Powerwolf et La Grosse Radio, c'est une histoire qui dure. Et ses membres se sont souvent exprimés face à nos chroniqueurs. Une fois n'est pas coutume, Falk Maria Schlegel, le claviériste du groupe, a pris de son temps pour nous parler du prochain album Wake Up the Wicked. On a parlé nouveaux morceaux, orgue d'église de Moselle et pronos de foot. Un programme bien rempli.
Bonjour Falk Maria, c'est assez marrant de faire cette interview en distanciel car on aurait pu faire cet entretien en face à face vu que tu habites pas très loin de la Moselle.
Falk Maria Schlegel : Ah oui d'accord ! C'est marrant car il n'y a pas si longtemps que ça, je suis allé voir le superbe marché de noël de Metz !
Chez toi au niveau régional, à Saarbrück, il y a une grosse communauté metal, vous avez des superbes salles avec une belle programmation. Tu expliques ça comment ?
Aucune idée, mais tu as raison, on a énormément de concerts et cet été pas mal de festivals. Il y a une certaine ambiance et on se connait quasiment tous. En tout cas, ça fait plaisir avec Powerwolf de faire partie de cette scène.
Comment pourrais-tu résumer ou définir le nouvel album Wake Up the Wicked ?
Le plus puissant. On a vraiment essayé de mettre toute notre énergie dans cet opus. On a commencé à le composer à peine revenus de notre tournée aux Etats-Unis et on était dans une certaine dynamique assez unique. On a composé directement le premier morceau "Bless'd With the Blade" et on s'est bien rendu compte que "le loup n'avait pas été domestiqué", bien au contraire. On a vraiment essayé de garder cette atmosphère live et ce côté catchy. D'ailleurs habituellement, je n'arrive pas trop à voir comment on va jouer des morceaux studios en live et pour cet album c'est clairement le contraire.
En parlant compos : comment ça se passe en studio ? Car le nouvel album fourmille d'idées notamment cette chorale d'enfants qui est inédite dans votre discographie.
Pour "We Don't Wanna Be No Saints", on avait déjà cette idée d'inclure un chœur d'enfants mais on n'avait jamais osé le faire. Et pour cet album, on s'est lancé. On ne savait pas si on allait l'utiliser mais on a tenté. Mais globalement, pour écrire une chanson, on ne démarre pas avec un riff de guitare mais plutôt avec la voix de notre chanteur Atilla Dorn, que ce soit un couplet ou un refrain. Et ensuite on essaye de voir ce qui va le mieux. Mais en tout cas on ne s'est pas dit : tiens on a une chorale à disposition, on va l'utiliser mais plutôt, on va tenter quelque chose.
Et toi, en tant que claviériste, comment choisis-tu tes sons ? Powerwolf est connu pour ses morceaux incluant de l'orgue liturgique mais sur cet album, tu joues aussi du clavecin ou du piano.
L'orgue a beaucoup de registres différents et apporte aussi cette atmosphère médiévale et comme tu l'as dit, ça fait partie de notre ADN. Mais il faut apporter de la variété et j'essaye de tester des choses comme la vielle à roue. En fait, en fonction d'un morceau, un son va apporter une dynamique différente. Si tu prends la chanson "Heretic Hunters", j'aurais pu jouer le thème uniquement à l'orgue mais ça aurait été totalement différent. On passe souvent du temps à tester des choses en se disant "Non, ça ne marche pas, on va essayer autre chose". C'est une vraie aventure que de trouver LE son.
En parlant d'orgue liturgique, j'ai vu sur internet que tu avais l'habitude d'enregistrer tes parties sur un vrai orgue d'église se trouvant à Thionville, en Moselle.
Oui c'est vrai mais en studio on fait un mix entre cet orgue et des samples. Et bien sûr en concert, je ne peux pas jouer sur un vrai orgue donc j'utilise mes synthétiseurs Nord.
Comment ça se passe en studio lorsque vous décidez de l'ordre des chansons ? Car passer d'un morceau qui parle du clitoris à une histoire de chasse aux hérétiques, c'est assez éclectique !
C'est une bonne question : il faut que l'album réponde à une certaine dynamique. Dès le départ on savait que "Bless'd With the Blade" allait ouvrir l'album. Puisque tu mentionnes "Kyrie Klitorem", on avait déjà écrit quelques chansons sur la masculinité et on aime bien écrire des chansons ironiques (rires). Et pour "Heretic Hunters" on s'est basé sur les Cathares du sud de la France. On aime bien aborder différents thèmes et essayer d'avoir le plus de diversité.
Le nouveau single "Sinners of the Seven Seas" bénéficie d'un clip vidéo assez impressionnant. D'ailleurs tu fais très bien le prêtre (rires). J'ai lu que tu adorais tourner des vidéos.
Oui, j'aime bien me retrouver dans un endroit réel et je préfère interagir avec de vrais accessoires plutôt que de faire quelque chose devant un fond vert ou avoir recours à l'intelligence artificielle. Bon, pour ce clip, j'ai eu le mal de mer donc c'était assez difficile de jouer sur ce bateau en pleine mer Méditerranée. Enregistrer un clip vidéo se rapproche de l'expérience du live car pour moi le but c'est de véhiculer une histoire. C'est un peu notre marque de fabrique à Attila et moi : on aime faire les acteurs. Et puis c'était vraiment la classe de tourner sur une réplique de la Victoria, ce bateau célèbre de la flotte espagnole qui a servi à Magellan dans ses voyages.
Tout comme les clips, les concerts de Powerwolf sont de plus en plus élaborés. Est-ce que vous avez encore des envies particulières, des choses que vous voudriez faire sur scène ? Ca serait difficile de faire plus grandiose que The Monumental Mass qui introduisait énormément d'éléments impressionnants, mais sait-on jamais.
Je m'occupe beaucoup de tout ce qui concerne le décor, les accessoires et c'est vrai qu'il serait assez simple de faire de plus en plus spectaculaire. Mais rajouter une dizaine de lance flammes, ça ne serait pas super passionnant. Mais je suis d'accord avec le fait qu'il faut qu'on trouve de nouvelles idées et c'est ce qu'on a fait avec The Monumental Mass et ce concert nous a énormément marqués alors c'est sûr que la prochaine tournée sera différente. Notre but est d'avoir une approche très cinématographique et c'est clair que ça se ressent dans les clips de "1581", "Sinners of the Seven Seas" et ça sera également le cas pour le prochain single.
Et à l'inverse, vous envisagez un jour de faire des shows plus intimistes ?
Pas du tout ! Je me rappelle d'un concert d'Iron Maiden en 1992 je crois (ndlr : c'était en 1993). Bruce Dickinson venait d'annoncer qu'il quittait le groupe mais ils avaient fini leur tournée et étaient passé à Saarbrück. J'adorais Maiden pour leurs décors et là il n'y avait rien sur scène à part des amplis Marshall. Alors j'ai passé une bonne soirée, certes mais ça faisait vraiment bizarre ! Moi j'ai besoin d'avoir des accessoires, un décor. Donc je n'imagine même pas ce que ce serait si on faisait des plus petites salles. Et même lorsqu'on joue en Amérique du Sud et qu'on doit réduire le budget, on essaye d'apporter avec nous la même expérience.
Sur scène, en général, les claviéristes sont bloqués derrières leurs synthés. Toi par contre, tu aimes bien investir le centre de la scène et dans une interview, Roel ton camarade du groupe a dit que tu étais le premier claviériste frontman. En plus tu n'utilises même pas de keytar !
Certains groupes comme Battle Beast en utilisent mais moi je déteste ça. Je me sens stupide ou comme si je faisais partie du groupe Modern Talking (rires). Parfois, dans un morceau, je ne joue pas alors je peux m'échapper et divertir le public en courant partout ou en interagissant avec Atilla. Je me rappelle que plus jeune, je voyais des claviéristes qui s'ennuyaient sur scène et je me suis toujours dit que je devais changer cela. Ce qui est bien quand on joue du clavier dans un groupe de metal c'est que non seulement, on peut s'arrêter parfois et puis, contrairement à un guitariste, on n'a pas forcément besoin des deux mains. Donc je peux utiliser ma main gauche pour interagir avec le public pendant que la main droite joue une mélodie. Et puis honnêtement, j'adore jouer avec le public.
Passons aux projets solo ou parallèles du groupe : très peu de membres ont enregistré des albums en dehors de Powerwolf. C'est quelque chose qui ne t'attire pas ou tu n'as pas le temps ?
On est tous concentré sur Powerwolf. J'ai déjà eu des demandes mais Powerwolf, c'est notre bébé. On l'aime tellement et on adore ce qu'on fait qu'on n'a même pas le temps de penser à d'autres projets. Et puis en tant que fan de certains groupes, parfois j'aurais préféré qu'ils se focalisent sur leur formation principale plutôt que de partir dans tous les sens.
Tu as démarré ta carrière avec le groupe de metal thrash progressif The Experience : un style assez éloigné de Powerwolf. Qu'est-ce qui est le plus important pour toi : la musique, l'atmosphère d'un morceau, le côté catchy ?
Tout ça en fait. Effectivement j'ai débuté avec The Experience mais c'était il y a longtemps et franchement, niveau compos, c'était pas fou (rires). On n'arrivait pas à aller droit au but. Avec Powerwolf, on se considère comme des artistes de divertissement. On veut que le public tape des mains ou crie pendant les concerts, qu'ils retiennent nos morceaux. Et vraiment, quand j'ai rejoint le groupe, je me suis dit tout de suite : "c'est le paradis" car à l'époque ils n'avaient pas beaucoup changé de line up et ils avaient tous la même vision. Si on avait dû se battre tout le temps en studio, on aurait eu du mal à arriver à un consensus. Alors que là, on sait ce qu'on veut.
Dernière question d'actualité (ndlr : l'interview a été faite le 28 juin, en plein Euro de football) : je sais que tu es un grand fan de foot : un pronostic pour la compétition ?
Oula, c'est dur à dire. Forcément j'ai envie de dire l'Allemagne car on joue à la maison. Mais franchement j'ai déjà vu pas mal de matchs et je dirais que l'Espagne va gagner (ndlr : bonne réponse !) car ils jouent vraiment bien. La France aussi est pas mal, j'aime beaucoup ce qu'Mbappé propose mais c'est l'équipe espagnole qui m'a convaincu le plus. Mais bon, c'est une compétition et tout peut se passer, il suffit d'un pénalty (rires).
Un grand merci à Falk Maria Schlegel pour sa disponibilité et à Romain de Singularités pour l'organisation.
L'album Wake Up the Wicked sera disponible le 26 juillet sur le label Napalm Records. Vous pouvez le commander ici.
Crédits photos : DR VDPictures