Déjà plusieurs années que LaTwal traîne ses machines dans les milieux underground, et balance son électro-dub énervé aux quatre vents.
LaTwal, si tu n'as pas suivi (et c'est pas bien!), c'est Géraldine (chant/guitare) et Jean-Mi (machines), c'est un doux mélange d'influences punk, électro, dub, énergie, combat, poésie, bref un voyage qui vaut le détour. Rappelle-toi, on avait parlé de leur album ici...
De retour d'Allemagne et des Pays Bas, et tout juste remise de l'enregistrement d'un album avec son autre projet, Cartouche, Géraldine nous a accordé un entretien, en toute simplicité, dans une brasserie de la Porte de Montreuil, où il a été question de son, de punk, de musique, et de Jean-Mi, machine-man des Ludwig Von 88 entre autres.
La Grosse Radio
Raconte-nous LaTwal, une vielle histoire?
Géraldine
J'ai commencé la musique avec le punk français. On était dans la campagne d'Agen, on a commencé un groupe, on ne savait pas jouer de la musique. On a fait un groupe punk, on a pris les instruments, 6 mois après on était sur scène. Et le premier concert qu'on a fait, c'est là où j'ai rencontré Jean-Mi pour la première fois. Il était là parce qu'il faisait le son des Washington Dead Cats. Moi j'avais 15 ans, on avait organisé le concert. Il devait y avoir les Bérus, mais ils étaient en grève. Du coup Marsu (manager des Béruriers Noirs, NDLR) nous a proposé Washington Dead Cats et Nuclear Device. Nous, on était un petit collectif punk, hyper motivé, forcément on a pris ! Donc on a répété nos morceaux, on a joué, ça c'est super bien passé avec Nuclear Device, et du coup ils nous ont fait jouer à chaque fois qu'ils venaient dans le coin. Et c'est comme ça qu'on a dû se rencontrer. Mais bon, il ne s'en souvient pas, et moi non plus (rires).
La Grosse Radio
Super longue histoire, dis donc !
Géraldine
Oui, c'est vrai ! Et même avec les Ludwig ! On avait fait leur première partie en 1988 avec Kochise, en Ariège, à Foix, avec des Punks qui avaient un peu destroyé la ville, c'était plutôt rigolo. Donc tu vois, avec Jean-Mi, on se croise depuis longtemps.
Et puis j'avais envie de tester autre chose. Je suis allé le voir, et je lui ai dit, voilà, es-ce que tu as envie d'essayer quelque chose... J'avais déjà fait 5 ou 6 musiques, avec ma guitare. Je lui ai donné, et puis voilà. Puis lui, avec les machines, il fait tout à l'oreille, il cherche ses samples. Chez lui, c'est organisé avec des fiches. Quand il écoute un disque, il prend des notes, là y a un truc à utiliser, une guitare, un morceau de batterie... Même quand il regarde un film, il prend des notes ! A telle minute, il y a un son, il note tout. Jean-Mi, c'est un mec surprenant. Sa vie tourne autour de la musique. Il passe son temps à chercher. Il a 10 000 vyniles dans 25 m²... Des fois on se demande comment tout ne s'est pas effondré chez le voisin ! Ca va de l'indus au rock'n'roll français des années 50, Punk, vraiment il écoute de tout.
Moi j'écoute beaucoup de chanson aussi. J'ai toujours adoré Piaf, Fréhel, pour la voix, et pour le côté chanson populaire. Mais c'est vrai que c'est surtout le côté Punk qui m'a poussé.
La Grosse Radio
Sur votre site vous vous décrivez comme groupe Dub, mais je n'ai pas trop trouvé cette influence prédominante...
Géraldine
C'est dur à définir. On met ça par rapport à l'influence de Jean-Mi, on met ça parce qu'il y a quelques samples avec des grosses basses, mais à part ça, pour définir notre style...
Nos influences se sont mélangées, j'apporte mes trucs, Jean-Mi met ça dans ses machines, je reviens 2-3 mois après avec ma guitare, et voilà, c'est parti ! Cest rapide, un micro posé dans son bordel, chez lui, tu balances le chant, et puis c'est fait!
Mais du coup je m'atendais à un truc bien plus simple en concert, mais en faut, avec les machines, c'est hyper compliqué, hyper long. Tu vois, je voulais faire un truc à deux pour qu'on soit plus tranquille, mais en fat non ! Jean-Mi a encore des machines, des samplers, des machines à effet. Sur scène, il a son vieux Korg original, les machines à effet, le vieux delay qui pèse un kilo, il a une DAT, il balance ses samples sur la boîte à rythmes, qu'il joue sur un petit piano, et après, il a tous ses effets collés c'est pour ça que ça prend énormément de temps dans l'installation. Il tisse une espèce de toile, pendant une heure, avec des fils partout... D'où LaTwal !
La Grosse Radio
On sent une très grande exigence au niveau du son...
Géraldine
Oui, on est exigeant. C'est aussi un respect par rapport au gens. Qund tu écoutes un album, c'est important que le son soit bon. Comme quand tu vas voir un concert. Et pour LaTwal, c'est encore pire. Comme ce sont des machines, on est encore plus exigeants. Forcément du coup, ça fait un tri sur les concerts.
Il y a plein de concerts qu'on ne peut pas faire, dans les bars par exemple. Donc on ne peut faire que des salles, avec un système de son correct. Du coup en France c'est un peu handicapant, parce que, uor jouer dans les SMAC (Salle de Musique Actuelle, réseau de salles subventionnées, NDLR) il faut un tour manager. Si tu n'en a pas, on n'écoute même pas ton disque. On peut jouer à la Pêche, de Montreuil, parce qu'on connait, mais sinon le réseau des SMAC, il nous est fermé, parce qu'on n'est pas pro. C'est compliqué. Du coup on va plutôt jouer à l'extérieur, en Hollande, en Allemagne. Là-bas les gens ils aiment le rock, et ils ont le son.
La Grosse Radio
Tu chantes en français, en anglais, mais aussi en Rom et en yiddish...
Géraldine
Oui, c'est vrai. Quitte à essayer autre chose, autant chanter dans d'autres langues. Alors le yiddish, c'est vrai, parce que c'est une très belle langue, vraiment. C'est une langue multi-culturelle, il y a la consonnace allemande, un arrière-goût de français, et un mélange de sonorités de l'est, c'est très chouette à chanter. Et c'est aussi une langue qui est porteuse de très belles poésies.
On a même carrément préparé un spectacle tout en yiddish. Dans ce spectacle,on a aussi ajouté un chant en rom sur les Gitans, qui parle du camp d'Auschwitz. C'est une des rares chansons, je crois qu'il y en a deux ou trois, qui parle des Tziganes et des camps.
Alors forcément, on me demande souvent est-ce que tu es juive, non, est-ce que tu parles yiddish, non, Rom, non plus. C'est ce qui est bien, ça casse les stéréotypes. Je me suis beaucoup entraîné, j'ai écouté, écouté... Et ce n'est pas dit que demain je chante en d'autre langue, en basque, en corse... Chaque langue donne une musique différente, c'est ce qui est chouette. Le choix de la langue joue sur la musicalité, c'est super intéressant.
La Grosse Radio
Et toi, la guitare?
Géraldine
Au début j'ai joué de la basse. La guitare c'est par nécessité, pour composer les morceaux. Et puis pour chanter... Chanter avec une basse, c'est assez difficile. Mais là j'ai envie d'en mettre plus. Du coup il va falloir que je bosse (rires). Jean-Mi met aussi beaucoup de samples de guitare. Du coup le choix qu'on a fait, c'est, quand j'arrive c'est pour gonfler le son d'ensemble
Ca me libère aussi un peu, parce que le chant, ça demande beaucoup. Avec une guitare c'est possible, mais comme en plus, sur scène, on est deux, Jean-Mi est planqué derrière tout son truc... Il faut quand même être aussi avec les gens, si je suis juste cachée derrière une guitare, c'est moins bien.
La Grosse Radio
Et les projets ?
Géraldine
On a déjà quelques concerts de prévus, en Allemagne, en France, puis après on verra.
Et surtout on va sortir un livre-disque, ce sera porté par les éditions Libertalia, et qui sera du coup vendu en librairie. Ce sera un bouquin/CD, sur la thématique de la culture yiddish révolutionnaire. C'est plein de textes très beaux. Comme souvent les gens qui ont vécu l'exil, parce qu'ils étaient chassés, il y a toujours un souvenir dans les textes, il y a un foisonnement artistique....
C'est le livre qui va illustrer le spectacle qu'on avait fait en yiddish. On a joué ce spectacle une seule fois, à Belfort, une semaine après le Bataclan. Autant te dire que, au concert, il n'y avait pas grand monde. On s'est demandé quoi faire des morceaux, on avait bossé dessus, 6 mois, un an... Il avait fallu refaire toutes les musiques, on avait récupéré de vieilles musiques, mais il y a aussi des musiques qui n'ont rien à voir, qui sont un peu new wave, des trucs inspirées de la musique yiddish, des trucs plus punk...
Donc on va réutiliser tout ce travail, et maintenant il faut écrire le bouquin. C'est le gros chantier du moment.
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Géraldine est également dans Cartouche, dont l'album est annoncé tout chaud. A suivre également sur la page Facebook du groupe.
Photos Martin barzilai