"Bang bang! Who is the bad boy?", on pourrait croire en paraphrasant ici le refrain de "Hero on Video" que Chris Bay est devenu un vilain garçon. Que nenni ! Le chanteur, guitariste (et désormais seul compositeur) de Freedom Call reste cet artiste facétieux qui n'hésite pas à façonner ses hymnes sans peur des "qu'en dira-t-on". Une entrevue avec ce bonhomme reste donc un moment spécial d'humour et de légèreté, bercé par la passion sans faille qui l'anime. Quelques jours avant la sortie de Land of the Crimson Dawn, le musicien allemand se livre ainsi pour vous.
Ju de Melon : Bonjour Chris, j'espère que tout va bien pour toi en ce début d'année...
Chris Bay : Bonsoir Julien, merci à toi ! Tout va bien, on a passé un bon réveillon entre amis avec du champage et du whisky. Maintenant il est temps de se remettre au boulot avec la préparation des prochains concerts et la promo du nouvel album à venir.
Alors sans plus attendre, première grosse question qui nous tarabuste : cet album est le premier avec Klaus Sperling derrière les fûts. Est-ce que ce changement de lineup majeur (Dan Zimmermann était le co-fondateur du groupe) a changé un peu l'approche de Freedom Call ?
Oui, c'était surtout un véritable changement pour moi, j'ai toujours écrit et collaboré avec Dan pour Freedom Call. Il n'était pas seulement le batteur du groupe, on faisait pratiquement tout ensemble. Alors ce nouvel album s'est présenté à moi comme un défi, une première sans lui et donc quelques difficultés potentielles supplémentaires. Le premier pas est toujours le plus dur, du coup la première chanson a été assez difficile à écrire : ses conseils et son apport m'ont beaucoup manqué. Après, dès la deuxième chanson, les choses sont devenues plus simples. Au final j'ai réussi à faire un véritable album de Freedom Call sans Dan, et on reconnait bien l'esprit du groupe. C'était important pour moi d'y arriver, du Freedom Call à 100% ! Klaus Sperling est vraiment un très bon batteur, très différent de Dan et avec sa propre personnalité. Je ne voulais pas d'un clone de Dan, Klaus a pu apporter sa touche et su se fondre parfaitement au line-up. On peut désormais affirmer que Freedom Call est un groupe à part entière, et pas simplement le side-project du batteur de Gamma Ray !
Klaus a-t-il ressenti une certaine pression au moment de remplacer Dan ?
Plus ou moins, mais disons que Klaus était habitué à travailler avec nous. Tout cela a commencé sur quelques dates en 2007 où notre emploi du temps et celui de Gamma Ray se chevauchaient, Dan devait donc être remplacé par Klaus déjà l'époque. Notre première collaboration s'est faite lors d'une date en France avec Nightmare et Kragens d'ailleurs. Klaus n'a eu globalement aucun problème à entrer dans le monde du bonheur tel que Freedom Call le conçoit, c'est lui-même quelqu'un de très enjoué et nous formons avec lui une équipe soudée.
Il a d'ailleurs un autre projet, Nitrogods...
C'est vrai, lui aussi est quelqu'un de très occupé ! (rires)
En parlant du sieur Zimmermann qui a donc désormais décidé de se consacrer à Gamma Ray, gardes-tu quelques relations musicales avec lui et est-ce que tu laisses la porte ouverte à son éventuel retour dans Freedom Call si l'envie lui prend un jour ?
Daniel reste un de mes meilleurs amis, on passe pas mal de temps ensemble dans le privé. Par contre nous ne jouons plus de musique ensemble. Après, je ne dis jamais "non", mais je ne pense pas que son retour puisse être possible avant un certain temps : il veut vraiment se donner à fond avec Gamma Ray et il est aussi dans un autre groupe en même temps. Après voilà, j'ai déjà pris mes marques dans ce Freedom Call sans Dan, avec Klaus, et je pense qu'il sera intéressant de continuer dans cette voie. Aujourd'hui je ne regrette rien.
Recentrons-nous sur l'album en lui-même, on y perçoit plusieurs influences. Tout d'abord le côté happy power qui sied parfaitement à Freedom Call depuis ses débuts. On ressent parfois quelques hommages à Crystal Empire et Eternity, est-ce plus ou moins volontaire ?
Pas vraiment, tu sais on ne calcule jamais au moment de démarrer l'écriture d'un album. C'est quelque chose de très émotionnel que tu ne peux absolument pas contrôler. Tout dépend de l'état d'esprit dans lequel tu te trouves... La musique est le miroir de tes sentiments. Peut-être que je me suis senti nostalgique et qu'ainsi je me suis remémoré l'époque de la tournée Crystal Empire ou Eternity, c'est pour cette raison qu'on retrouve ici quelques chansons qui auraient pu être écrites il y a 10 ans.
Le titre "Back Into the Land of Light" constitue clairement une suite à "Land of Light" présente sur Eternity... une envie soudaine ou elle te trottait dans la tête depuis quelques temps ?
Elle est très liée à ce monde digital qu'est le "Land of the Crimson Dawn", qui est lui même une partie de ce "Land of Light". Mon imagination est ainsi revenue vers ce paradis, cette contrée glorieuse où règne le bonheur suprême. Alors évidemment on peut faire un fort rapprochement avec la chanson "Land of Light" qui figure sur l'album Eternity, c'est vrai.
Si je te disais que "Valley of Kingdom" ferait bon séquel de "Ocean" (sur Crystal Empire) et que "Crimson Dawn" me rappelle l'excellent "Ages of Power" (sur Eternity), tu me tuerais sur place ? (rires)
Ca fait longtemps que je n'ai plus écouté un vieil album de Freedom Call, peut-être que je devrais avant d'écrire un nouvel album (rires) ! Mais bon "Ocean" est une très bonne chanson je pense, alors à la rigueur c'est pas trop grave... quant à "Ages of Power", je vais vérifier ça en la réécoutant après l'interview ! (rires)
Parlons ensuite du côté plus dark/moderne, moins présent que sur Legend of the Shadowking cependant... "Killer Gear", "Terra Liberty", "Eternity" ou "Sun in the Dark" en tête.
Je suis quelqu'un d'assez ouvert d'esprit, et si je sens qu'un passage un peu sombre peut coller à une certaine idée que je me fais de telle ou telle chanson, je n'hésite pas à m'aventurer sur ce chemin. Je ne m'impose aucune limite ! J'adore chanter très aigu, mais ça m'arrive aussi de growler un peu façon death metal, c'est quelque chose de fun à faire ! D'ailleurs les autres membres ont été surpris de me voir enregistrer en mode "voix méchante", ils ne m'ont pas reconnu (rires) ! Tout ça nous a permis de bien nous amuser en studio et ouvre de belle perspectives en live, il y a de quoi préparer une setlist très colorée et variée. Personne ne sera ainsi ennuyé après 20 chansons.
Viens enfin le fun avec "Hero on Video" et "Rockin' Radio". Vous avez dû vous amuser à les écrire et les jouer celles-ci !
Oh que oui, d'ailleurs elles figurent déjà sur la setlist de la prochaine tournée. Des incontournables ! (rires)
Savais-tu que sur La Grosse Radio Radio, nous sommes une vrai rockin' radio ? Merci pour l'hommage ! (rires)
Mais c'est tout à fait ça, elle a été écrite pour vous (rires) ! Sérieusement, c'est vraiment le cas, je voulais ici souligner tout le travail abattu par ces radios indépendantes sur Internet ou locales qui dédient leur antenne à la bonne musique rock et metal. Vous travaillez souvent sans argent, du moins sans les subventions des gros labels, et malgré cela vous portez haut la flamme du rock sur vos ondes ! Du coup j'ai eu envie de faire une chanson en votre honneur, vous le méritez vraiment.
Merci beaucoup ! Sinon quelques chansons comme "Rockstars", "Killer Gear" ou "Space Legends" sont inspirées par le monde des jeux vidéos ou en ligne... Un thème récurrent sur l'album donc, est-ce une manière d'en faire la critique ou juste un ton décalé loin de toute considération sérieuse ?
C'est un peu des deux. Mon but dans la musique c'est de donner aux gens un monde imaginaire à travers une musique sympa et aux tonalités joyeuses. Et je ne suis pas vraiment convaincu que permettre à nos jeunes d'aujourd'hui un accès aussi large aux jeux vidéos soit une bonne façon pour eux de laisser aller leur propre imagination. Ils sont un peu "contrôlés" par ces jeux tels que Warcraft ou je ne sais quoi, et du coup ils oublient de s'inventer leur propre univers personnel. Ils se voient ainsi imposer un monde imaginaire créé par les inventeurs de ces jeux. Ainsi dans Land of Crimson Dawn, l'imganaire que j'ai ouvert peut vous mener dans diverses dimensions, c'est à l'auditeur de choisir... c'est probablement le message le plus important que je veux faire passer ici.
C'est désormais une tradition depuis l'album Dimensions, le disque se conclut sur une "drinkin' and party song". Pas de "Ca plane pour moi" de Plastic Bertrand cette fois, ouf (NDLR : "A Perfect Day" sur Legend of the Shadowking et ses "ouhouhouhouh") ! (rires)
(rires) Oui je me souviens, une chanson que j'écoutais beaucoup dans ma jeunesse, j'adorais sa pêche ! Sinon je pense que "Power & Glory" intègrera la deuxième partie de notre tournée live, je ne veux pas trop mettre de nouvelles chansons dans la setlist car je sais que les gens attendent avant tout des tubes tels que "Warriors", "Land of Light", "The Quest" ou encore "Metal Invasion".
Parlons du chant sur cet album. Evidemment tu es le chanteur principal, et c'est donc toi qui fait les voix dark presque extrêmes présentes sur "Crimson Dawn" ou "Killer Gear" ! Pas trop dur ? (rires)
Ouh là, disons que ce n'était pas si facile que ça (rires) ! Sur l'enregistrement des parties death sur "Crimson Dawn", j'ai pas mal abîmé ma voix et il m'a fallu quelques heures pour récupérer. Après, sur "Rockin' Radio" par exemple, ce n'est pas moi qui fait la voix de l'annonceur mais un présentateur d'une radio locale près de chez moi.
Il y a aussi une expérimentation tribale intéressante sur l'intro de "66 Warriors", un sample ou musicien invité ?
Nous avons un invité ici oui mais également pas mal de chanteurs en guest pour la chorale, quelques gars d'un autre groupe spécialisé dans un chant plus "dur" disons. D'ailleurs comme tu le sais sûrement j'adore le mot "warriors"... alors pourquoi ne pas le répéter 66 fois ? (rires)
66 fois le mot "warriors" répété dans la chanson donc ?
Non, 70 en fait... Je sais, c'est idiot ! (rires)
(Rires) Mais ce n'est pas tout, il faut parler des concerts à venir... Une tournée annoncée mais aucune date en France encore, est-ce provisoire ?
Ca va venir normalement, nous sommes en contact avec quelques tourneurs mais il semble que ce ne soit pas aussi facile qu'auparavant de trouver de bonnes dates en France... le heavy metal ne semble plus si populaire que ça dans votre pays, cela me surprend et je ne comprends pas pourquoi à vrai dire car je sais que les fans sont présents. En attendant nous passerons partout en Europe cette année, et on ne veut pas oublier la France.
Un vidéo clip de prévu pour cet album au fait ?
Oui, justement nous venons tout juste de tourner la chanson "Hero on Video", j'adore vraiment cette chanson. Le tournage a duré un jour, on a enregistré en mode live pour les images, on a aussi engagé quelques acteurs... et tu verras c'est une histoire plutôt amusante. Je préfère garder le secret pour l'instant, elle sera sûrement mise en ligne début février (NDLR : disponible depuis vendredi en fait).
Profitons des quelques derniers instants qu'il nous reste pour parler musique... que retiens-tu de l'année 2011 à ce niveau hormis la préparation du nouveau Freedom Call ?
Pas grand chose, à force de composer et de jouer live je n'ai plus trop le temps d'écouter d'autres albums ou groupes. En fait, avec tout ce travail, t'es heureux de rentrer chez toi et de pouvoir profiter d'un certain silence... Il est vrai que c'est toujours une période où il faut que je réapprenne à écouter de la musique, car c'est pas si évident que ça après des heures et des heures en studio ou sur scène. Il faut que je me trouve quelques musiques relaxantes qui ne demande aucune "analyse" particulière.
As-tu quelques attentes particulières pour cette année 2012 ?
J'ai une envie très forte : faire un album solo, plus orienté rock ou hard rock. Mais j'ai jamais trop le temps de me poser pour le réaliser, toujours quelque chose à faire pour Freedom Call mais aussi profiter un peu de ma vie privé et consacrer du temps à ma petite amie... J'espère cependant arriver à faire quelque chose en 2012, j'ai pas mal de chansons qui sont prêtes en ce sens. Globalement 2012 devrait être une année très riche.
On en parlait avec Hansi Kürsch vu que la France et l'Allemagne sont unis dans la crise, mais que penses-tu de ce qui se passe en ce moment dans le monde au niveau économique ? D'autant plus que ça touche aussi beaucoup les artistes.
Il y a beaucoup de lois de faites... contre les musiciens en fait ! Alors évidemment cela me met en colère. Mais je ne vois que deux solutions concrètes : sois je deviens terroriste et je fais tout péter (rires), soit je sombre dans la dépression. Je pense malheureusement qu'on doit donc "accepter" cette situation, du moins jusqu'aux prochaines élections où je déciderai pour quel parti je voterai, je n'ai aucune envie de violence ou de devenir dépressif. Une troisième voie s'offre ainsi à moi : continuer à faire ma musique et m'y libérer l'esprit.
Merci pour cette entrevue, un dernier mot pour tes fans français qui liront ces quelques lignes ?
Merci à toi et à bientôt j'espère pour des shows endiablés !