Les floridiens de A Day to remember ne sont pas encore très connus chez nous, ce qui peut s'expliquer notamment par le fait que les premiers albums du groupe étaient tout à fait typiques d'un son post-hardcore bien ricain : bien exécuté, énergique et mélodique (les zicos étant également de grands amateurs de mélodies punk à roulettes), mais qui utilise des ficelles grosses comme des camions. Citons rapidement les refrains systématiquement chantés en choeur, ces refrains qui déboulent sans avoir aucun rapport avec les couplets (mais l'important c'est que ça accroche hein ?), bref de la musique pop-corn pas dégueulasse mais sans grand intérêt. Les ricains adorent, les européens attendent de voir si ça va progresser. Or, A Day to remember a sorti en 2010 un album qui passait clairement à la vitesse supérieure, What separates me from you. Et le petit dernier, Common Courtesy, qui sort un peu à la bourre du fait d'un procès qui a opposé les musiciens à leur maison de disques, enfonce le clou et débarque avec de bonnes cartes en main pour s'imposer un peu partout.
Première étape, conserver ses points forts. Le groupe a toujours sa formule gagnante pour composer des titres pêchus et super mélodiques. A ce niveau-là, pas de soucis, il y a moyen de ratisser large avec une nouvelle ribambelle de chansons aussi énergiques qu'addictives. Mais là où il y a clairement du mieux, et là où ce Common Courtesy s'inscrit dans la droite lignée de son prédécesseur, c'est que le combo a appris à mettre un peu d'eau dans son vin, à faire en sorte que les refrains soient toujours aussi percutants mais cette fois-ci bien enchaînés avec le reste, à diversifier un peu ses mélodies pour éviter de lasser l'auditeur... Les garçons ont même eu le chic d'améliorer les breaks ultra bourrins utilisés de ci de là, qui peuvent ajouter de nouvelles couleurs ("Sometimes you're the Hammer, sometimes you're the nail", "Dead and buried"), même si l'enchaînement de passages ultra lourds avec des moments limite émo sont parfois un peu étranges.
Le chant agressif n'est pas pleinement convaincant. En même temps, ce n'est pas le plus utilisé, alors ne nous plaignons pas trop. Non, ce qui marche vraiment moins bien, ce sont des titres comme "violence (enough is enough)", qui se plante dans les grandes largeurs avec des couplets purement métalcore et un refrain qui reprend les mauvaises habitudes du groupe en arrivant comme un étron sur la soupe en jouant la carte de l'émocore de bas étage. Peut-être ce genre de morceaux est-il un passage obligé pour tout musicien ricain désireux de toucher le public adolescent aujourd'hui, toujours est-il que c'est pas très agréable à l'écoute. "Life lessons the hard way" a au moins le mérite d'éviter le refrain cliché et de balancer la purée franchement pendant 2 minutes pas plus. Quitte à se défouler un bon coup, c'est bien plus honnête une fois débarassé de son refrain gerbique.
Parce qu'à peu de choses près, le combo a tout ce qu'il faut ou presque pour s'imposer comme le Biffy Clyro du hardcore mélodique : des compos hyper accrocheuses qui parviennent à mixer pas mal d'influences différentes, des titres super accessibles mais puissants et capables de refiler la pêche à n'importe qui. Reste ces tendances émocore dont on se serait bien passés qui parasitent l'album ici et là et l'empêchent de toucher les sommets. Rien qui devrait déranger le public du groupe, mais ces petites fautes de goût devraient s'avérer plus difficilement pardonnables pour qui a dépassé la puberté. Cela n'enlève rien à la qualité globale de ce Common Courtesy qui prouve que A Day to remember est sur une très bonne dynamique et devrait, s'il fait l'effort de venir tourner de par chez nous, voir sa côte de popularité grimper en flèche, ce qui ne serait pas volé.