Painted Wife, avec son premier album, propose une relecture soignée et moderne du metal alternatif qui a marqué la scène musicale des années 90. le groupe a des influences manifestes mais les a suffisamment digérées pour ne pas sonner comme un clone ou un énième combo post-grunge. En cela Obsessed With The End est une carte de visite plutôt convaincante qui démontre un vrai potentiel qui ne demande qu'à être décliné.
Tout d'abord décernons le prix du nom de groupe le plus original et particulier de l'année : les Femmes Peintes. Il fallait oser. On ne connaît pas l'origine d'un tel patronyme (les musiciens contactés n'ayant pas donné de réponses à mes quelques questions), on sait juste qu'avant de se prénommer ainsi, ce combo, originaire de Midway City (Californie), a émergé sous l'identité Railroad To Alaska il y a quelques années et a obtenu le prix de la meilleure performance Live décernée par le Orange County Music Awards en 2012. Railroad To Alaska est devenu Painted Wives après que le batteur du groupe Derek Eglit ait été victime d'un accident lui fracturant un bras juste avant leur première session d'enregistrement.
D'abord sorti en EP en 2013 Obsessed With The End a été ensuite développé sous forme d'album autoproduit l'année suivante avant d'être remixé et remastérisé par Gene Freeman, plus connu sous le pseudonyme Machine (qui a produit Lamb Of God et Clutch entre autres) . Cet album est d'aileurs disponible sur Century Media Records depuis le 29 avril.
Painted Wives se définit comme étant un groupe de doom metal, et si la musique des Californiens dégage lourdeur et mélancolie, on est cependant plus proche d'un metal alternatif que de la lenteur pluvieuse exprimée par certains dandys tristes. Le nom qui revient le plus souvent à l'écoute de ces douze titres est Alice In Chains, avec une pincée de Mastodon pourrions-nous ajouter.
Les quelques notes de piano que l'on entend sur la courte intro « Perfect Horror » laissent penser que ce qui va suivre va plutôt s'avérer gothique mais dès qu'arrivent le riff costaud (évoquant le Mastodon des derniers albums) et la voix de Justin Suitor, chanteur-guitariste (qui elle renvoie à celle du regretté Layne Staley sur la piste suivante « Hollow Bones »), nous avons l'impression de retrouver cette bonne vielle Alice enchaînée. Nous voici donc plongés dans un grunge metal tirant son son de l'héritage laissé par les géants des années 90.
On ne peut pas reprocher à Painted Wives de ne pas avoir soigné ses compositions car l'ensemble est de bonne qualité et se laisse très bien écouter. Que ce soit le déjà cité « Hollow Bones », « Fable », le single « Dig » (qui a aussi fait l'objet d'un clip intéressant) et la plupart des morceaux, chacun comporte son refrain efficace qui reste en tête et son riff qui fait mouche.
L'ombre « seattlelienne » est présente tout au long de Obsessed With The End mais le groupe californien arrive à ne pas tomber dans une certaine linéarité ou le simple copier/coller et on trouve quelques résidus doom/sludge aussi par moments comme avec « Countless » (mais sur ce titre nous pensons plus à Alice In Chains une fois de plus qu'à Pentagram par exemple cependant) et « Saint » commençant sur un riff très lourd avant de se transformer en mid-tempo stoner.
Dans le genre lourdeur désespérée cependant, « Interstellar Grace » se montre le plus convaincant avec sa montée en crescendo, son ambiance sombre et son refrain poignant. Il y a aussi de la colère « mastodontienne » parfois sur Obsessed With The End avec le plutôt rentre-dedans « My Sisters » par exemple et le hargneux « Congratulations ».
De même, Painted Wives sait surprendre en proposant parfois des arrangements de cordes, comme sur « Fable » et à la fin de «Interstellar Grace », ou un piano discret sur « Icy Blonde ». Niveau surprises nous pouvons aussi citer le tempo punk de « Stay With Me » (et son introductif « One, two, three, four ! » digne des Ramones), ainsi que les quelques secondes de silence en guise de fausse fin de « Saint » suivie d'une pluie de larsens. Il y a aussi l'instrumentale interlude « Kubrick's Tongue » qui rappelle Mastodon (encore) dans ses moments les plus psychédéliques et l'intro un peu planante de la power ballad « Icy Blonde » ainsi que son break thrash bienvenu.
Pareillement, notons que Painted Wives semble avoir le souci de proposer des textes de qualité en faisant appel à un parolier, Ryan Williams, considéré comme un membre à part entière du groupe, qui s'est donc chargé de la thématique générale de Obsessed With The End. Nous pouvons aussi nous attarder sur cette énigmatique pochette (hommage à la nation indienne ?) qui interpelle par son artwork assez psychédélique.
Tout cela ne peut que donner envie de consommer le mariage musical de ces femmes peintes.
Liste des morceaux :
1. « Perfect Horror ».
2. « Hollow Bones »
3. « Fable »
4. « Dig »
5. « Countless »
6. « My Sisters »
7. « Congratulations »
8. « Icy Blonde »
9. « Kubrick's Tongue »
10. « Saint »
11. « Stay With Me »
12. « Interstellar Grace »