Après avoir fait partie des révélations marquantes du dernier Hellfest, les Suédois de Tribulation étaient de passage à Paris, en tête d'affiche pour la première fois, dans un Glazart bien plus bondé que d'ordinaire. Le succès de Children of the night, leur troisième opus, a certainement été l’élément déclencheur d'un concert où se mêlent curieux et fans. Pour accompagner les Suédois, deux formations ont la tâche d'ouvrir la soirée, les ex-Beastmilk de Grave pleasures, ainsi que Vampire.
Vampire
Premier constat à l’entrée dans la salle, le public semble s’être déplacé en nombre, bien que la soirée n'affiche pas encore complet. Cela fait plaisir de voir que les amateurs de death ont répondu présents. Lorsque les Suédois de Vampire démarrent leur set, la comparaison avec le thrash/death des premiers opus de Sepultura saute aux oreilles. On peut également déceler des intonations proches du David Vincent des débuts de Morbid Angel dans la voix du vocaliste, Hand of Doom.
Le style pratiqué par le combo ainsi que l’imagerie scénique sont totalement en adéquation avec la tête d’affiche de la soirée (reprise de thèmes horrifiques avec en toile de fond les vampires et autres créatures fantastiques), sans empêcher Vampire de développer son univers propre. Dans la salle le public écoute religieusement le groupe alors que quelques moshs timides font leur apparition sur la fin du set. Vampire dévoile un set solide, bien que court, puisqu'une petite demi-heure leur est allouée. Malgré le jeune âge des musiciens, l'esprit du death du début des années 90 est bien là et les compositions font office d’hommage respectueux sans tomber dans le plagiat.
On pourrait néanmoins regretter un jeu statique de la part des musiciens puisqu'hormis le bassiste, les autres membres n'osent aller à la rencontre du public. Vampire a toutefois fait office de bonne surprise et semble avoir séduit une bonne partie de l'auditoire qui se fait toujours plus fourni au fur et à mesure que la soirée avance.
Grave Pleasures
La présence de Grave Pleasure à l'affiche de cette tournée est un choix étonnant de par l’éloignement stylistique entre le death des autres formations et le rock indé à tendance new wave des ex-Beastmilk. Si une partie du public semble s’être déplacée pour Grave Pleasures, l'autre se réfugie au bar pour écouter d’une seule oreille la musique proposée par le combo.
Les musiciens entrent en scène dans des volutes de fumée et ce sont donc des silhouettes qui démarrent un set au son d'une batterie très binaire. Si l'attitude de dandy torturé du chanteur peut interpeller au début, elle devient rapidement pénible à supporter tant le chant plaintif ne colle pas avec une musique trop basique. Néanmoins, Grave Pleasures se produit devant une partie de sa fan-base qui par conséquent semble bien apprécier la prestation. Les premiers rangs sont immergés dans la musique du groupe (certains tenteront également quelques slams maladroits qui termineront le plus souvent au sol), tandis que le reste de la salle de désintéresse rapidement de la scène. Il est également dommage que Linnea Olsson, la seconde guitariste, soit totalement inaudible et que les membres soient peu communicatifs avec le public, à l’exception du chanteur, Mat McNerney.
La prestation de Grave Pleasure a divisé le public, les fans appréciant un set que d'autres ont jugé interminable. Incompréhension du public ou simple erreur de casting ? Toujours est-il que les détracteurs de Grave Pleasures réinvestissent les premiers rangs une fois le concert des Finlandais terminé, pour être au plus prêt de la scène pour la tête d'affiche.
Tribulation
Après un premier opus au succès totalement confidentiel et deux albums qui ont permis aux Suédois de trouver leurs repères sur la scène death metal, il était enfin temps de pouvoir admirer Tribulation sur une scène parisienne en tant que tête d’affiche.
Tout comme lors de chacune de leurs prestations, les Suédois ont pris soin d'allumer des bâtons d’encens qui plongent rapidement la salle dans l'ambiance mystique et occulte propre au groupe. Dès l’entrée sur scène des musiciens, tous les regards se tournent vers Jonathan Hultén et Adam Zaars, les deux guitaristes, dont le maquillage renforce l'image vampirique du quatuor.
À peine le premier titre entamé (« Vagina Dentata »), les musiciens semblent littéralement en transe, notamment Jonathan Hultén aux yeux révulsés tout au long de sa prestation et dont le maquillage coule déjà sous l’effet de la chaleur. Avec "Melancholia", le second titre, Johanness Andersson (chant, basse) délivre également une prestation habitée avec un chant des plus convainquant, bien valorisé par des conditions sonores excellentes.
La setlist fait la part belle au dernier opus des Suédois, mais quelques surprises viennent se glisser dans le set, avec « Beyond The Horror », extrait de The Horror, le premier album du groupe. Ce titre permet de voir à quel point l’évolution stylistique de Tribulation a été importante puisqu’à leurs débuts le combo pratiquait un death plus violent où les blast beat étaient légion. D'ailleurs, le public ne s'y trompe pas et lance de nombreux pogos et slams dans une ambiance bon enfant.
Les musiciens ne sont pas déconcertés par un tel accueil et ne délaissent pas l’élément théâtral qui fait partie de leur personnalité. Les poses des musiciens donnent une impression presque surréaliste et rappellent bien plus un film de vampire des années 30 qu'un concert de death metal. Véritable OVNI sur la scène métal actuelle, Tribulation va nous prouver son originalité et sa maîtrise de l'exercice du live pendant une heure de jeu qui semblera passer bien trop rapidement. Les influences 70’s du groupe, allié à des instruments rarement utilisés dans le metal extrême (la Gibson hollow body d'Hultén et la Les Paul d'Adam Zaars) finissent de convaincre l’audience.
La fin du set se fait sentir lorsque Andersson entame « Strange Gateways Beckon », l'un des meilleurs titres de Children of the Night. On pourrait simplement regretter que toutes les parties d'orgue hammond soient samplées alors qu’elles participent à envoûter l’audience en introduction des titres.
Au bout d'une heure, c’est le moment du rappel, au cours duquel Tribulation va interpréter « When the Sky is Black with Devils » issu de The Formulas of Death. Ce titre est un excellent choix pour conclure ce concert puisqu'il concentre tous les éléments qui caractérisent la musique de Tribulation, en ajoutant une touche épique.
Le concert donné par les Suédois a conforté les espoirs placés en eux par la réalisation coup sur coup de deux excellents albums. Dommage que le temps de jeu ait été si court et que Grave Pleasures n'ait eu que trop peu de points communs avec les deux autres formations de la soirée. Le public ressort néanmoins comblé par une excellente prestation de la part de Tribulation que l'on a hâte de revoir prochainement.
Setlist Tribulation
Vagina Dentata
Melancholia
In the Dreams of the Dead
Beyond the Horror
The Vampyre
The Motherhood of God
Randa
Winds
Ultra Silvam
Strange Gateways Beckon
When the Sky is Black with Devils
Photographies : © Arnaud Dionisio/Ananta 2016
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe
Merci à Fred et Lorène de Garmonbozia