On vous a présenté SD Holis tout au long de l'année (voir ici ou ici) à travers les clips destinés à teaser son tout premier album 1st Light. Sorti le 28 septembre, son potentiel, son originalité et sa créativité en font l'une des plus belles réussites reggae de cette année 2017. Et pourtant, cet album est passé inaperçu. Pourquoi ? Pour deux raisons selon nous : la première, c'est que 1st Light est autoproduit et que SD Holis n'a donc pas pu bénéficier d'un soutien promotionnel intensif ; la seconde c'est qu'il bouscule un peu trop les codes et les dogmes inhérents au reggae music.
Et pourtant, quelques albums situés dans la même veine que celui de SD Holis ont connu un destin plus avantageux : citons Vapor de Big Red, 1988 de Biga*Ranx ou encore dans une autre mesure, le Mwaka Moon de Kalash avec son titre éponyme emblématique. Ces trois opus ont en commun de s'inspirer tout autant du reggae, du hip-hop (dans sa version trap), du dub, du vaporwave, d'ambiances très chill et electro et, surtout, des voix pitchées (autotune, vocoder,...).
Ainsi, s'il est un peu plus confidentiel, ce 1st Light n'en est pas moins dénué de qualité. Non seulement parce qu'il contribue à élargir le champ d'action du reggae music mais aussi parce que les instrus ont été réalisées avec soin. Principalement épaulé par son acolyte King Doudou pour la réalisation de cet album, SD Holis a fait montre de son savoir-faire à la production.
S'il est indéniable que les beats trap sont de plus à plus à recenser au sein du reggae en France, que l'on repense aux artistes mentionnés plus haut, ce courant se développe principalement à Tours via les labels Brigante Records et ODGProd.
Mais la ville de SD Holis, il se trouve que c'est Lyon, celle qui a vu grandir High Tone, Le Peuple de l'Herbe ou encore Kaly Live Dub ; certes, ces groupes sont apparus il y a une vingtaine d'années, mais on a de sérieuses raisons de penser que SD Holis, s'il n'est pas nécessairement influencé par eux, perpétue cette tradition qui mêle dub, hip-hop, electro et reggae.
C'est en effet ce mélange bigarré qui donne toute sa force à ce 1st Light. S'il est majoritairement dominé par le trap, les skanks sont néanmoins présents. "The Sound", le morceau d'ouverture, annonce la tonalité de l'album : planant, lent et lourd. Les lignes de basse sont plus ronronnantes que linéaires et cet aspect se ressent d'autant plus sur "Blue Mataro", "Voice In My Head", "Time" ou "All Alone", les titres les plus stratosphériques et vaporwave de ce 1st Light. Le flow de SD Holis suit également cette voie ; on n'est pas très loin d'un Young Thug ou d'un Future avec ces morceaux.
Cependant, quelques tracks authentiquement reggae se sont habilement glissés ici, que l'on pense à "The Way You Want", "Melomania", l'excellent "Slowly" (premier single de l'album), avec des batteries qui nuancent les beats trap des précédents tunes. On retrouve aussi quelques effets dub (reverb, échos...) et beaucoup de traitements sur la voix. On insistera aussi sur "Move On" et "The Wall" avec des lignes de basse pesantes et profondes, peut-être celles qui sonnent le plus reggae sur cet album ; là aussi, le dub marque de son empreinte ces morceaux, de la même manière que sur "Feel" qui oscille entre le rub-a-dub et le stepper quasiment calibré sound system.
On sera également marqué par le très bon "Get A Beaten" avec son côté r'n'b façon 90's mais aussi par les nappes plus electro sur "Weekend" et "Deep End" qui confirment les différentes inspirations de SD Holis.
1st Light est une lumière qui nous guide vers des contrées encore peu explorées de nos jours dans le reggae. Espérons que d'autres artistes s'engouffrent encore plus dans cette brèche percée par SD Holis.