Dark Moor ou la formation typique de symphonic power metal proche de conclure une renommée internationale mais dont la confirmation tarde à se faire. Venu d'Espagne, ce groupe nous revient en cette fin d'année avec son 8ème album studio, Ancestral Romance, sorti le 23 novembre dernier chez Scarlet Records. Un brûlot entièrement consacré à des histoires historico-littéraires tournant autour du pays de Cervantés.
Autant le dire d'emblée, cet album marie le chaud et le froid de manière plutôt étrange lors des premières écoutes, désarçonnant le connaisseur le plus pointu du combo ibérique. Et c'est donc pour cela que, même s'il s'avère complexe à appréhender, il ne faut pas pour autant trop vite le sous-estimer et ainsi le jeter aux oubliettes.
Alors certes, nous sommes loin du splendide Tarot, élu par votre serviteur co-album de l'année (avec le Victory Songs de Ensiferum) en 2007. Mais nous n'attendions pas mieux ni même une nouvelle suite, celle-ci s'étant déjà avérée plutôt décevante avec le prometteur mais très vite lassant Autumnal sorti en début d'année 2009.
Du très bon et du dispensable donc sur cet Ancestral Romance. Facile à dire et à digérer une fois le postulat ainsi posé, pourtant il faut savoir s'accrocher et "en vouloir" pour en arriver là. Car cet opus commence de manière quasi-grandiose avec un "Gadir" presque digne de Tarot dans ses envolées épico-mélodique, et ce malgré une introduction synthétique assez surprenante pour du Dark Moor.
Mais la surprise saura venir s'insérer un peu partout sur cet opus où les quelques prises de risque de ne se remarquent qu'après coup, sur des détails, sur des arrangements assez pointus. On ne relèvera cependant pas le single "Love from the Stone" dans cette catégorie, morceau totalement convenu mais qui ne peut s'empêcher d'être accrocheur, notamment au niveau de son refrain que Nightwish n'aurait pas renié (allez donc écouter "FantasMic" et comparez tout cela en visionnant le clip de ce single).
Qui dit surprise et tentative osée dit aussi potentielle faute de goût, le "Just Rock" de cette galette alterne entre incompréhension et effet parodique tant la voix d'Alfred Romero et les arrangements Dark Moor ne se marient pas avec l'âme hard rock d'un morceau tout droit sorti des années 80... Non, ça ne passe pas, même si quelques passages nous rappellent avec plaisir Queen, ceux-ci restent bien trop diffus. Et que dire de l'instrumentale "Ritual Fire Dance" ? Reprise classique du fameux "Danza del Fuego" du compositeur espagnol Manuel de Falla, elle s'avère quelque peu crispante en une structure chaloupée souvent dérangeante. Difficule de savoir ce que les espagnols ont voulu faire avec cette pièce...
On a beau être sur le coup de ces deux interrogations, il se passe quand même quelque chose de très bien sur les morceaux "Mio Cid" ou encore la tentative réussie en espagnol sur "Cancion del Pirata" (tirée d'un poème de José de Espronceda). La première nous offre très certainement le meilleur refrain du CD avec une mélodie inspirée du début à la fin, et la seconde met clairement à l'oeuvre l'ami Romero dans un chant parfaitement maîtrisé, ou la preuve qu'un chanteur peut encore plus s'épanouir dans sa langue maternelle.
Reste ensuite le passable ou le difficile à analyser, du "Alaric de Marnac" au fort potentiel dark mais très vite noyé dans un fourre-tout néo-classique bien moins maîtrisé que par le passé à la semi-ballade "Tilt at Windmills" certes touchante mais se noyant vite dans le cliché. Le "Ah! Wretched Me", aux riffs bien pensés, tombera vite dans l'oubli avec un refrain bien décevant tandis que "A Music in My Soul" se retrouve plutôt mal placée en conclusion, et ce malgré une mélodie diablement catchy mais aux effets de "déjà-entendu" quelque peu gênants...
Au final, l'album est techniquement très bon, dans la performance de ses musiciens, dans sa production mais également dans ses petits effets stylistiques entre romantique et baroque (les effets synthés/samples étant ici visiblement réfléchis à l'extrême si on se donne la peine de bien écouter le fond sonore de chaque morceau). Les compositions, certes inégales, montrent que le groupe a toujours cette même envie et aussi ce désir d'expérimenter quelques nouveaux horizons... Mais encore trop "le cul entre les deux chaises" cependant, donnant un résultat final souvent brouillon malgré le potentiel.
Peut-être que cet Ancestral Romance ouvre une nouvelle ère pour Dark Moor, et si tout va bien il se pourrait qu'il soit le préambule d'une prochaine galette à nouveau proche de la perfection. Nous suivrons cela de près, en tout cas personnellement je veux y croire...
Note : 7/10