Comment vous présentez cette soirée euphorique de notre atypique canadien Mac Demarco ? Nous sommes le 29 mai, un lundi soir dans le 20e, rue Boyer, à la Maroquinerie à l'occasion du seul concert parisien de Mac Demarco. Après ses deux premiers albums pop rock psyché décalés en 2012 puis Salad Days en 2014, à la frontière des genres, Mac Demarco a sorti cette année This Old Dog, l'album de la maturité ( ?) à la fois doux, empli d'une mélancolie poétique. Instant idéal pour présenter cet album à Paris, la ville des grands Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, de la poésie, de l'amour. Trois années après Salad Days, que pouvions nous attendre du phénomène délirant et surprenant Mac Demarco ? L'album de la maturité ? Une sagesse nécessaire ? Et bah nan ! Mac Demarco malgré sa sympathie et son sérieux dès son arrivée sur scène, nous a fait le show. Il n'a pas manqué à se réputation. Pas de surprise ! C'est bien lui ! Et quelle soirée !
Kirin J Callinan
Ils sont au nombre de trois. Un trio déluré ! Dès notre arrivée, nous savons ce dont comporte la promesse de cette soirée. Nous descendons délicatement au sous-sol tout en prenant une bière au passage. Nous parvenons à entrer dans cette salle de concert assez obscure. Kirin J Callinan est en train de se produire. La salle n'est pas tout à fait pleine.
La musique sensuelle et dansante de ce groupe pop/rock/électro australien nous emmène tout de suite vers une soirée pop/indie un peu délurée. Ils sont au nombre de trois : un batteur mèche à la nuque bleutée, un guitariste au béret et au torse nu tout comme le charismatique chanteur et bassiste du groupe. Je pensais que Bowie était bien mort mais apparemment non ou du moins on le maintient en vie. Nous sommes de retour dans les années 80's. La sensualité, l'érotisme et le glamour caractérisent leur musique avec quelques relents punk.
Nous sommes à la frontière des genres. Les limites du genre sont repoussées. Le leader de ce groupe, extraverti, tel un animal sauvage apprivoisé émettant des ondes, des sensations aphrodisiaques. Hésitant musicalement à quelques reprises, il privilégie le spectaculaire, la mise en scène. Pari gagné ! Ils nous placent dans leur univers imaginatif, florale et comique. L’excitation est recherchée et trouvée.
Leur musique pop décousu et hétéroclite n'a pas fini de nous surprendre. Nous sommes bercés et baignés dans une eau sensiblement chaude aux saveurs florales, aphrodisiaques, parfumées d’érotisme et de stimulation. Nous sentons la sensibilité et l'énergie de leur musique pop/rock/électro qui nous parcourt. Cette confusion des genres sous l’accent pop fait le génie de ce groupe. Un groupe à suivre et qui fera parler d'eux, c'est certain.
Mac Demarco
C’est le moment pour lequel nous sommes toutes et tous venus ce soir. Celui que l’on attend, celui que l’on espère ! Il est là et bien présent. Il nous arrive comme à son habitude, décontracté et souriant tel un éternel enfant retrouvant ses copains pour s’amuser, passer un bon moment. Il commence tout doucement et son plaisir est communicatif. Blaguant avec le public, il exprime sa joie de retrouver Paris. Il nous fait la promesse que l’on va prendre plaisir sous le ton de l’amour et de la décontraction. Don’t worry, be happy tonight ! Voici le thème de cette soirée.
La salle est comble. Le public est au rendez-vous. Les fans sont impatients de danser et de chanter au rythme de la mélodie tranquillisante et apaisante de Mac Demarco. Ce public est jeune, assez bourgeois mais bien mixte avec des amateurs de musique ayant la trentaine. C’est surement ici le génie de cet artiste pop rock et multi instrumentiste : toucher par sa musique et sa personnalité, un public de tout bord, de tout âge et de toute préférence musicale.
Approchant de la trentaine et laissant sa casquette de coté, Mac Demarco va promulguer toutes ses ondes sensuelles et dansantes, toutes ses couleurs au travers de sa musique. La vague Mac Demarco va s’élancer ! Les spectateurs tendances et en paix avec eux mêmes, savent ce qu’ils veulent. Un Mac Demarco éternellement adolescent, qui ne se prend pas au sérieux voire déjanté, à la folie tranquille.
Au premier abord, il nous joue ses classiques pour mettre tout le monde en appétit. Il nous paraît moins fringuant, plus tranquille. Surprenant ? Non, ce n’est que le début ! Bière à la main et cigarette au bout du bec, il continue à communier avec le public qui lui, commence à entrer dans la danse. On sautille, on chantonne. Les sourires sont là où on les attendait, sur ces visages lisses et insouciants. L’ivresse commence à monter autant pour nous, pauvres pécheurs, que pour l’équipage qui cherche à élancer, à préparer la tempête.
La prestation musicale et la performance des musiciens font que l’on se sent bien, apaisé. Surtout qu’il n’y a aucunes barrières entre la scène et le public. Nous sommes tous dans le même bateau, nous affrontons tous la même tempête. La mer sur laquelle nous flottons est commune. Une harmonie émerge, nous transporte et transverse. Nous sommes à nu. Les jeunes fans chanceux sont invités par Mac Demarco lui même, à le rejoindre sur scène, chanter et danser à ses cotés. Flatulence.
Mac Demarco laisse son micro et sa place aux opportunistes, l’instant d’un moment. La société du spectacle est flattée, le divertissement, à son apogée. Sur scène, ils ne savent que faire, paralysés par le ridicule mais saisis par la chance d’être là, ici et maintenant. Le comble de l’adolescence. Sans oublier de capturer ce moment par un selfie, une photo ou vidéo, qui se retrouveront sur Instagram, sur Facebook. Revenons à la musique. Là seul notre intérêt doit se trouver !
Une première partie classique, avec la majeure partie de ses premiers tubes, entre quelques lichés de whisky, gorgés de bière sans en abuser bien sur. Une pause nécessaire entre les musiques de quoi prendre le pou de la soirée, et d’entendre les délires verbaux de Mac Demarco et de sa troupe, flattant le public. Nous pouvons penser que les fans viennent autant pour la musique que pour entendre, assister aux frasques du personnage « Mac Demarco ». Cette étiquette leur plait, lui plait encore et n’est pas prête de lui échapper. Bon ou mauvais présage ? Ce personnage forgé dès les prémices de sa réputation afin de le faire connaître, sera peut être sa chute ou sa renaissance ? Va-t-il grandir ? Evidement, le talent s’exprime toujours !
Nous assistons de fait, à une pièce de théâtre musicale ou Mac Demarco a le rôle principal du personnage comique. Sacré mascarade ! Mais la musique suscite l’attention. La deuxième partie comporte plus particulièrement ses nouveaux morceaux, ses nouvelles compositions. Car oui, Mac Demarco orchestre d’une forte belle manière ses dernières mélodies avec grâce et harmonie. Le chef d’orchestre nous joue, l’éternel enfant-roi, doué, une musique plus instrumentale, calme, langoureuse.
Et toujours de qualité. Certainement, la sublimation des pensées, des souvenirs refoulés de cette figure paternelle. Cette deuxième partie est de bonne qualité n’en déplaise aux fans voulant figer, platrifier le personnage commercial « Mac Demarco », en masquant l’artiste. Il est peut être trop tôt pour parler. This Old Dog est de qualité et ce n’est que l’album transitoire, d’une maturité à percevoir. Pour le moment, Mac Demarco continue de sauter partout sur les enceintes, d’inviter Kirin J Callinan à participer à la fête, de crier, de jouer avec son ventre, sa graisse, de sauter dans la foule voire de grimper au plafond de la salle de concert. Oui cela paraît dingue, c’était dingue !
Mac Demarco et les Kirin J Callinan se sont confondus avec le public, portés par eux et reconduit sur scène. La fin de soirée est confuse. Tout se bouscule, s’entremêle, le public et la scène, les cris et le chant, le bruit et la mélodie. Mais la danse est bien et toujours présente. Tout s’apaise avant de remercier la performance de Mac Demarco. Des acclamations, un « au revoir » pour de nouvelles aventures, de nouvelles surprises.
La soirée fut un sacré spectacle où la musique n’était pas la seule à s’exprimer. On peut parler de spectacle vivant, théâtral. La légèreté et l’insouciance de Mac Demarco n’ont pas fini de nous faire planer, danser et chanter. Tout en espérant que ce personnage manifeste et ne déclare le diktat de l’artiste. Le personnage ne doit prendre le pas sur l’artiste. Ce qui se manifeste ! Mac Demarco s’agence vers une maturité tout en gardant sa légèreté, n’est ce pas ce qui fonde, détermine l’enveloppe de son génie ? En attendant le verdict et le prochain épisode, soyons patients et sages ! Vite, vite, la suite !
Mac Demarco en tournée (festival) cet été, en France :
Dimanche 20 Aout à Saint Malo, LA ROUTE DU ROCK.
Dimanche 27 Aout à Saint Cloud, ROCK EN SEINE.
Crédit Photo : Edouard Boucart