Il fallait du cran pour créer cette tournée dès le départ, et encore plus pour recommencer. Le dernier passage du projet fou de Tobias Sammet en 2016 avait rempli le Trianon de justesse, le pari était donc plus grand encore de doubler la jauge pour combler l'Olympia. Mais même si la soirée n'est pas complète, c'est tout de même plus de 2500 personnes qui se pressent dans la salle mythique. Pari donc largement réussi !
Après un petit tour de chauffe avec le DJ du Hellfest Mike Rock essayant de réveiller la foule dès 20h avec un succès relatif, c'est ''Shoot to Thrill'' qui annonce le début des hostilités, suivi par l'"Ode à la Joie" de Beethoven. Tobias l'avait promis, teasé, bien vendu sur les réseaux sociaux, le show promettait d'être énorme. Nouveau décor, nouveaux invités, setlist renouvelée, le tout calqué sur la même formule que pour la précédente tournée : 3h15 environ de concert sans entracte pour le plus grand bonheur de tous. Un grand rideau cache encore la scène lors des premiers accords de ''Ghost in the Moon'' et le public retient son souffle...
Et dès les premières secondes, on constate que Tobias avait raison. Une fumée lourde inonde la scène d’où dépassent les musiciens, noyant un décor à étage avec écran géant comme fond de scène. Les arbres morts remplacent les murailles de ''Ghostlight'', des grilles noires ''burtoniennes'' lugubres surplombent l'ensemble, encadrant un escalier caché d’où les invités apparaissent, avant de descendre quelques marches vers l'avant-scène. Une plate-forme côté cour sert de piédestal aux trois choristes de la tournée, claviers côté jardin, batterie bien au centre, tandis que basse et guitares se partagent l'avant-scène. Le mix est (et sera toute la soirée) clair, aéré sans être trop fort, la voie est donc entièrement libre pour le maître de cérémonie qui se présente enfin.
Tobias Sammet ouvre donc le bal seul au micro, avec sa bonne humeur habituelle et intacte (qui commence à nous manquer avec d'Edguy), amplifiée par l'accueil monstrueux réservé par le public de l'Olympia. Difficile de faire mieux comme entrée en matière, et même si le timing est serré, Tobias prendra le temps de savourer ces instants tout au long de la soirée. A peine le temps de comprendre ce qu'il se passe que le premier guest s'avance, l'habitué du projet Ronnie Atkins, très présent sur le dernier album pour le premier refrain imparable de la soirée : ''Starlight''.
Moonlight aura la part belle avec huit titres sur 24, et tout le début du concert jusqu'au ''Lucifer'' de Jorn lui sera consacré. La présence exceptionnelle de Geoff Tate sur la tournée permet également d'enchaîner ''Alchemy'' et ''Invincible'': Tobias ne tarit pas d'éloges sur le personnage, véritable monument du hard rock et complètement à sa place sur les morceaux d'Avantasia. Sa présence vocale déjà appréciable sur album assomme un public aux anges à chaque montée, bien accompagné par un Tobias juste en toute occasion. Bob Catley toujours habillé de sa veste bleue à paillette nous étonne malgré ses 71 ans avec une présence scénique et une interprétation parfaite également.
Si la précédente tournée laissait transparaître quelques approximations (oublis de paroles, arrivées tardives sur scène...), ce passage à Paris est parfait de bout en bout, autant dans les duos que dans les choeurs, soli et interventions de tous. Le seul qui n'a pas l'air dans son assiette ce soir est la figure nordique Jorn Lande, cheveux mi-longs, chemise colorée et gobelet de tisane à portée. La voix du chanteur est malheureusement bien en deçà de ses habitudes, avec très peu de montées ou de puissance, sûrement atteint par un petit coup de froid. L'absence de Michael Kiske est également à noter, remplacé de main de maître par le discret Oliver Hartmann sur ''Reach Out for the Light''.
Si les invités sont un peu le centre d’intérêt de la soirée, il ne faut absolument pas sous-estimer le reste de la bande, et encore moins les trois choristes. Avec Herbie Langhans, Amanda Somerville n'étant pas de la partie, c'est un duo féminin qui récupère le job : Ina Morgan, et la toute jeune Adrienne Cowan. Impossible de décrire leur cohésion, le trio s'amuse comme jamais en fond de scène. Mimes, grimaces hilarantes, questions - réponses suivant les paroles, il faut vraiment penser à garder un œil sur eux tout au long de la soirée. Mention spéciale à Adrienne, qui passe du chant clair puissant au hurlement profond, couvrant la partie rapide de Mille Petrozza sur ''The Book of Shallows'' avec brio. C'est elle également qui rejoint Tobias sur ''Moonglow'' et ''Farewell'', Ina Morgan s'occupant de ''Shelter From The Rain''. A noter également, l'endurance assez folle des musiciens pendant plus de trois heures avec très peu de pauses. Sascha Paeth et Oliver Hartmann se partageant rythmiques et soli sans fausse note, et Felix Bohnke impressionnant tout du long.
Malgré les trois heures de show et la promesse de nombreux retours en arrière, la setlist réserve assez peu de surprises par rapport à l'ancienne tournée. Les essentiels sont toujours là comme ''Avantasia'', ''Lost in Space'', ''Shelter From The Rain'' et le medley final ''Sign of the Cross / The Seven Angels'', et on aurait aimé sortir des sentiers battus avec ''Serpents in Paradise'', ''The Looking Glass'' ou d'autres titres rares des premiers albums. Les frissons sont heureusement légions avec tout une liste de titres dépassant les huit minutes : ''The Scarecrow'', ''Let The Storm Descend Upon You'' ou ''Reach Out for the Light'', et la reprise de ''Maniac'' en duo avec Eric Martin apporte un peu de fraîcheur.
Comme si le projet avait échappé à Tobias, nous avons vraiment l'impression d'assister au concert d'un groupe, d'un projet uni. Pas d'individualité, personne n'est dans son coin et la bonne humeur sur scène est permanente. Tobias laissant la scène à de nombreuses reprises, comme pour l'enchaînement ''Promised Land'' – ''Twisted Mind''. Chaque invité a droit à son moment à lui, instant propice aux blagues et impros, compliments et câlins, avec à chaque fois un excellent retour de l'auditoire parisien. La bande vit comme un groupe, sur scène comme à chaque étape, en témoigne les nombreuses photos de leurs aventures sur les réseaux sociaux.
Pourtant, les techniciens s'impatientent au bord de la scène avec visiblement un impératif important : le temps de jeu doit être raccourci. Les concerts à Paris se doivent de finir assez tôt et Tobias doit malheureusement raccourcir le set... ou pas. Envoyant voler les contraintes, pas un seul morceau ne manquera à l'appel avec un concert terminant juste avant minuit rappel compris, chose assez exceptionnelle dans la capitale. Le final habituel avec (une plus courte) présentation de toute l'équipe et distribution de goodies s'achève sous les acclamations d'un public ravi, Tobias promettant de revenir à Paris quoi qu'il en coûte.
C'est une nouvelle fois gagné pour le projet du leader d'Edguy. Peu de longueurs, des invités impliqués, un show à la hauteur, la machine Avantasia vaut le déplacement sans aucun doute. Tobias avance malgré les critiques et les doutes, en espérant un prochain retour rapide d'Edguy rapide et aussi intéressant...
Setlist:
Symphony No. 9, Op. 125 (Ode to Joy)
Ghost in the Moon
Starlight
Book of Shallows
The Raven Child
Lucifer
Alchemy
Invincible
Reach Out for the Light
Moonglow
Maniac
Dying for an Angel
Lavender
The Story Ain't Over
The Scarecrow
Promised Land (with Jørn Lande) (also with Eric Martin, without Tobias Sammet)
Twisted Mind (with Geoff Tate) (also with Eric Martin, without Tobias Sammet)
Avantasia
Let the Storm Descend Upon You
Master of the Pendulum
Shelter from the Rain
Mystery of a Blood Red Rose
Lost in Space
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Farewell
Sign of the Cross / The Seven Angel
Crédit photos: Draksmoon - Julie Warnier
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