Souviens-toi l'été... 2011. L'album Rasta Government de Takana Zion (le 3ème pour lui) venait de sortir, et l'on se disait que l'on détenait alors une nouvelle perle du reggae made in Africa. Depuis, l'artiste guinéen avait sorti plusieurs opus et singles passés un peu plus inaperçus (et avouons le, nettement moins réussis que le fameux Rasta Government).
On attendait donc impatiemment de revoir Takana au meilleur de sa forme... Et bien, je vous annonce une bonne nouvelle : l'album Good Life qui sort le 27 mai 2016 répond amplement à notre souhait.
Si l'on s'attarde sur le contexte autour de la sortie de ce nouvel album, on remarque d'emblée des signes qui ne trompent pas. Un album enregistré au studio Tuff Gong en Jamaïque peut-il être de mauvaise qualité ? Ce n'est en tout cas pas ce Good Life qui viendra ternir la réputation de ce studio qui, est-il besoin de le rappeler, fut crée par Maître Bob.
Des mélodies jouées par Leroy "Horsemouth" Wallace (batterie), Errol "Flabba Holt" Carter (basse), Lloyd "Obeah" Denton (clavier), Rohan "Maka" Kirk Gordon (guitare, directeur artistique) enjolivées par la présence de Dean Fraser (saxophone) et mixées par Sam Clayton Junior peuvent-elles être foncièrement ratées ? Là encore, il faudra se lever de bonne heure pour me le démontrer.
Et pour finir la présentation du projet, c'est le label Soulbeats Records qui sera encore une fois le fournisseur officiel de bonnes vibrations. Soit autant de bonnes raisons nous faisant croire à une belle réussite.
Mais alors, et Takana Zion dans tout ça ? Il ne va pas mal, merci pour lui. Et même plutôt bien à en juger des 13 titres qui composent cet album et qui mettent en lumière son talent. 13 titres sous forme d'hommage aux racines de la musique jamaïcaine et aux inspirations qui vont avec.
Une fois le disque mis en route, on est d'ailleurs rapidement fixé sur les intentions du chanteur. "Africans Unite", comme son nom l'indique, prône l'unification des différents peuples africains pour que, enfin, "things will be fine". Les graines semées par son illustre aîné Tiken Jah Fakoly ont bien poussé, et Takana Zion s'inscrit dans la droite lignée de l'ivoirien. On aime aussi ce morceau pour son rythme reggae-mento que n'aurait pas renié un certain Stanley Beckford.
Il est également question de ska dans "Real Black Man", un des titres phares de l'album. Et si l'on veut aller plus loin dans notre exploration de styles, qu'est-ce qui vous fait envie ? Un petit chant nyabinghi peut-être ? Et bien, soit. "Congo Dreadlocks" rend hommage aux plus célèbres rastamen de l'histoire. L'un d'entre eux, Bunny Wailer, est "the only survivor" selon Takana (après avoir cité dans sa chanson Peter Tosh et Bob Marley, tous membres du trio des Wailers). Une façon de justifier le featuring (le seul de tout l'opus) avec Bunny sur "When Jah Speaks" qui conclue l'album en beauté.
D'autre grands hommes de l'histoire sont mis sur le devant de la scène, des hommes très appréciés en Afrique et qui reviennent tout naturellement dans les propos de nombreux artistes. Il s'agit de Nelson Mandela dans le superbe "Rainbow Generation", et de Marcus Garvey dans "Mosiah Marcus".
Dans un style plus léger, la star guinéenne prend une petite pause sur le touchant "Mariama" dédié à son épouse.
Au milieu de tout cela, on retrouve aussi du reggae beaucoup plus "traditionnel". Rasta convaincu, le domaine de prédilection de Takana Zion reste le roots qui sied si bien à son timbre de voix particulier. Le morceau éponyme de l'album tend néanmoins vers la modernité sur certaines séquences de guitare, mais sieur Dean Fraser domine de son souffle de maître, la mélodie.
On retrouve le saxophoniste en chef d'orchestre sur "Jah Love", dont je vous passe la traduction. Le morceau suivant "Jah Will Be There" insiste sur la foi que porte le Guinéen au mouvement rastafari.
Mais le tube de cet album reste pour moi "Hit My Soul" qui porte lui aussi bien son nom puisque la voix de Takana s'adapte à merveille à la musique afro-américaine. Attention, je vous déconseille fortement de ne pas écouter ce titre, sous peine de passer à côté d'un des tubes de l'été :
Avec Good Life, Takana Zion reste fidèle à ses premières amours et au talent qu'on avait reconnu en lui. Loin de vouloir s'arrêter au roots, et après quelques échecs, il réussit enfin à se (re)diversifier en revenant aux fondamentaux. Pour le plus grand plaisir des amoureux de reggae entier, et de ceux qui auront la chance de le voir en live sur la grande scène du Reggae Sun Ska cet été.
Tracklist :
01 - Africans Unite
02 - Congo Dreadlocks
03 - Good Life
04 - Hit My Soul
05 - Jah Love
06 - Jah Will Be There
07 - Mariama
08 - Protect Myself
09 - Rainbow Generation
10 - Real Black Man
11 - Mosiah Marcus
12 - Make it work
13 - When Jah Speaks Feat Bunny Wailer