Les légendes ne meurent jamais !
Immortel... Immortel... Non, rassurez-vous, je ne fredonne pas une chanson de Lara Fabian (mais quelle idée voyons), je ne fais ici que nommer le nouvel album d'un groupe français légendaire : ADX. 3 ans après son très réussi Division Blindée, 1 an après avoir réédité La Terreur (sous le nom de Terreurs), 26 ans après le mythique Exécution, presque 30 ans après sa formation en 1982, le combo heavy nous revient donc avec son 7ème album studio (prévu le 17 octobre chez XIII Bis Records). Une fois ces repères historiques posés (avouez que je vous ai gâtés), attaquons sans plus attendre le vif du sujet.
En une intro symphonique soft (le clavier quelque peu "synthétique" ne dérangeant pas plus que cela même si certains trouverons l'effet un peu cheap) plutôt sombre et mystique, le quintet parisien pose ses bases avant de démarrer tambour battant par un titre éponyme mêlant allègrement old school et touches modernes. Tiens donc, le mix sur la guitare, la batterie et le chant restent ici bien "à l'ancienne", mais la force qui se dégage de cette première piste chantée relève d'une production solide et actuelle. Attention, voici un morceau surprenant en substance, faussement accrocheur et qui ne se laisse pas apprivoisé dès la première écoute. Pourtant, plus on avance et plus les choses se clarifient.
Est-ce une impression ? ADX semble ici prendre l'auditeur à contre-pied, proposant au départ un bon nombre de pièces assez sombres et complexes avant de peu à peu délayer son jeu et ainsi rentrer dans une approche plus hymnesque. Il est vrai qu'un titre comme "Pachydermus" (aussi lourd qu'un éléphant de metal) résume bien cette pensée, faisant directemnt suite au "Immortel" de départ et pointant ses défenses en avant en criant gare : ADX n'est pas là pour amuser la galerie. Ce n'est finalement qu'à partir du "Larmes du diable" que les choses s'éclaircissent et ce malgré de superbes moments de bravoure comme "Messe Rouge" (et son feeling diablement groovy) ou "L'adieu aux armes" quasi mélancolique dans son outro-solo martial. Le groupe prouve simplement ici qu'il ne sait pas uniquement faire dans le "speed épique mélodique", même si le rythme général reste globalement dopé à cette vitesse qui a toujours fait la caractéristique du groupe. Il sait durcir le ton sans concession, culminant ainsi à un "Baptême du sang" particulièrement destructeur.
A la suite du morceau dit "rupture" où "Les larmes du diable" coulent tout en subtilité sur un refrain bien accrocheur, "Le Carnaval des Lâches" agit comme une tornade mélodique et bestiale, tout en torpeur contrôlée et en breaks implacables. Osons dire qu'il s'agit là du meilleur titre composé par ADX, enfin l'un des meilleurs aux côtés des "Lycanthropie", "Livide" (tout deux sur Divsion Blindée) ou presque tout ce qu'on peut trouver sur l'album Exécution. Cet air subtil et acide (avec une mélodie à la Bad-In, hommage à ce groupe qui a splitté trop tôt) se voit d'ailleurs répété et décuplé sur le "Delirium" qui suit, dark à l'absolu et entraînant dans une certaine folie par son piano introduisant le solo le plus déjanté de la galette. ADX s'amuse du début à la fin et nous mène volontairement là où il le souhaite, là où "L'ombre du chasseur" vient "Se perdre" dans "Le dernier geste" d'une fin de CD dévorée au-delà de toute faim.
Ce n'est que l'album avalé dans sa totalité que l'envie nous prend de revenir au début, car la première impression peut être trompeuse et on se rend vite compte que chaque piste s'avère travaillée à l'extrême, autant dans l'écriture que dans la technique des divers instruments. La basse joue un rôle primordial sur chaque morceau et permet une touche supplémentaire qui différencie pas mal ADX de ses congénaires. Et que dire du chant très caractéristique de Phil Grelaud ou des envolées guitaristiques de Pascal Betov ? Autant de signatures qui ont fait la légende et qui semblent ici sublimées par un son massif comme le groupe n'avait peut-être jamais eu. Un peu comme si Divisin Blindée en était le brouillon (bien que déjà au niveau composition le contrat était largement rempli voire même encore plus fédérateur, avouons-le, mais cette nouvelle offrande semble avoir un but tout autre). La hargne d'un combo qui en veut encore ainsi immortalisée ?
D'ailleurs, le disque se conclut par une outro acoustique nommée "Vehuiah", qui dans la Kabbale serait l'ange de la réussite, de la nouveauté et de l'innovation. Est-ce un signe ? Réussite ? Très certainement. Nouveauté ? Forcément. Innovation ? En un sens oui, de tels albums heavy aussi racés devenant rares de nos jours. Une chose est sûre : ADX parvient une nouvelle fois à mettre tout le monde d'accord, entre professionnalisme et expérience, énergie et envie de délivrer un meilleur son possible ; au détour de compositions toujours aussi puissantes et efficaces. Restant ainsi l'un des meilleurs (si ce n'est le meilleur) groupes du genre dans l'hexagone, aux côtés des revenants Vulcain et au souvenir des défunts Sortilège. Et si ce Immortel n'obtient pas un succès proche de celui de Division Blindée, c'est que je ne comprendrai décidément plus rien au public d'aujourd'hui... Par contre, un conseil, pour ceux qui s'attendent à autre chose que du heavy/speed puissant et bien direct : ne rêvez pas non plus, ce n'est ni du Dream Theater ni du metal extrême. Non, je dis ça au cas où (sait-on jamais), ne parlant même pas de ceux qui préfèreront brandir leur Division Blindée en disant "ils ne feront jamais mieux de toute façon". Le contrat est ici tout aussi bien rempli dans un contexte quelque peu différent, on n'en demandait pas moins.
Note : 8.5/10