De mémoire de chronirocker, jamais le nom de ces deux groupes n'aura été autant en adéquation avec leur prestation scénique… Nous n'avançons pas cette théorie à la légère et le prouvons par l'exemple. Ce soir-là à la Maroq, le danois Kim "Kix" Jeppesen présentait sa nouvelle formule, puisque son side-kick et néanmoins frangin Bo, semble l'avoir quitté pour tracer sa propre voie du rock n'roll. On peut donc avancer qu'il se la joue vraiment solo - même si Powersolo devient trio sur scène - mais pour autant, il a gardé tout son power ! Première démonstration sémantique. Et James Leg ? Et bien, John Wesley Myers de son vrai nom, l'a sacrément remué sa jambe. Coup de pied fouetté digne d'un savateur du vieux Paname, jeu de jambes à rendre jaloux le fantôme de Bruce Lee, le tout sans quitter le siège de son fender Rhodes ! Le diable texan nous a toutes et tous étendus pour le compte et sa démence scénique a fait la paire avec la folie douce et ironique de Powersolo.
Ceux qui connaissent le phénomène James Leg, nous préviennent. "C'est la première fois que tu le vois sur scène ? Attends-toi à te faire décoiffer la mèche, mon gars…". Mouais… Une batterie, imposante comme de juste et placée plein centre. Un Fender Rhodes et un Fender basse. Sans grattes, c'est pas heavy rock garanti, non ? Mais, mais, qu'est-ce que fichent toutes ces pédales d'effet sous le clavier… Et ce gargantuesque ampli derrière ? Lorsque James Leg pénètre sur scène, on se rappelle l'avoir croisé au bar, longues bacchantes taillées de près et chapeau texan vissé sur le crâne. Malgré une discrétion de bon aloi, le bonhomme dégageait un je-ne-sais quoi de magnétique. Il se présente tête nue, mais toute crinière dehors et s'installe sur le tabouret de cuir haut perché, tandis que Mat Gaz (qui officie également au sein du combo marseillais Mars Red Sky) prend possession de ses fûts.
James, indigne rejeton de prêcheur, s'attribue pourtant volontiers le titre de Reverend. Dès que retentit sa voix, rocailleuse à souhait, on se sent littéralement happé par son sermon païen. C'est pas "mes biens chers frères, mes biens chères soeurs" qu'il nous sert le James et il ne s'attend pas à ce qu'on reprenne tous en choeur. Il nous mitraille pire qu'un cureton en pleine crise mystique ! Il éructe, grimace, suinte de tous ses pores un blues rock écartelé à coups de disto, switche comme un fou sur ses pédales, lance ses fameux coups de pied tout en gardant toujours une fesse sur son siège, le nez devant le micro et les mains baladeuses et hystériques sur ses claviers… Qu'importe qu'on ne comprenne que dalle aux paroles, qu'on ne distingue parfois pas ses traits derrière sa chevelure rendue à l'état sauvage. James Leg a pris possession de nos sens, lors de ses morceaux speed tout autant qu'avec les rares moments de ballades bluesy…
Pas facile pour Kim et ses acolytes de passer après ce fou furieux de James Leg. Kim connait bien la Maroq pour y avoir joué il y a de cela dix ans et c'est sans doute pour ça qu'il l'a choisi pour la release party de "BO-PEEP", son neuvième album, tout frais sorti. Histoire de se réappropier l'espace, Powersolo débute par un instrumental "The Railthin Brothers Theme", également l'occasion d'un coup de chapeau à son frangin, puisque c'est ainsi qu'ils se présentaient… Kim, taillé comme un champion cycliste, fine moustache et sombres atours, enchaîne avec "Tornado" un autre morceau du nouvel album. "New fashioned girl" blues chaloupé et décontracté qui suit, tape le contraste avec "Dans les rues de Paris", sucrerie sixties bien barrée… Et en français dans le texte ! Le bougre prétend sur Facebook avoir appris notre langue avec un certain Dutronc. Rien d'étonnant à cela, son côté pince-sans-rire ne pouvait que séduire cet adepte de la dérision et du cabotinage à haute dose !
Cabotin, il l'est assurément ; ses "you know what" à répétition sur "Nascar", ont du en agacer plus d'un. Mais il a une réel maîtrise du second degré… Chacune de ses postures, de ses mimiques sont des clins-d'oeils au public. À l'instar des styles qu'il mixe avec maestria, passant d'une rengaine country sous amphet ("Hillbilly") au garage rock fiévreux ("Frantic") à la grande satisfaction des pogoteurs… Tout cela, en prenant le temps de se remettre un p'tit coup de peigne ou de siffler sa bière. Lorsque son guitariste casse une corde, il n'a aucune peine à continuer le show accompagné de Zack le batteur. On sent bien que même tout seul, Kim tiendrait le public. Qu'il fera mine de quitter sur le très punk "Asshole". Pour mieux revenir, vêtu d'une robe de chambre aux parures dorées… Incroyable. Tout comme ce morceau fleuve et hypnotique qu’ils font durer, jouant encore avec nos nerfs, et qui concluera une soirée mémorable !
Un grand merci à Ricardo de la Maroquinerie et à Franck Rapido pour ses vidéos !