Groupe a l'existence relativement courte dans les années 80, mais mythique pilier fondateur de la New Wave Of British Heavy Metal. Albums peu nombreux mais influence indéniable sur des genres ultérieurs comme le thrash metal et le speed metal. Un statut culte depuis plus de vingt ans, et un tout premier concert tardif sur les terres gauloises à l'occasion du Hellfest 2014. Satan est un groupe qui n'est pas à un paradoxe près. Ce second album post-reformation, intitulé Atom By Atom, en est-il un de plus ? La réponse en détails.
Pas de paradoxe au tournant du premier titre, "Farewell Evolution" : pas de révolution dans le son des Britanniques, on reconnaît immédiatement la patte du groupe, et les éléments qui ont fait son succès. Ca joue très vite, le rendu est brut de décoffrage, comme pour mieux capturer l'énergie déployée par le combo. Très rapidement, l'influence déjà mentionnée sur les groupes de thrash saute aux yeux, si bien qu'on se demande si Satan ne pompe pas sur le Among The Living d'Anthrax, alors qu'historiquement c'est bien l'inverse !
Selon les attentes de chacun, les avis seront disparates concernant Atom By Atom : Satan fait du Satan, ne se ré-invente que très peu, mais délivre une prestation solide et dense en contenu. L'éternel débat qui jaillit à chaque sortie d'AC/DC par exemple, prend ici un tout autre sens, beaucoup plus nuancé. Ainsi, le fans de Satan apprécieront très probablement l'authenticité et les sonorités d'Atom By Atom, tandis que les détracteurs ne seront pas plus séduits par la musique des Anglais que lors de la sortie de l'excellent Life Sentence.
Tout au long de l'album, la batterie de Sean Taylor marque la mesure avec une énergie débridée, et grâce à d'imperceptibles imprécisions de mise en place, semble pleine de vie, apportant ainsi un aspect live à l'enregistrement. De même, les guitares son débridées et crachent leurs notes à une vitesse hallucinante : l'effet est d'autant plus marquant lorsqu'elles jouent de façon harmonisée, avec une synchronisation déconcertante. Là encore, le jeu est précis mais tire son énergie de tous les petits bruits parasites et notes frisées qui sont témoin de l'authenticité de ce qu'on entend. La basse de Graeme English suit quant à elle le même précepte, avec un son brut et sans fioritures, qui va à l'essentiel et joue de sa sonorité claquante et sourde.
Brian Ross au micro est égal à lui-même, et est à l'image de ce qu'on a pu dire de ses comparses. Il est techniquement rodé et sait monter dans les aigus quand il le faut - comme en atteste le premier cri de l'album, sur un étrange son électro - tout en conservant ces quelques petits défauts qui font tout le charme de son interprétation. Une note poussive par ci, une voix légèrement chevrotante par là, et l'effet live et sans artifice fait le reste.
Au niveau des compositions, on regrette dans un premier temps que la première moitié de l'album ne voit se dégager aucun morceau du lot, jusqu'au titre éponyme "Atom By Atom". Non pas que "Fallen Saviour" ou encore "Ruination" soient mauvais, mais on en sort convaincus d'avoir écouté du pur Satan, sans arriver à trouver ce qui les différencie vraiment de l'œuvre passée du groupe. Le morceau qui donne son titre a l'album vient en revanche, comme on l'a dit, apporter ce qui manquait jusque là : un riff accrocheur qui fait mouche, très facilement identifiable, et des progressions aussi intéressantes que percutantes.
Malheureusement, après ce décollage tardif, on fait un court palier le temps que s'écoule un "In Contempt" sans réel intérêt, mais toujours pas foncièrement mauvais. L'ascension reprend ensuite avec "My Own God", qui s'installe dans la tête de l'auditeur pour y rester. Le rythme syncopé sort des sentiers habituellement battus par le groupe, et le refrain est accrocheur au possible. Un excellent titre qui justifierait presque à lui seul la pertinence de l'album. La thématique de la liberté de chacun, assez revendicative, ne fait que renforcer le titre, et l'image d'un groupe qui a pourtant passé l'âge de jouer les rebelles.
Les textes justement, explorent plusieurs directions, avec des réflexions sur le libre arbitre ou encore la destruction, et même des thématiques mystiques sur "Ahriman", dont le titre n'est autre que le patronyme de l'alter ego perse du Satan chrétien.
Les mythes grecs sont également à l'honneur sur "The Fall Of Persephone", beaucoup plus théâtral que le reste de l'album : on note en particulier des chœurs puissants et fournis très cérémonieux, qui apportent momentanément une dimension majestueuse qu'on ne soupçonnait pas chez Satan.
L'écoute s'achève sur un sentiment mitigé, qui oscille entre satisfaction d'entendre un groupe faire ce qu'il fait de mieux même après toutes ces années, et expectative vis-à-vis d'un manque d'homogénéité dans l'efficacité de morceaux pas toujours novateurs.
Bien heureusement pour les pistes légèrement en deçà des titres phares de ce Atom By Atom, Satan est un groupe de scène, et on attend de pied ferme la transformation de l'essai en live.