L'aube de la prospérité !
Alors là, voici un groupe que je n'attendais pas. En fait, que je découvre carrément depuis peu, mais quelque chose m'avait déjà attiré sur les extraits de l'EP Sworn to Vengeance paru en 2012 que j'avais écouté par curiosité, d'où mon attirance vers ce nouvel album que j'appréhendais plus comme une "sortie parmi tant d'autres" dans le genre très chargé qu'est le melodic pagan folk metal, à l'image d'un Thyrien paru plus tôt cette année assez sympathique mais sans plus. Là, par contre, Heidra m'a soufflé. Loin de moi l'envie de spoiler ma chronique, mais le sextette danois réalise un tour de force avec ce premier opus intitulé Awaiting Dawn et à venir le 16 juin chez Mighty Music.
Dès le "Prelude" qui porte bien son nom, on sent cette touche scandinave douce avec une intro clavier digne de Ensiferum, rien de bien spécial à dire dessus mais l'ouverture d'un chapitre passionnant car Heidra décide de nous raconter une histoire sur cet opus conceptuel. Alors forcément, c'est épique... black, pagan, aérien... quatre adjectifs qui vont parfaitement à la musique ici jouée, à l'image du morceau éponyme qui entame les débats alliant délicatement riffs tournoyants et arrangements claviers sublimes / sans oublier ce duo de voix criée et définitivement pagan (à rapprocher de pas mal de groupes allemands comme Falkenbach ou Menhir).
En un sens, Heidra va plus loin que ses comparses Ensiferum ou Wintersun, sortant de quelques sentiers battus et mariant de nombreuses influences avec une facilité déconcertante. L'histoire contée permet un beau melting pots d'ambiances, ainsi aucun titre ne ressemble véritablement à un autre, offrant une véritable richesse d'ensemble qui prend une certaine cohérence au fil des écoutes. Attention, la première sera risquée, bien que déjà majestueuse par instants, ce n'est qu'en insistant que la mayonnaise prend vraiment, permettant à ce CD de prendre son envol.
"Betrayal" est par exemple un chef d'oeuvre absolu du folk viking metal, morceau à la hauteur des meilleurs Moonsorrow ou Windir avec une tonalité quasi plus power/sympho par instants et une progression diabolique. Le growl acéré de Morten Bryld est absolument implacable et les strings atmosphériques ou épiques de Danny "Zimmer" Svendsen pleinement majestueux. Je cite ce morceau car il m'a le plus marqué, mais chacun pourrait être mis en avant de façon ponctuelle avec plaisir, citons ainsi "Witch of Prophecy" qui va plus loin dans le pagan quasi germanique (façon Equilibrium) avec une touche de folie bien digérée et des cavalcades très power metal, "The Eyes of Giants" plus speed qu'un Sonata Arctica en son intro mais diablement accrocheur par ses changements de rythme, l'amusant FinnKorpiFest ou TrollKlaani (voire Alestorm si on est bourré) "Wolfborn" ou encore la conclusion "Harbinger of War" au sonorités presque folk médiévales jusqu'à son break soudain quasi Dimmu Borgir et qui a le mérite de ne pas s'éterniser dans dizaines de minutes comme certains l'auraient fait. Preuve que Heidra joue juste et reste au service de sa musique, de son histoire.
Ce qui frappe aussi, c'est cette inspiration mélodique globale associée à des riffs excellents, le tout donc sans jamais sombrer dans le cliché. Le "Wolfborn" cité ci-dessus en est la preuve, car malgré son côté "trollolo" elle reste au final plutôt sérieuse et s'assombrit même par instants. Une véritable force qui montre une maîtrise technique globale impressionnante ainsi qu'un plaisir de jouer ensemble absolument évident, tout ceci rendant curieux la possibilité de les voir un jour en live. Leurs grands frères Ensiferum, Turisas, Wintersun, Finntroll ou Korpiklaani seraient d'ailleurs très inspirés de les amener avec eux sur leur prochaine tournée européenne.
Un véritable voyage de toute beauté ! Un gros coup de coeur de cette première partie d'année 2014, à coup sûr, j'ose donc le 8.5 arrondi à 9 (ce que je m'empêche souvent de faire après un premier opus mais là j'y crois). Voici ce que m'a apporté Heidra avec ce premier disque studio aux défauts minimes. Hormis un chant clair que certains vont juger poussif et quelques plans un peu longuets par instants (mais faut bien habiller le concept), les ingrédients sont là pour faire de ce jeune groupe une des révélations du style, une vraie bouffée d'air frais. Heidra, qui emprunte son nom à une des chansons de feu Windir, fait honneur à ses ainés et saura certainement se trouver une place au panthéon des formations du genre à l'avenir.
La Folle Fougère
Ma note : 8.5/10