L'album fit un énorme carton, sans doute trop gros pour nos amis musiciens qui avouent aujourd'hui avoir mal géré la pression que Geffen, leur label de l'époque, leur mettait sur le dos. Plusieurs changements de line-up plus tard, et des albums pas inintéressants mais inégaux, le line-up originel s'est reformé en 2006 pour célébrer le 25e anniversaire des débuts discographiques du groupe. Tout ça c'est très bien, on peut les voir sur scène (au Casino de Paris le 30 avril par exemple), restait bien évidemment à écouter l'album. Album qui, alors qu'on n'y croyait pas plus que ça, prouve le bien-fondé de cette reformation et la sincérité des musiciens concernés, visiblement ravis de se retrouver ensemble et de pouvoir poursuivre ce que les millions d'albums vendus avaient en partie tué dans l'oeuf.
Sur cet OMEGA, la recette est la même, du rock anglais (impossible de se tromper) joué avec des arrangements monstrueux, des mélodies imparables, et la quasi-totalité des titres présents sur cette galette sont des tubes en puissance. Dès "finger on the trigger", le ton est donné : nos papys s'en donnent à coeur joie, la patate est là, le chant de John Wetton, plein d'emphase, n'a rien perdu de sa superbe, et ses petits camarades ont l'air ravi d'être là. Bien sûr, ce type de mélodies sonne un peu daté ; la production est heureusement bien moderne. Il faut dire qu'il serait étonnant que des brutes pareilles ne s'intéressent pas aux nouveaux joujous à leur disposition. Outre les titres plus "rentre-dedans" (holy war déborde d'un tel enthousiasme qu'il nous fait sérieusement douter de l'âge des participants), les mid-tempos sont particulièrement réussis ("through my veins", "emily") grâce notamment à des choeurs de toute beauté. Si les voix et les mélodies vocales ont toujours eu une grande importance chez ASIA, elles ont pu être mal utilisées au cours d'une carrière en dents de scie. Rien de tout cela ici, tout tombe juste, la sophistication est on ne peut plus naturelle et ne vient jamais alourdir les compositions.
Asia n'est plus le groupe "hype", en avance sur son temps, qui propose une musique innovante et parvient à renouveler le rock progressif en parvenant à réconcilier grand public et rock progressif. Le progressif a aujourd'hui de multiples facettes et s'est largement renouvelé dans les années 90 puis 2000. Il serait pourtant dommage de voir cette reformation comme un vestige du passé. Le groupe n'espère sûrement pas vendre des millions d'albums, simplement reprendre leur histoire commune en main, arrêtée prématurément. Suffit d'écouter le superbe titre "I'm still the same" pour s'en convaincre, coïncidence ou clin d'oeil ? Les 4 monstres sacrés du prog ont retrouvé ce feeling qu'ils avaient entre eux. De là à penser qu'il ne les a jamais quitté... Un retour très réussi, et une belle leçon de... de... de musique, tout simplement.
Ca mérite bien un bon 8/10
