Le temps passe, et histoire de digérer le retour du 15 août, voilà le nouveau MAIDEN qui débarque, yahoo ! Fan des anglais depuis mes 10 ans, il s’agit d’un événement à côté duquel je ne peux passer. D’autant que de tous les monstres sacrés des années 80, la vierge de fer est le seul a avoir réalisé un come-back complet. Après une décennie qui aura vu leur popularité s’effriter, Harris et compagnie se sont rabibochés avec leur chanteur historique (et ont récupéré Adrian Smith pour un trio de guitaristes inédit, tout en lançant une vague de reformations en tous genres), mais surtout, ont eu la bonne idée de rester prolifiques niveau sorties d’albums.
On est loin des glam-rockers qui se contentent de tourner en festivals et se gardent bien de prendre le risque d’entacher leur légende avec un album pourri ! Le groupe a d’ailleurs eu raison, puisque « Brave New World » (2000) n’était ni plus ni moins qu’un chef d’œuvre, la meilleure réponse possible de la vieille garde qui prouvait ainsi qu’elle avait encore de beaux jours devant elle. Après un « Dance of Death » inégal (3-4 morceaux de moins et c’était une tuerie) et un très bon « A Matter of Life and Death », plus homogène, IRON MAIDEN poursuit dans la veine plus progressive qu’il a adopté depuis le début des années 2000 avec son dernier né, « The Final Frontier », qui sort aujourd'hui, lundi 16 août 2010, chez EMI.
Le reproche le plus courant que l’on a fait à nos chevelus préférés est de toujours sortir le même album. Paradoxalement, l’autre reproche « le plus fréquent » est de trop changer. On comprend volontiers que dans ces conditions, et au bout de 20 ans de carrière discographique, Steve Harris ait eu envie de laisser libre cours à certaines de ses influences, en particulier GENESIS, RUSH et YES. Fan du prog’ des années 70 qui a bercé sa jeunesse, le bassiste et ses acolytes ont fait grincer les dents de pas mal de fans, qui leur reprochent de ne plus faire de « vrai » metal. N’oublions pas qu’ils ont entre 52 et 56 ans, et que la fougue de la jeunesse les a quittés depuis longtemps. A quoi bon faire semblant d’être ce que l’on n’est plus, alors que d’autres groupes plus récents le font mieux ? MAIDEN n’en a jamais fait qu’à sa tête et n’a pas l’intention de changer à ce stade de sa carrière, alors qu’il n’a jamais été aussi populaire (la vénération réaffirmée des groupes de néo metal et de metalcore n’est sûrement pas étrangère au fait qu’une nouvelle génération se soit intéressée à eux). C'est donc à un album encore plus tourné vers le prog' que ses prédécesseurs que nous avons droit.
« The Final Frontier » contient 10 titres, et est clairement divisé en deux parties : 5 titres « courts », qui tournent autour des 5 minutes, puis 5 « longs », qui tapent plutôt dans les 8-9 minutes. Caresser les fans dans le sens du poil avant de les emmener vers d’autres contrées ? Probable, car bien que les anglais aient déjà pondu de nombreuses pièces épiques, c’est la première fois qu’on en trouve une telle concentration sur un seul et même album. Ce n’est d’ailleurs pas le morceau titre, qui ouvre les hostilités, qui viendra me contredire : « The Final Frontier », qui démarre après une longue intro surprenante et bienvenue, est on ne peut plus classique, mais fait du bien par où il passe. L’apport d’une 3ème guitare est fort appréciable, l’ajout de parties claires, d’harmonies et petits solos enrichissent la trame sonore.
Le single « El Dorado », en téléchargement libre depuis 2 mois, s’avère lui trop répétitif pour pleinement convaincre, même s’il gagne à être écouté dans le contexte de l’album et propose des mélodies plus aventureuses. Fort heureusement, les choses se corsent quelque peu avec « Mother of Mercy », un titre mid-tempo très accrocheur qui présente à nouveau des mélodies inhabituelles pour le groupe, plus mordantes, sombres et épiques, et « Coming Home », power ballade dotée d’un magnifique solo qui nous renvoie vers les classiques des années 80. Musicalement le groupe assure (sans blagues ?) et Bruce Dickison est égal à lui-même, phénoménal depuis qu’il a réintégré les rangs maideniens. La première partie de l’album s’achève sur « The Alchemist », seul titre réellement rapide de l’album, oublié aussi vite qu’il a déboulé. Mais comme vous l’aurez compris, le plat de résistance est bien à chercher parmi les compositions les plus longues qui, de par leur durée, représentent les 2/3 de l’album.
Nul doute que toutes celles et ceux qui ne sont pas réfractaires au son du MAIDEN des années 2000 prendront un plaisir intense à en dénouer toutes les ficelles. Difficile de résister à ces « Starblind », « The Talisman » et « The Man who would be King », durant lesquels on se surprend à voyager le long de belles mélodies, de structures alambiquées juste ce qu’il faut sur lesquelles plane parfois le spectre de RUSH, qui nous donnent à voir la vierge de fer sous un nouveau jour. L’ambiance est globalement plus sombre que sur les précédents essais du groupe, en accord avec les thèmes abordés, la guerre et la condition humaine notamment. Nicko Mc Brain diversifie de plus en plus son jeu, quand Dave Murray et Adrian Smith brillent de mille feux dans des solos de guitare inspirés ("Starblind"et son break de folie). Les musiciens ont effectué un gros travail pour adapter leur son aux ambiances développées. Tout juste peut-on reprocher quelques tics d’écriture un peu agaçants sur « Isle of Avalon ». Malgré un break de toute beauté des développements parfois trop évidents auraient gagné à être écourtés. Bah, l’excellent « When the Wild Wind Blows », composé par Harris seul et qui clôt l’album, devrait faire taire tous les grincheux. 11 minutes au compteur, et impossible de s’ennuyer une seconde. Impossible de décrocher, sans compter que la mélodie principale et les « have you heard » délicatement chantés par Dickinson vous hanteront longtemps après l’écoute.
Décrire plus longuement ces 5 titres serait superflu, il n’y a qu’en se laissant entraîner que l’on pourra prendre leur pleine mesure. Au final, le groupe nous livre un album courageux, continue d’avancer et surprend en livrant ce que personne n’attendait. Le son de MAIDEN s'est assagi, diversifié et enrichi. On regrette juste que nos anglais se sentent obligé de proposer quelques titres plus convenus pour satisfaire certains de ses aficionados (« The Alchemist », inutile, « El Dorado, dispensable »), ou qu’il se laisse parfois aller à quelques artifices par trop convenus (« Isle of Avalon », qui aurait été au niveau des 4 autres longs morceaux avec quelques développements inutiles en moins). L’album perd en équilibre, alors qu’il aurait pu être une totale réussite avec un ou deux titres plus faibles laissés de côté. Fort heureusement, il y a bien assez de moments forts et de surprises pour remporter la mise. « Qui aime bien châtie bien », et puis quoi, on parle de MAIDEN là. On se prend maintenant à rêver que la vierge de fer oublie totalement son cahier des charges pour aller au bout de sa nouvelle approche. Des titres comme "Starblind", "The man who would be King" ou "when the wild wind blows" sont riches de promesses. C'est marrant, ça me rappelle "Dance of Death", qui bien que contenant plusieurs titres dispensables, se concluait sur 3 morceaux différents et très intéressants, annociateurs de bonnes nouvelles puisqu' "A Matter of life and Death", qui avait suivi, avait creusé dans cette voie. Après quelques pas de plus, et maintenant qu'IRON MAIDEN semble avoir résolument franchi un nouveau palier dans son évolution, avouez qu'un nouveau classique après "Brave New World", qui viendrait boucler la boucle de cette seconde jeunesse discographique, ça aurait de la gueule.
Ma note : 7,5/10