Amorphis, debout sur le Divan !
L'embarras du choix ce soir pour les metalleux ou apparentés de la région parisienne ! Outre le show qui nous intéresse dans ce live report, on pouvait également noter les passages de Avenged Sevenfold (+ Five Finger Death Punch) au Zénith, de Nickelback à Bercy et même du duo Buckcherry/Hardcore Superstar au Forum de Vauréal. Rien que ça ! Le tout calé entre les prestations de Amon Amarth, Skindred, Apocalyptica, Airbourne, Blackrain, Gnô et j'en passe... qui a dit semaine de folie ?
Quant à votre serviteur, c'est une semaine pile après l'excellent show de Dark Tranquillity (+ Tristania) au Trabendo qu'il remet le couvert, au Divan du Monde cette fois-ci, pour observer la performance des finlandais d'Amorphis quelques mois après leur passage au Hellfest et la sortie du très convaincant Circle. Accompagnés de la nouvelle vague américaine Starkill, c'est avec la chaleur dans le coeur à défaut de l'avoir à l'extérieur que nous nous languissons du spectacle.
STARKILL
Place à la jeunesse pour débuter cette soirée, et au metal "extrême mélodique varié" de Starkill pour allumer la première étincelle. Tout droit venu de Chicago dans l'Illinois comme le précisera lui-même son frontman, cette formation a sorti cette année son tout premier album chez Century Media, un Fires of Life très prometteur et véritable melting pot d'influences death/black/heavy/folk mélodico-sympho du genre. Encore à la recherche de sa personnalité, ce qui est normal en début de carrière, le quatuor s'installe sans peur sur les planches du Divan et lance un "New Infernal" de folie après une courte intro symphonique. Commencer le set par la meilleure chanson de l'album et en se donnant à fond, motivation exacerbée de chaque membre de la troupe, c'est bien, mais encore faut-il assurer par la suite.
Si Starkill montre une dextérité musicale sans faille, avec en tête un (très jeune) batteur des plus doués enchainant parties techniques ou speed avec grand talent, un souci sera remarqué au niveau d'un chant plutôt faiblard ou peu audible du guitariste-vocaliste Parker Jameson. Souci de mix ou détail encore à travailler ? Il faut dire qu'il n'est jamais évident d'assurer un chant extrême entre death étouffé et black aigu (un peu à la Dani Filth par moment) tout en manipulant sa 6 cordes, d'autant plus que les parties guitares de Starkill sont plutôt travaillées, frôlant même le power/heavy mélodique comme sur ce twin solo très Helloween sur la conclusion "Whispers of Heresy" pourtant teintée d'atmosphères Dimmu Borgir. Preuve donc que le groupe a de la ressource, mais qu'il reste encore quelques points à peaufiner.
Peu importe au final, la prestation sera plutôt acclamée par un public relativement conquis et respectueux d'une formation qui a tout donné sans compter. "Are you ready for Amorphis?" demande l'ami Parker dans l'intro de "Strength in the Shadow"... on peut dire que oui, bien chauffés que nous avons été par les jeunes ricains. A noter pour terminer, au rayon réussite, les titres "Immortal Hunt" et ses "circle headbanging" ou le guerrier "This Is Our Battle; This Is Our Day" que Rhapsody n'aurait pas renié (qui a dit "March of the Swordmaster" ?). A revoir, l'expérience aidant devrait nous permettre d'apprécier ce quatuor dans de bonnes conditions... et avec un vrai claviériste peut-être cette fois ? Car au fond il est dommage de laisser cette importante part musicale à des samples.
Setlist :
- New Infernal Breath
- Immortal Hunt
- Fires of Life
- Below the Darkest Depths
- Strength in the Shadow
- Sword, Spear, Blood, Fire
- This Is Our Battle; This Is Our Day
- Whispers of Heresy
AMORPHIS
Le changement de plateau est assez long mais pour autant la pression ne retombe pas. Le Divan du Monde semble fort bien rempli au moment où le décor se laisse entrevoir : un gros backdrop à l'effigie du dernier né Circle ainsi qu'une batterie customisée de son artwork pour l'occasion. Les plus malins remarqueront un sac Jardiland sur le côté, poussant la plaisanterie comme quoi s'y cacherait quelque engrais pour nourrir les dreadlocks improbables du chanteur Tomi Joutsen. Trève de hors sujet, il est environ 21h lorsque les lumières s'éteignent et qu'une intro clavier rappelant "Shades of Gray" retentit... Jan Rechberger s'installe derrière les fûts, suivi de Santeri Kallio derrière son clavier, et tout le monde suit pas à pas lorsqu'en effet le premier morceau du nouvel album se lance avec un Tomi qui lâche les watts direct d'un bon growl !
On peut de suite en causer, du héros de la soirée, tant Tomi Joutsen s'est montré à l'aise comme jamais mais surtout bien plus radieux et communiquant qu'à l'accoutumée. On sent que le frontman finlandais a encore progressé sur ce point, s'amusant plus avec le public et le faisant participer au maximum, y compris sur les morceaux du nouveau CD ("Hopeless Days" en tête). Petite plaisanterie récurrente du concert, ce "this is my favourite song" entonné lorsqu'il tendra l'oreille sur les ovations chantées du public entre chaque morceau. Facétieux le père Joutsen ? Cela fait plaisir à voir ! Quant à sa prestation vocale, est-ce utile de la commenter ? Bien puissant dans ses growls et plutôt précis dans son chant clair, y compris sur le pas très évident "Into Hiding" pas forcément façonné sur son timbre, il a notamment très bien mis en valeur les titres de Circle.
Le nouvel album était donc comme prévu la star du concert. Si "Enchanted by the Moon", en balance avec "Leaves Scar" sur cette tournée, a malheureusement laissé sa place à cette dernière, et même si "Mission" semble un peu l'oubliée de service, on ne peut qu'être ravi du choix des morceaux. Outre un "Shades of Gray" pour bien chauffer tout le monde, un "Hopeless Days" dont les paroles semblent déjà connues des fans et un "Narrow Path" à la cavalcade des plus accrocheuses, remarquons le grand écart entre l'intimiste presque émotionnel "The Wanderer" et l'explosif "Nightbird's Song" ou ses passages blackisants à faire tournoyer de plaisir la plus frigide des muses. Deux très grands moments du concert, assurément.
Niveau setlist globale, on peut affirmer qu'Amorphis a largement su satisfaire ses ouailles, malgré un album Silent Waters totalement oublié (le morceau titre ou "Towards and Against" n'auraient cependant pas fait tâche dans le lot) et un The Beginning of Times réduit à son seul mais diablement tubesque "You I Need". Outre le petit dernier Circle, Skyforger sera très bien représenté lui aussi avec l'incontournable "Silver Bride", le redoutable "Sampo" et l'irrésistible "Sky Is Mine" qui en fera chavirer plus d'un. Normal, pour ce qui est très certainement le meilleur album de l'ère Joutsen à ce jour. Parlant de cette période, le premier opus où Tomi posa sa voix ne sera pas oublié, Eclipse délivrera ainsi "Leaves Scar" mais surtout l'inévitable "The Smoke" pour parfaitement combler les attentes de chacun. Depuis la parution de la compilation "réenregistrements" Magic & Mayhem, Amorphis n'hésite plus à performer des vieux titres, chose faite ce soir avec classiques que constituent "My Kantele" ou encore "Black Winter Day", histoire de ne pas oublier les fans plus anciens présents une nouvelle fois en nombre ce soir.
Scéniquement, Amorphis reste un groupe assez froid derrière son frontman, mais à la précision d'un horloger quant à la délivrance d'arpèges ou autres riffs mélodiques. Un sans faute pour Tomi Koivusaari et Esa Holopainen, les deux guitaristes, ce dernier offrant comme à son habitude une belle panoplie de guitares sur lesquelles il aposera un jeu des plus appliqués et précis. Loin d'être en reste, Niclas Etelävuori lâchera son jeu de basse ainsi que ses choeurs de soutien sans le moindre mal, Santeri nous envoûtera de ses nappes de claviers tantôt discrètes tantôt agressives comme sur certains soli, et Jan se fera métronome des familles derrière son imposante batterie. Classique mais efficace, du Amorphis pur jus servi ce soir par un son des plus corrects.
On peut toujours craindre un effet de redite lors d'un show des finlandais, et après un Hellfest un peu en demi-teinte c'est un sextuor redynamisé que nous avons pu retrouver ce mercredi 20 novembre à Paris. Tant mieux, cela prouve qu'Amorphis a encore beaucoup à dire et à offrir, prêt à affronter une éventuelle routine et ne pas la laisser s'installer dans un confort relatif. Ce soir, le cercle a été complété de la plus belle des manières, en attendant la prochaine !
Setlist :
(Intro Circle)
- Shades of Gray
- Narrow Path
- Sampo
- Silver Bride
- Against Widows
- The Wanderer
- My Kantele
(Thousand Lakes)
- Into Hiding
- Nightbird's Song
- The Smoke
- You I Need
- Hopeless Days
- Leaves Scar
- Sky Is Mine
- Black Winter Day
- House of Sleep
Photos : Arnaud Dionisio / © 2013 Deviantart
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