Oldseed – Bloom/Burn

Qu'est ce qui se cache sous le terme songwriter ? Une bannière qui peut rassembler une floppée d'images : un mec mal rasé avec une guitare sèche qui vient nous chanter ce qu'il a sur le cœur, ses râteaux ou ses angoisses face à la condition humaine. Un mec chiant, persuadé d'être un conteur nécessaire, un poète maudit (...), un mec qui se la joue cool en se faisant payer au chapeau tout en vendant ses cd's format digifile à 15€.

Et puis il y a Oldseed. Un mec mal rasé, avec une guitare sèche qui vient nous chanter ce qu'il a sur le cœur. Alors pourquoi en parlons-nous ? Parce qu'il se passe quelque chose qu'on n'avait pas entendu depuis Jason Molina. Et pour le comprendre il faut l'avoir vu. On pourrait imaginer la scène : vous allez voir Oldseed mais ne connaissez pas son visage. Soudain, un type tout ce qu'il y a de plus commun se lève et va vers la guitare. Il monte, vous vous demandez ce qu'il fait et là il se met à chanter. Vous ne pouvez plus bouger, l'émotion est proportionnelle à la surprise.
Oldseed c'est à peu près ça, une évidence, une présence sans mensonge (augmentée par la forme en général bien rustique : guitare/voix sans amplification). De cette simplicité naît une complicité. Pour parfaire l'effet, il ne joue globalement qu'en appartement. Aussi vous êtes toujours son hôte, il est l'invité de vos émotions du soir. L'écouter c'est un peu comme devenir son ami.

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Pour son nouvel album il joue donc de la dualité disque/live comme a pu le faire Neil Young entre un Harvest Moon/Dreamin Man, After the gold rush/live at massey hall. Si bien que l'un relève ou révèle l'autre, se complétant quand bien trop souvent le live signifie une copie carbone de l'album.
Pour une chronique le disque en question n'est encore quasiment pas mentionné, et pour cause.
C'est tout le projet d'Oldseed: faire venir ses disques par la rencontre. Vous voulez l'acheter ? Aller le voir. Avant de le dématérialiser vous lui aurez serré la main et serez rentré avec votre exemplaire.

Et finalement on retrouve tout ça à l'écoute de son exemplaire. Vous pourrez également écouter tout le disque sur youtube enregistré en live, histoire d'aller au bout de la démarche.

"Re/tire" est une succession d'assauts, un ressac émotif qui nous saisit puis nous laisse chancelant.
"No/thing", magnifique morceau folk dont l'écoute nous donne l'impression que Craig (son prénom) est à côté de nous sur le canapé, est aussi un texte qui pourait expliquer en partie sa démarche. Nihilisme réaliste et auto-critique à la fois. La police des titres montrent bien la dualité du fond et de la forme et le texte de "you/me" va en ce sens. Nous ne sommes jamais pleinement nous, les circonstances nous façonnent mais nous pouvons aussi façonner les circonstances. C'est un relativisme serein, une bulle dans le chaos. Sa façon d'écrire et de jouer est sa façon d'être au monde, et c'est bien là que tout prend sens.
Oldseed n'est pas le fruit d'un calcul, ni un cri du cœur car il serait bien vain de croire qu'il faille crier pour exister. L'existence est un leurre intermittent, en avoir conscience annihile de suite toute prétention.
"Take / away" est ainsi un manifeste de simplicité et de discrétion. Le murmure trouve sa force dans la répétition. C'est le pouvoir magique des litanies.
Sur huit titres l'album explore le cycle destruction/reconstruction. On créé le monde qui nous créé en retour en une suite d'expansions et de contractions. Exister, disparaître. Ne compte que ce que l'on ressent, des instants de combustion forts qu'il faut saisir. Avec Bloom/Burn, Oldseed offre une expérience où la spontanéité se confond avec l'intensité.

Sorti le 9/09/2017 en vinyle chez Bekassine records.

NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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