Avec un nom pareil, forcément, il faut s'attendre à du lourd. Le projet n'a pas choisi son nom par hasard, puisqu'ils ont décidé de se passer des guitares. Ici, c'est bien la basse qui se taille la part du lion. Grasse, avec une disto bien lourde, le son n'en est pas moins bien différent d'une gratte. Cela dit, le groupe ne se contente pas de faire du boucher charcutier, puisque la voix est au contraire tout à fait suave et légère. Simple, mais il fallait y penser : ce contraste donne un son bien particulier au rock du quatuor bordelais.
Ce premier EP propose un rock sévèrement burné, mais non dénué de petites subtilités. Pour faire très court, l'ambiance est clairement tournée vers le stoner "light" des Queens of the Stone Age. Outre que la voix fait parfois penser à Josh Homme, on retrouve cette envie de mélanger gros riffs fumés et rythmiques un poil robotiques avec des mélodies bien marquées. Pas sûr que les réfractaires absolus au style initié par Kyuss trouvent leur compte, néanmoins le son du groupe a de quoi séduire plus largement.
5 compositions, c'est peu, mais suffisant pour se faire une idée du potentiel de la bête. A l'instar de 9 Million Witches dans un autre genre, il est très appréciable de tomber parfois sur des projets comme celui-ci, qui semblent sortis de nulle part tout en étant de grande qualité. Quoique de nulle part, c'est vite dit. Non pas que j'ai une quelconque idée des antécédents des quatre gaillards, mais ce ne sont pas les premiers venus qui auront la bonne idée d'aller enregistrer avec Fred Duquesne (guitariste de Watcha et de Bukowski depuis 2013), ou d'inviter les Tambours du Bronx à venir foutre le souk sur un de leurs titres. Tout ça pour dire que les zicos ne doivent pas non plus en être à leur coup d'essai, ce qui explique la grande qualité des titres présentés.
Gros riffs groovy, rythmiques de plomb (forcément), refrains bien amenés, et un bon boulot sur la production : il n'en faut pas plus pour s'imposer comme une découverte de tout premier ordre. Un peu plus en fait. Parce que si Du plomb maîtrise l'art du rock'n roll ("The Law", pas le titre le plus original, mais tellement efficace), il cultive ses petites touches persos, comme sur l'ambiance un poil dandy de "Keep on", et surtout un côté obscur toujours prêt à sortir. Ce qui rejoint le petit côté politique mis en avant avec des extraits de discours de l'économiste et sociologue Frédéric Lordon, qui introduit "This is my eye" et son refrain à couper au couteau (et un break du feu de dieu), et du militant de l'éducation Franck Lepage avant "Let it Burn", sur laquelle les Tambours du Bronx font merveille. Comme quoi, si Du Plomb apprécie faire la fête, il reste conscient du monde qui l'entoure, et c'est tant mieux.
Du Plomb a donc labonne idée de naviguer entre groove rock'n roll et ambiances plus lourdes, avec un gros son bien à lui. Une très bonne pioche, car les 5 titres ont une fâcheuse tendance à se faire addictifs au fil des écoutes. On attendra un contact plus long avec la musique du quatuor, mais pour un premier enregistrement, c'est du tout bon.