Parfois le hasard nous réserve de mauvaises surprises … mais les bonnes ne sont jamais loin ! Et de nombreux nouveaux arrivants sont directement définis dans l'une ou l'autre catégorie après un premier opus. Aperion, jeune formation née en Slovénie et comptant à son actif 8 membres livre enfin une galette de départ : « Act of Hybris » de son doux nom, auto-production pour le combo, date de sortie en Juillet 2010. Et d'emblée, les préjugés fusent, car le genre pratiqué par nos amis de l'Est, c'est le metal symphonique, là où les formations poussent comme des champignons, comportant son lot de bouches-trous, laissant parfois émerger de cet océan de médiocrité quelques perles luisantes. Aperion, bonne surprise et perle du genre, ou groupe à intérêt limité ?
Et lorsque l'album se termine, tant d'impressions nous submergent. Ce qui surprend le plus, c'est la maturité et le talent de composition de ces slovènes. Chaque titre est différent, comportant son flot d'émotions, son ambiance propre et sa signature particulière, sans montrer de failles ni de défaillances. Ce qui fait le charme du combo, c'est la multitude d'instruments utilisés, et surtout la façon dont ils sont judicieusement placés. L'ensemble reste très épuré et jamais les musiciens ne surjouent, n'en font des tonnes et ne tombent dans le pompeux. Ils osent même se livrer à des harmonies d'une beauté magistrale, tel le break aux violons de « Shine », hymne du groupe, au refrain enchanteur et à la partie musicale magnifique. De plus, l'intégration de cette multitude de musicien est toujours réussie, ceux-ci étant très justement exploités.
En fait, tout cela crée une véritable personnalité à Aperion, un charme qui leur est propre, par l'usage d'une flute aux mélodies délicates, un violon envoûtant, un violoncelle instaurant une atmosphère charmante et cerise sur le gâteau, l'emploi d'un didgeridoo, instrument aborigène, intervenant à point nommé, comme sur l'introduction de « Black Flies ». Vous voulez du tube, du morceau mémorisable ? Vous allez être servis ! Entre un « Shine » très mélodique, aux parties symphoniques de qualité et au potentiel tubesque énorme, un « Light » aux plans progs et voyant l'apparition de quelques growls, « Black Flies » et son ambiance spéciale, la très festive « Dajte » et ses violons de foire, et le single « Ü », l'ennui est dissipé avec brio. Cependant, à vouloir être trop symphonique et se concentrer sur sa mélodie, le manque de mordant entache le bilan, quelques morceaux devenant anecdotiques et rébarbatifs. Ainsi, « Maya » se révèle plutôt vide, malgré le superbe duo avec l'invité Nejc Oberckal, de même que « Fairytale Mind », ballade trop classique et franchement dispensable. Dommage que ces morceaux fassent office de remplissage. On pourra également déceler des influences de Nightwish ou encore de Therion, ne nuisant fort heureusement pas à l'identité des slovènes.
Ce qui est étonnant également, c'est la qualité de la production, rivalisant avec les plus grands noms du genre, et faisant d'Aperion un sérieux concurrent à Amberian Dawn ou Imperia à qui récupèrera le trône du metal symphonique depuis le départ de Tarja de la formation finlandaise qui semble chercher un successeur. Guitares en avant mais pas trop, toujours audibles à souhait, parties symphoniques intégrées à merveille, sans prendre trop de place, chant jamais trop imposant, son limpide, le combo des Balkans s'est donné les moyens de réussir, et l'effort paye.
Mention spéciale à la voix délicate et divine de Zala Hodnik. Voilà une chanteuse possédant un timbre fort agréable, une maîtrise de sa voix irréprochable et un coffre du tonnerre. Évoluant avec justesse, sans en faire des tonnes, ni imiter Tarja Turunen malgré la ressemblance par instants des timbres des deux demoiselles, la jeune femme se montre comme une vocaliste au talent redoutable. Pour tout avouer, elle reste par moment l'attrait qui nous permet de ne pas décrocher lorsque la composition se fait plus faiblarde, comme « Fairytale Mind », car ses variations et sa palette ont de quoi en faire rougir de jalousie plus d'une. Et lorsqu'elle s'essaye à des tons plus rock, comme sur « Ü », elle sait user de puissance sans jamais être agressive ou se forcer.
Tubes à foison, personnalité, chant à s'en damner, Aperion se place directement comme l'une des nouvelles sensations du metal. A l'instar des excellents espagnols de Diabulus In Musica ou des français d'Adrana, les slovènes peuvent fièrement tracer leur route sur le sentier de la gloire, c'est ce qu'on leur souhaite. Quelques erreurs seront à corriger, mais leur talent et leur potentiel est si grand qu'on en reste subjugué. Bravo à eux.
Note finale : 8,5/10