Premier album du collectif réuni sous le nom de Sweet Play, auquel participe notre pote Ludo des Holophonics. Le projet n'a pas grand chose à voir avec son premier groupe, bien que les Holo n'aient jamais caché leur attirance pour l'électro. La musique de Sweet Play tient davantage du crossover que de l'électro pur, et je n'ai pas pu m'empêcher de penser à l'album Host de Paradise Lost par moments. Par moments seulement, car si les sons de guitare ont été trafiqué à l'extrême pour un rendu forcément à des lieues du rock pur et dur, les rythmes et la voix de la chanteuse rapprochent d'autres influences, le trip-hop et Björk en tête. Pourtant, impossible de ne pas sentir que ce collectif là vient du rock (Depeche Mode n'est pas très loin non plus). Ce qui peut être autant une force qu'une faiblesse, selon que le groupe réussit à s'éloigner suffisamment de ses racines tout en proposant quelque chose de convaincant dans le genre ou pas.
Pas de suspense, c'est le cas. Ce premier album, qui fait figure de test grandeur nature pour l'avenir du collectif, est très solide et s'affirme comme une réussite. Pourtant, l'album commence de façon un peu étrange avec "The Hatcher", qui est de toute beauté et montre les compétences des musiciens pour écrire une musique riche en émotions, jusqu'à un premier refrain qui, introduit un peu à la truelle, casse la dynamique et le flow du morceau. Rien de foncièrement honteux, disons que c'est une façon de faire à l'américaine qui peut avoir ses adeptes. Fort heureusement pour les oreilles délicates de votre serviteur, ce genre d'artifices un peu facile ne sera plus utilisé, la progression naturelle étant par la suite systématiquement privilégiée.
De sorte que c'est à un beau panel d'ambiances auquel on a droit dès le touchant "Nothing Reacted", avant que l'excellent single "Flight" ne vienne nous rassurer tout à fait : les musiciens savent varier suffisamment leurs ambiances pour éviter à l'auditeur de ressentir une quelconque lassitude. Cet écueil évité, Sweet Play démontre un savoir faire qui force le respect, en faisant preuve d'inventivité dans ses breaks ("The Dotted line", avec une transition cette fois-ci parfaitement gérée), en se dirigeant vers des contrées plus tourmentées ("Come on" et son côté torturé) ou en revenant vers une musique émotionnelle juste ce qu'il faut pour que l'on se glisse avec plaisir dans le périple proposé par ce Across the Sky qui porte bien son nom. Car pour celles et ceux qui pensent à des couleurs en écoutant de la musique, il paraît évident que celles des cieux sont particulièrement appropriées.
Tout juste pourrait-on peut-être pinailler sur un léger côté répétitif, notamment au niveau rythmique, ou sur la voix qui à de rares moments se fait un peu trop nasillarde. Mais ça ne dérange pas les compositions concernées, et cette même voix reste irréprochable le reste du temps. Alors bien sûr, si Sweet Play veut poursuivre ses activités sur un deuxème album, il faudra redoubler d'inventivité, trouver de nouveaux rythmes, des arrangements différents, pour espérer sortir un album très accrocheur du début à la fin. Mais si l'on pense déjà à ce qu'il faudrait pour s'inviter dans la cour des grands, c'est bien parce que ce premier album est de grande qualité et mérite votre attention. Surtout que s'il est disponible en version CD, on peut aussi le télécharger gratuitement (et faire un petit don aux musiciens si on a aimé). Alors rendez-vous sur leur page facebook ou sur leur site !
7,5/10