Guitare en Scène 2019 jour 4 : Mark Knopfler, Albert Lee

Après trois journées bien différentes, et alors que le week-end touche à sa fin, on retrouve le site du festival pour une dernière journée qui affiche complet. En même temps, avec Mark Knopfler en tête d'affiche, c'est plutôt logique. Un seul autre concert est au programme et va se dérouler sous le chapiteau, il n'y aura donc que peu d'animations du côté de la scène Village ce soir. Alors direction le chapiteau à pour assister au show d'Albert Lee.

Entrées, GES 2019

 

Albert Lee


Initialement prévu à 20h mais avancé d'une heure pour permettre un plus long set au fondateur de Dire Straits (on va voir que ce n'était pas forcément nécessaire), le concert d'Albert Lee commence donc sous une tente encore bien clairsemée. Mais peu importe, le guitariste aux airs de Louis Bertignac se lance et entame sa setlist. En carrière depuis six décennies, Albert interprète plusieurs titres repris en large partie du registre de la country, un peu du blues ou encore du rockabilly. Du dansant "Luxury Liner" aux ballades un peu plan-plan "Two Step Too" et "Evangelina", le set se révèle mine de rien plutôt varié. Le temps passe vite, et il faut reconnaître que pour un guitariste de 75 ans, Albert Lee est en forme sur scène. Aucun souci de dextérité ne vient ternir la prestation, même si bien entendu les parties de guitare sont généralement simples. Même constat sur le plan vocal, où on retrouve en plus chaque membre de son quartet en qualité de choriste : c'est propre, simple et efficace pendant les titres les plus énergiques.

Albert Lee, GES 2019

L'averse éclate à l'extérieur du chapiteau, on se sent alors bien content de ne pas être bloqué dehors, et les mélodies relaxantes de "No One Can Make My Sunshine Smile" semblent alors aussi réconfortantes qu'un bon feu de cheminée au fond du salon, par un froid et pluvieux après-midi automnal. On plaint les malchanceux qui n'ont pas encore pu trouver refuge sous le chapiteau où règne alors une bonne ambiance, d'autant plus que le vent commence à se mettre à souffler. Heureusement que rien n'est attendu sur la scène extérieure ce soir.

Albert Lee, GES 2019

Albert lance un petit Ray Charles bien sympa, où solos de batterie, de piano (évidemment) et de guitare s'enchaînent, puis passe au piano pour deux petites reprises de fin de set, mélodiques et plus profondes qu'une bonne part du set précédent. Albert regarde alors sa montre, reprend sa guitare et fait signe au groupe de continuer : on a droit à 15 minutes de rab ce soir. Grand prince, Albert. Au final, alors qu'on n'en attendait pas forcément grand chose, le petit set d'Albert Lee s'est révélé fort agréable en ce dimanche soir, pendant que le chapiteau se remplissait massivement en attendant celui de Mark Knopfler.

Albert Lee, GES 2019

 

Mark Knopfler

 

Et c'est parti pour l'ultime concert du festival, une tête d'affiche fermement attendue puisque nous sommes face au seul jour affichant complet, le grand Mark Knopfler. Encore est-il que nous ne sommes plus vraiment en conditions de festival, et c'est bien dommage. Albert Lee étant la première partie du guitariste écossais sur toute sa tournée, et chacun de ses passages en festival se soldant sur le passage unique de leurs deux prestations, les festivaliers qui ont acquis leur place à prix fort pour ce dimanche 14 juillet ont en fait contracté une place pour le concert de Mark Knopfler, pas pour une journée de Guitare en Scène.

Mark Knopfler, GES 2019

Ça tombe bien, on aura pu voir beaucoup de personnes nous demander qui est Albert Lee durant le passage de ce dernier, preuve que le public ne s'est de toute façon déplacé que pour son icône. Icône qui, après un crieur public annonçant son arrivée, foule les planches en toute simplicité, malgré une idée scénographique bien pensée. En effet, les dix musiciens (tout de même!) présent avec le compositeur, sont tous en fond de scène, portent des couleurs ternes et  ne prennent la lumière qu'à tour de rôle, uniquement lors de passages où ils ont une importance musicale. Knopfler, quant à lui, est bien sûr le devant, en polo à la couleur rose bien vive. Tout est bien calculé pour qu'on le voit bien, et qu'alors qu'on est clairement venu pour lui, il garde une place centrale tout au long du show.

GES 2019, Mark Knopfler

Le show, qu'en est-il? Sans grandes fioritures au delà des lumières, il est simple, minimaliste, se concentre sur la musique. Vont alors s'enchaîner une sélection de titres piochés dans diverses parties de la carrière de Mark Knopfler, de Sailing To Philadelphia à Down The Road Wherever, dernier en date - probablement dernier tout court, rappelons que nous sommes sur une tournée d'adieu -, et de quelques titres de Dire Straits. Chaque musicien est en place, et d'un très bon niveau, tout est interprété avec exactitude et minutie pour des arrangements bien adaptés aux nombreuses personnes présentes sur scène. Place de choix pour le maître de soirée, sa voix et sa guitare, qui de son côté se débrouille comme il peut.

Mark Knopfler, GES 2019

On le constate rapidement, Mark Knopfler est fatigué. Très fatigué, même. Bénéficiant rapidement d'un siège pour ne pas trop s'user, tout semble assez ralenti pour qu'il puisse jouer et chanter correctement. Au niveau du jeu de guitare, on retrouve ces aspérités que l'on adore, notamment dans le son et le doigté, mais dès que les rythmes s'emballent, les inexactitudes font surface. Lorsqu'il peine à placer le riff de "Money for nothing", on se rassure en se disant qu'il alterne généralement son choix de rappel entre celui-ci et "Sultans Of Swings". On n'aurait que trop regretté entendre le célèbre solo diminué, surtout lorsqu'il fut exécuté de main de maître par le guitariste de John Illsley la veille. Chaque fois qu'on l'en entendra un morceau du groupe, d'ailleurs, la comparaison avec la prestation du bassiste, encore fraîche dans nos têtes, est sans égale. 

Mark Knopfler, GES 2019

Niveau voix, si Mark Knopfler n'a jamais chanté, il est en toute logique une version diminuée de ce qu'on lui connait. Éructations diverses, mais articulation prononcée, il ne pousse quasiment plus sa voix, et se concentre sur les paroles de ses textes, toujours bien écrit, qui feront voyager ceux comprenant l'anglais au travers de tous ses contes. C'est d'ailleurs dans ses interventions, souvent longues, qu'il dévoilent anecdotes, toujours légères, et raconte des histoires de sa vie avec panache. Communiant ainsi avec un public qui le connaît bien, les réactions sont unanimes. S'il a du mal à fournir musicalement, au-delà de ses musiciens qui eux font un travail formidable, il offre humainement, et transmet avec humilité son parcours, sa vie. Malgré le calme des morceaux, l'ambiance est électrique, ça hurle, ça célèbre dans la fosse. 

GES 2019, Mark Knopfler

À 69 printemps (ce qui dans le rock reste une preuve de longévité), Mark Knopfler en semble 10 de plus. On sent la fin de carrière, une carrière qui aura été célébrée ce soir avec sincérité. Celle de ses grands qui ont bravé la route quelles qu'en soient les tempêtes (et Mark nous a raconté une sacrée anecdote sur l'une de ces dernières) et qui tentent tant bien que mal de terminer en beauté, d'offrir un dernier tour de piste en conservant la tête haute. Loin d'être honteux dans sa démarche malgré tout ce que l'on a pu citer, Mark Knopfler s'en sort avec les honneurs. Guitare en Scène a encore prouvé cette année qu'il était capable d'avoir une programmation variée et forte de propositions, on attend la prochaine affiche avec impatience !

Mark Knopfler, GES 2019

Texte Albert Lee : Félix Darricau
Texte Mark Knopfler : Thierry de Pinsun

Photos : Luc Naville. Toute reproduction interdite



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