert la dernière journée du Hellfest, Kärtsy Hatakka, chanteur du groupe, a accordé quelques minutes à La Grosse Radio pour évoquer, dans une bonne humeur générale, ses ambitions, sa carrière solo, son combat et les 26 ans qu'il a passé au sein du groupe barré finlandais.
Bonjour Kärsty, tu as donné ce matin ton premier concert au Hellfest, qu’en retiens-tu ?
Je suis très content, cela faisait des années que j’attendais de venir au Hellfest, c’est l’un des plus grands festivals de metal. Avant j’avais déjà fait le Wacken ou Bloodstock et je pense que c’est le meilleur, j’aime beaucoup la région et l’atmosphère qui règne sur l’ensemble du festival.
Qu’as-tu pensé du public ?
Les gens qui étaient là étaient bien à fond dans notre concert, ça fait plaisir à voir. Je pense qu’on en a réveillé certains ! [rires] Nous avons joué tôt ce matin, parce que notre promoteur voulait nous faire jouer sur une Mainstage, donc c’est compréhensible.
Vu que les autres scènes ont des genres bien précis, cela n’aurait pas correspondu à votre large spectre d’influences.
C’est vrai, de toute façon nous détestons la catégorisation de la musique. Au moins, sur ces mainstages, n’importe qui peut passer et s’amuser.
D’ailleurs, tu as déclaré à la fin du concert que "les styles, c’est de la merde". Pourquoi ?
Ils rejettent la créativité. Je pense que les styles sont la raison pour laquelle l’industrie de la musique est en train de couler. C’est trop professionnel et ça entretient les clichés. Je ne comprends pas les groupes qui se cantonnent à un style ou à un genre précis. Pour moi, le but principal de la musique rock dans les années 60, c’était d’emmerder les musiciens professionnels. C’est comme ça que ça devrait se passer. On emmerde les professionnels, on fait ce qu’on a envie de faire, et plus ça sonne bizarre, plus ça me plait. Pour moi, le rock et le metal ne sont pas assez dangereux de nos jours. J’aime le danger, j’aime prendre des risques. C’est aussi pour ça que je trouve que les styles sont merdiques, ils donnent trop de sécurité.
C’est pour ça que tu mélanges toutes ses sensibilités musicales différentes dans Waltari ?
Oui, je suis un grand fan de musique. Avant de me mettre à jouer, j’ai écouté plein de styles de musique différents. De toute façon, quel que soit le type de musique qu’on fait, on garde le son de Waltari. On doit donc le garder et si on entend un son qui nous intéresse, on l’utilise, peu importe de quel genre il vient.
Visiblement, la tournée anniversaire de Waltari n’est pas terminée, puisque vous avez annoncé d’autres dates.
Après un an et demi de tournée anniversaire, on compte prendre un break, notamment parce que je me prépare à sortir un second album solo à la fin de l’année. Mais il se trouve qu’on a pas mal de demandes de fans pour des concerts de Waltari. On va jouer aussi longtemps que possible, avant de faire une pause et reprendre l’écriture d’un nouvel album, qu’on espère voir sortir l’année prochaine.
Tu es sûrement occupé avec ton prochain album solo, mais as-tu déjà des idées concernant le prochain album de Waltari ?
Oui ! Cela fait un an que certaines idées me trottinent dans la tête. Mais c’est un peu tôt pour en parler. Mais je pense que l’album sera encore plus fou ! Il n’y a aucun moyen de revenir à la normalité de toute manière ! Nous sommes justes des amoureux de la musique qui cherchons à être créatifs ! Selon moi, les groupes les plus marquants ont été dingues à leur manière, et ont su courageusement mélanger les styles. Waltari se place dans cette optique, on pense qu’il n’y a plus assez de groupes comme ça ! Nous comptons continuer notre combat pour la liberté de la musique !
Comment décrirais-tu ton prochain album solo ?
Il est très différent de ce que je fais dans Waltari. L’intérêt de faire un album solo et qu’il soit à 100% différent de mon groupe. C’est dans une veine catchy, proche du pop/rock et ça n’a rien d’expérimental. Il y a des gens qui aiment mes mélodies, mais qui trouvent que Waltari est trop compliqué pour qu’ils comprennent ce qu’il en ressort. Ma carrière solo s’adresse à ceux qui n’aiment pas Waltari. C’est un moyen d’atteindre un autre public, plus mainstream peut-être. C’est comme de la musique américaine faite à la façon finlandaise, et chantée en anglais bien sûr, pour avoir une portée internationale.
Qu’en est-il est musiciens ?
Le guitariste qui jouait avec nous aujourd’hui en remplacement de Sami, Kimmo Korhonen, jouera sur l’album.
Sami était pris avec Kreator pour la tournée. Cela ne compromet rien pour son avenir dans le groupe ?
Non, du tout. Il est occupé avec Kreator et je comprends tout à fait. Il a déjà enregistré des démos et jouera dans le prochain album de Waltari. Kimo le remplace occasionnellement depuis 3-4 ans et il s’intègre plutôt bien au groupe. J’ai l’impression que Waltari devient de plus en plus une sorte de collectif, avec des musiciens qui y jouent quand ils peuvent, un peu comme Hawkwind, à part deux membres permanents, tu ne sais jamais qui sera sur scène quand tu vas les voir en concert ! [rires] Je m’occupe de tirer tout ça vers l’avant, et on verra bien le résultat. On a aussi des membres qui sont là depuis longtemps, ils vieillissent et perdent de la motivation avec l’âge, mais je cherche toujours à continuer !
Sami était présent à votre dernière date à Paris, le 2 mars 2012 au Divan du Monde. Qu’en retiens-tu ?
J’en ai un bon souvenir ! Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, parce qu’on a dû jouer deux fois à Paris en 10 ans. Mais avec notre nouveau promotteur, les choses devraient bouger en France, d’autant qu’on a pas mal de gens qui nous suivent ici ! En plus, je suis tombé amoureux de ce pays l’année dernière quand je suis revenu. C’est assez différent que d’autres coins de l’Europe, il y a des aspects particuliers qui me plaisent beaucoup ! [rires]
Vous avez aussi fêté vos 25 ans de carrière en sortant un album de reprises. Pourquoi ?
Cela faisait 20 ans qu’on avait l’idée d’un album de reprises en tête. Avec l’anniversaire, c’était l’occasion de sortir quelque chose de spécial.
Comment avez-vous choisi les chansons ?
Comme nous sommes cinq dans le groupe, chacun a choisi deux chansons. Dans mon cas, je ne me suis pas dit "je vais prendre les deux meilleures chansons du monde", parce que je suis incapable de les choisir ! Du coup, je les ai choisies en une minute, je ne voulais pas perdre du temps à réfléchir, vu qu’on aime tellement de groupes et de styles différents qu’on ne pouvait pas tout mettre en un album de dix chansons. Du coup, j’ai choisi la chanson 'P.L.U.C.K." de System Of A Down parce qu’elle était dans mon lecteur CD le jour où on a répété. J’ai aussi choisi la reprise "Dingo", du groupe Levoton Tuhkimo, groupe finlandais, en adaptant les paroles. C’est une idée qu’on avait eue il y a 15 ans. Je pense que les autres membres ont aussi choisi les reprises de la même manière, de manière spontanée et sans se stresser.
Quelques arrangements choisis sont étonnants, comme la version ska de "Caught In A Mosh" (Anthrax), que vous avez jouée à votre concert ce matin.
Oui, la chanson a été choisie par notre batteur, Ville Vehviläinen, qui est probablement le seul "vrai" metalleux du groupe, il a aussi choisi "Infinite Dreams" d’Iron Maiden. Cela dit, j’aime beaucoup Anthrax, peut-être le premier groupe de cross-over thrash dans les années 80. Donc j’étais tout à fait d’accord avec son choix. Mais il m’a demandé comment on devait jouer cette chanson. Et l’idée du ska metal m’est venue comme ça, on a essayé et ça a marché. C’est une « party version » ! [rires]
Qu’est-ce que ça procure comme sentiment d’être dans le circuit depuis 26 ans ?
C’est très étrange ! Je ne m’attendais pas du tout à avoir une carrière aussi longue quand j’ai commencé ! Je n’avais même pas l’intention d’être musicien à plein-temps ! Ma vie entière n’a été qu’un enchaînement de surprises. C’est donc une grosse surprise d’être toujours là, mais tous mes amis me disent que je n’ai pas d’autre choix que d’avancer dans cette direction. Et je les crois. Je n’ai pas à me plaindre, ça fait 22 ans que je suis musicien à plein temps, c’est un rêve qui est devenu réalité !
Un dernier mot pour les fans français !
Restez ouverts d’esprits et ne regardez pas en arrière ! Voilà !
Photos d'ambiance : © 2013 Lionel / Born 666
Photo live : © 2013 Nidhal Marzouk / Yog Photography
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