Tête baissée vers le succès ?
Cela fait un moment qu'on commence à en entendre parler de ce groupe, n'est-ce pas ? Headcharger, combo français originaire de Caen, présent au Hellfest en 2011 et soutenu par le label XIII Bis Records/Warner, un nom qui devient de plus en plus familier. Beaucoup attendaient donc la sortie de leur 3ème album Slow Motion Disease en ce début d'année 2012. Voilà qui est chose faite depuis le 30 janvier. Alors, que nous propose ce jeune combo normand à peine deux ans après sa dernière production ?
A la base annoncé comme du hard rock stoner aux touches metalcore, Headcharger distille ses influences pêle-mêle avec une certaine efficacité et une accroche qui ne cesse de progresser au fil des écoutes. En cela l'exploit n'est pas loin, la touche metalcore/hardcore préalablement établie ne ressortant qu'à de rares moments chantés - et ce assez loin de toute agression qui aurait pu faire fuir les non-initiés au genre. Un cocktail très typé outre-Atlantique s'il en est...
Pourtant Headcharger n'est pas un groupe américain, même si musicalement on se rapproche clairement d'un univers aride et surchauffé - en mode voyage à travers la fameuse Vallée de la Mort aux accents frôlant le blues par moments (l'instru "The Life of a..." annonce la couleur avant un "...Drifter" bien groovy dans son approche). Sur la Route 66 d'un album globalement bien huilé, on se rend cependant vite compte que nous sommes pilotés en mode bien français, l'accent du chanteur Sébastien Pierre reflétant clairement une origine non-anglophone. Assez irritant au départ, ce détail disparait peu à peu et a au moins le mérite d'insérer une petite French Touch pas désagréable ni dénuée d'un certain intérêt. Quant au timbre de notre frontman, il sied parfaitement au genre même s'il pourrait certainement faire l'objet de quelques améliorations techniques même si la gniaque dont il fait preuve efface le moindre doute.
Niveau fluidité globale il n'y a donc rien à redire, le groupe installe la musique qu'il veut jouer en toute tranquillité, laissant aller son inspiration et ses envies à la guise de quelques riffs bien rock stoner. Néanmoins, quelques écueils apparaissent par moments, on sent juste que l'inspiration mélodique de certains morceaux aurait pu être nuancée voire retravaillée en profondeur (le final éponyme, certes mélancolique, en est presque frustrant tellement on sent que le groupe aurait pu aller plus loin). On se retrouve ainsi parfois avec quelques parties interchangeables d'une chanson à l'autre, aspect qui pourrait nuire à la pérennité de ce disque. L'excellence est parfois frôlée, voire atteinte le temps de quelques feelings bien sentis ("Drifter", "Dusty Dreams" ou "Fires of Hell" ont cette base qui on fait les grands morceaux, souvent à mi-chemin entre Alice in Chains et Nashville Pussy - groupe dont ils effectueront la première partie bientôt), mais globalement on sent encore qu'une énorme marge de progression attent notre quintet.
Headcharger joue donc avant-tout sur l'énergie et une facilité déconcertante de composition. Le moment passé est ainsi fort bon, le contrat parfaitement rempli. Un titre comme "All Night Long" (rien à voir avec Lionel Richie, on vous rassure) passe comme une lettre à la poste dans un mode totalement old school et radiophonique. Même constat pour "Spain Summer Sun", plus péchu encore, ou encore ce "XIII/XII" qui donne pêche et sourire en un clin d'oeil un peu à la manière d'un Bukowski (le refrain rappelant très allègrement le combo francilien).
Les progrès sont donc constants, et encore en cours dirons-nous, l'intégration du côté "moderne-core agressif" se faisant plutôt bien mais mériterait peut-être une meilleure approche, une parcimonie plus affirmée. Puisqu'on parlait de Bukowski, on peut justement souhaiter à Headcharger la même route et le même succès naissant. La scène française a besoin de groupes avec autant d'envie, cela tombe donc plutôt bien. Et si tout se confirme, si nos caennais gardent cette énergie et cette capacité mélodique accrue (notamment sur les sympathiques envolées de guitares de Babz qui mériteraient une exploitation encore plus large), rien ne pourra les arrêter eux non plus.