The Decline!, voilà un nom de groupe en forme de clin d'oeil à NOFX, l'exclamatif en plus. Ce combo rennais, qui officie depuis 2009, présente sa musique comme un mélange de punk rock et de folk acoustique. Plait-il ?
Broken hymns for beating hearts est leur premier album, après un EP en 2010. L'univers graphique de la pochette, réalisée par l'artiste rennais Poch, oscille entre occupation française et banditisme des années de la prohibition, mais comme le confiait avec humour le groupe lors d'une interview sur Radio Campus Rennes, l'objectif était plutôt d'avoir un côté graphique accrocheur qu'un réel message de fond en lien avec la musique présentée. Voyons donc où cette bande de "petits voyous" nous mène...
L'album commence par une belle "Intro" très typée, comme une balade au milieu des canyons. Résistance, prohibition, western ? Punk, folk, country ? Pas le temps de se poser des questions inutiles, une batterie catapultée comme un mustang au galop vient nous embarquer pour un voyage de 40 minutes sans temps morts. Diantre, non seulement le groupe disait vrai sur le mélange des genres, mais en plus il mène rondement son affaire !
Le chant est un point fort évident dès les premières notes, et le grain original de la voix, assorti d'un accent rocailleux surprenant mais tout en saveur, risque même de monopoliser un peu trop l'écoute ; mais il a été intelligemment fusionné au reste, et l'ensemble est bien équilibré. Les choeurs, dans la pure tradition punk mélodique, sont très bien intégrés eux aussi, et dotés d'une couleur qui vaut à elle seule son pesant de boisson maltée ("Always run").
Pour autant, aucun musicien du combo ne boude dans son tipi, chacun vient apporter sa pierre à la construction du saloon (ou du pub irlandais, on se sait plus trop, et on s'en fout tellement c'est bien). La partie rythmique, simple et efficace, assume son soutien sans faillir. La basse hésite parfois à se présenter nettement selon les morceaux, on apprécie d'autant plus ses percées ("Always run", "One of them"). La batterie file droit au but, même si un petit affinage du mixage lui aurait donné un chouïa d'ampleur supplémentaire. Néanmoins, il faut reconnaître que le mix de cet album, très garage rock, convient parfaitement au son du groupe. Les guitares acoustiques pensives ("Intro", "Let's get drunk", "Alone in my grave") alternent sans souci avec les guitares électriques des parties pêchues, et soulignent ce fait indubitable : voilà un groupe qui a trouvé son identité.
Les titres les plus rapides ont l'énergie contagieuse, et sont dotés de petits riffs à bon pouvoir d'imprégnation du cerveau ("A punch in my head", "Always run", pour n'en citer que deux). Lorsque le tempo se fait plus lent, il reste percutant, et l'instrumentation épurée, combinée au chant plus mélancolique, sait alors se faire touchante ("Alone in my grave", "Anchored boat"). Je ne peux m'empêcher de penser à The Pogues, qui savent eux aussi jongler avec la cavalcade rythmique et la mélancolie poétique sans trahir leur présence musicale. Certaines mélodies flirtent d'ailleurs de près avec les sonorités celtiques, et on s'imagine entonner ces Broken hymns et autres chants de marins avec le groupe, jusqu'au bout de la nuit.
Au final, le bon vieux punk mélodique est là ; le groupe ne cache d'ailleurs pas son goût pour Bad religion ou Social distortion. Mais The Decline! s'est aussi créé un son bien à lui, pratiqué avec intelligence, d'autant plus que l'alternance acoustique / électrique a été jaugée avec finesse.
The Decline! a déjà une centaine de concerts à son actif dans plusieurs pays d'Europe. J'aimerais les voir sur scène, car l'ensemble sonne aussi efficace que cohérent. Une vraie présence se dégage déjà de l'album, qui incite à aller partager en live leurs histoires de râlages justifiés sur notre monde moderne ("No price", "One of them"), ou leurs histoires d'amour qui finissent mal :
"I will wake up
Seeing double but there'll be no more two of us" (dans "Let's get drunk")
Le groupe se démarque aussi en mettant en ligne son album en téléchargement payant... et intégralement en écoute libre, accompagné des paroles, sur leur page facebook. Quand on vous dit qu'ils sont là pour partager...
Au final, tout ça est chaud et vivant comme une soirée entre amis au pub. Alors je lève ma chope à la santé de ce groupe qui, comme son nom ne l'indique pas, me semble totalement sur la pente ascendante. Tavernier, une autre !