Samedi 16 juin, 25h55 - Valley
On se tait et on écoute...
Un rituel. Non, une performance de The Devil's Blood n'est pas un simple concert, eux-même décrivent leur prestation comme un véritable culte cérémoniel allant bien au-delà de la musique. En ce samedi soir sous la tente Valley, le Hellfest va comprendre et saisir l'âme véritable d'un groupe pas comme les autres nait d'une union improbable entre un frère guitariste compositeur, une soeur chanteuse, quatre musiciens guests très concernés et le diable en personne. Nul n'en sortira indemne, c'est écrit.
En une introduction décalée faite d'un poème de Charles Baudelaire ("Tristesses de la Lune") mis en musique folk décadante, le combo hollandais cristallise déjà la curiosité des badauds venus assistés pour la première fois à leur performance. Quant aux autres, les fans, ils savent déjà à quoi s'attendre et sont en transe... à l'image de leur gourou Selim Lemouchi, totalement perché sur le côté droit de la scène dans un univers que seul lui semble comprendre, yeux exhorbités et haranguant ses fidèles en chantant ses propres paroles. Aucun autre mot ne sera prononcé par le maître, pas plus que par sa frangine Farida (alias F.), pour un show qui s'effectuera sans transition et dans un enchainement diabolique total.
Tout se concentre sur la musique, les atmosphères et le culte ouvert d'une force spirituelle au-delà de ce monde : Lucifer, Satan, l'antichrist, peu importe son nom. Les six néerlandais baignent dans le sang projeté sur leur visage et leur corps, les jeux de lumières rougeoyants et sombres renforçant cette idée de cérémonie sataniste lancinant mais jamais violent, tout en recueilement, en hypnotisme. A chaque fin de chanson ou presque, Miss F. alias "Mouth of Satan" entre en invocation spirituelle profonde et va parfois s'agenouiller devant un autel placé près de la batterie comme sur le final de "The Anti Kosmik Magick". Du coup, nous specateurs observons et nous taisons avant quelques acclamations raisonnables.
Nul défaut technique ne viendra perturber une expérience en tout point parfaite. Le diapason général opéré par chaque musicien est dantesque, les parties instrumentales sont exécutées avec minutie et harmonies époustoufflantes comme sur ce fantastique "The Madness of Serpents" où la troupe se donne jusqu'au bout et une dernière note qui nous porte au grand final "Christ of Cocaine" d'une intro ultra accrocheuse. Car The Devil's Blood sait aussi gérer la mélodie avec brio, comme nous avons pu le remarquer sur ses différentes offrandes studio. Là encore ils nous donnent le meilleur ou presque au niveau d'une setlist plus que solide mélangeant allègrement le dernier opus ainsi que le précédent. "She" et "Fire Burning" remporteront la palme de la mélodie instantanée, tandis que l'intro "The Time of No Time" et sa suite "Evermore" sauront lancer les hostilités avec classe et abnégation.
Difficile de relever le moindre éceuil dans ce spectacle hors norme, certains pourront reprocher à l'imposante Mouth of Satan quelques légères fausses notes dans les aigus les plus extrêmes mais cela reviendrait à couper ses cheveux ondulés en quatre. Tellement à fond dans son personnage, la demoiselle éructe son charisme à chaque son de sa voix sans pareille, en l'apparence tranquille puis soudainement démoniaque sur un "The Anti Kosmik Magick" qui décidément restera profondément ancré dans les mémoires.
A l'image du show offert sous nos yeux pendant une heure, le sextet quitte la scène sans mot dire et sous une ovation orgasmique. Les fans ont été largement comblés et peuvent tranquillement aller se coucher, les yeux plein d'étoiles à l'image de celles accrochées à la tenture bleue d'une Valley plein comme un oeuf. Il ne reste donc plus qu'à regagner nos pénates bercés par nos souvenirs et une outro enregistrée à base de chant français... à moins que les plus téméraires ne veulent assister à la toute fin du show des Guns N' Roses sur la Mainstage 1 ? On leur souhaite bien du courage tant le choc culturel et musical peut s'annoncer saisissant.
Setlist (1 heure) :
- The Time of No Time
- Evermore
- She
- The Thousandfold Epicentre
- The Anti Kosmik Magick
- Rake Your Nails Across the Firmament
- Fire Burning
- The Madness of Serpents
- Christ or Cocaine