Voodoo est né de la rencontre entre les têtes pensantes du groupe Artmaniac, le chanteur Niko et le guitariste Jean’s Cotton, et une nouvelle session rythmique, composée de Pascal à la basse et Mister D à la batterie, musicien ayant déjà longuement roulé sa bosse. Ce nouveau projet se veut moins foncièrement rock que le précédent, l’ambition de ces jeunes gens étant de pratiquer un style plus ouvert. L’ouverture sur un « Orange Sky » aérien, tout en délicatesse, avec un petit piano fort sympathique accompagné de quelques notes de guitare lead façon Clapton/Santana, sur une rythmique dépouillée, a l’avantage de cueillir l’auditeur de façon agréable et chaleureuse tout en faisant comprendre qu’il ne va pas falloir s’attendre à un truc qui sent la bière sous les bras, à part quelques incursions plus énergiques comme le single « Lead the Way ».
Impression confirmée par « Love Restrained » et sa guitare acoustique bien sentie, qui de par les multiples terrains qu’il aborde, se rapproche de la World Music (pour peu que cette appellation signifie encore quelque chose). Si la rythmique toute en délicatesse est encore une fois inspirée, on n’en dira pas autant des arrangements un peu légers sur les couplets. Bien écrit, chaleureux et chatoyant, il manque toutefois un peu de travail supplémentaire sur les détails pour passer au niveau supérieur. C’est là tout l’Art du pop/rock, dont les mélodies volontairement subtiles, légères ou un peu bateau (rayez la mention inutile) peuvent quand l’objectif est atteint être sublimées par les arrangements adéquats. C’est alors qu’une mélodie qui aurait pu s’avérer tout juste sympathique devient lumineuse, imparable tellement elle est évidente et limpide. Ce travail d’orfèvre est l’apanage des grands, et si Voodoo en a les intentions, les moyens ne sont pas encore pleinement maîtrisés.
« Lifethings » est à ce titre un intéressant cas d’école : ballade au refrain très bien trouvé, sur lequel le chouette brin de voix de Niko est mis en valeur, chanson malheureusement desservie par des arrangements guitare trop légers. De même que si on apprécie l’harmonica sur le break, celui-ci reste trop timide pour pleinement convaincre. Rien de catastrophique, l’ensemble n’est pas désagréable, mais manque d’un supplément d'âme pour s’élever vers l’excellence.
Sans compter que l’on sent parfois un peu trop les influences Led Zeppelin ressurgir ici et là. Niko et Jean’s Cotton ne s’en cachent pas, le monstre sacré est une de leurs plus grandes influences. Remarquez qu’il y a pire comme référence. Ce qui est plus agaçant (toutes proportions gardées), c’est quand des titres comme « what’s the glory in that » ou « waiting room » prennent des allures de resucées de Lez Zep et/ou de Jimmy Hendrix. On peut y voir un hommage, il est possible que certaines personnes ne seront pas dérangées outre mesure par ces références un peu trop flagrantes, pourtant il est difficile de ne pas tiquer sur ce riff qu’on a déjà entendu et réentendu dans diverses versions. L’originalité à tout prix n’est pas forcément la meilleure option, mais tout de même !
Malgré des atouts bien exploités, notamment une session rythmique efficace et inspirée, des ouvertures bienvenues vers d’autres territoires musicaux, la sauce ne prend jamais tout à fait, la faute à des arrangements encore timorés et un certain manque de caractère ou, pour résumer crûment, un certain manque de couilles. Dommage, car placer un harmonica , du piano ou des percus ici et là enrichit indéniablement les mélodies par ailleurs fort agréables du crew, mais ces bonnes idées ne sont jamais pleinement exploitées. En résulte un album sympa, témoin d’un répertoire qui devrait fonctionner sans problèmes dans l’ambiance feutrée d’un café-concert (les Voodoo sont des bosseurs qui enquillent les dates), mais qui, au sein de l’espace bondé et hyper concurrentiel qu’est le pop/rock, peine à déployer ses ailes et à pleinement convaincre.
Une note ? 6/10 pour les plus exigeants, 7/10 pour les plus cléments.