Formé à la toute fin des années 2010, Mush est un groupe tout droit débarqué de Leeds, berceau de nombreux groupes de rock (oui, comme la majorité des villes britanniques) qui a vu naître Kaiser Chiefs, The Sisters Of Mercy, Alt-J ou Pulled Appart By Horses (ainsi que Melanie B des Spice Girls selon Wikipedia, faites ce que vous voulez de cette information). Après un premier EP paru en 2019, le quartette présente son premier album long, qui se veut un opus brut mais avant-gardiste. Arrive-t-il à se démarquer de l’abondante production britannique ?
Chant ( Dan ), doubl e guitare ( Dan et Steve Ty son ), bass e (Grant) e t batterie (Phil Porter), Mush reste sur les basiques du rock en ce qui concerne sa composition. Mais dès les premiers accords de « Revising the fee », le morceau d’ouverture, le groupe instaure sa patte, avec notamment un son de guitare très caractéristique.
Il ne faut pas chercher ni des compositions extrêmement techniques (l’ensemble est bien exécuté mais loin d’être virtuose), ni une agressivité imposante (les guitares sont dans ce titre peu saturées, la batterie pas vraiment mise en avant et ne le sera pas plus sur le reste du disque, meme si les rythmiques sont toujours efficaces), mais cela reste du bon post punk britannique, brut, avec une voix au timbre nasillard horripilant (à dessein, on suppose) et surtout une identité musicale propre, ce qui n’est pas donné à tous les jeunes groupes. Le morceau, en mid-tempo, prend aussi le temps de faire s’exprimer ses musiciens, puisque la dernière minute est entièrement instrumentale et permet des sonorités plus distordues et dissonantes intéressantes.
Le deuxième morceau, « Eat the etiquette », commence comme une ballade, tout en gardant le son distinctif du quartette, avant, à 0’45, d’effectuer un brutal revirement et de repartir sur les traces de la première chanson. Et c’est là qu’on se rend compte qu’on atteint vite les limites du système : avec un style extrêmement caractéristique, le groupe tourne vite en rond, et il semble entendre cinq fois le même morceau de post punk sans concession, avec simplement des changements de rythme d’une piste à l’autre.
Cela commence à changer avec « Fruits of the Happening » : les changements de rythme et le phrasé particulier du chanteur, qui scande plus qu’il ne chante, les guitares plus distordues qu’auparavant, les arrangements qui tendent vers la noise, tout cela contribue à faire sortir le morceau du ronronnement bruyant dans lequel s’était assoupi l’album.
S’ensuit « Hey Gammon Head », un morceau très semblable à la première moitié du disque de prime abord, mais la saturation de la guitare, d’abord très basse, semble augmenter au fur et à mesure que le morceau avance, créant une progression bienvenue qui tranche avec la linéarité des chansons précédentes.
Puis « 3D Routine » offre un rythme assez chaloupé en introduction, avant de faire jouer les contrastes entre une guitare assez lente et un chant rapide très scandé. « Gig Economy » bénéficie de ce vent de fraicheur qui souffle depuis quelques morceaux et nous emporte avec son rythme rapide.
L’album retombe avec les deux morceaux suivants dans la répétition de la première moitié de ce 3D Routine, avant qu’ « Alternative Facts » ne conclue l’album sous forme de ballade qui étire ses distorsions sur plus de neuf minutes.
A l’écoute de ce premier album, Mush semble être un groupe à suivre, à condition qu’il arrive à diversifier sa musique sans renier son identité. Et ce d’autant plus que sous des airs désinvoltes, il aborde tout au long de l’album des thématiques ambitieuses : désinformation, place du travail dans nos vies, inflation des loyers, austérité économique, précarité grandissante des jeunes, débat idéologique entre progressisme et conservatisme, divisions au sein de la nation britannique… Les paroles se veulent politiques tout en refusant une posture manichéenne, ce qui est loin d’être évident pour tout le monde. Reste maintenant à voir si le quartette saura s’appuyer sur ses qualités certaines et se débarrasser de ses défauts pour produire un deuxième album imparable de bout en bout.
Tracklist
1. Revising My Fee 05:36
2. Eat The Etiquette 03:10
3. Existential Dread 02:52
4. Coronation Chicken 02:35
5. Island Mentality 02:59
6. Fruits of the Happening 03:02
7. Hey Gammonhead! 03:41
8. 3D Routine 04:05
9. Gig Economy 02:43
10. Poverty Pornography 03:06
11. No Signal in the Paddock 03:05
12. Alternative Facts 09:04
Sorti le 14 février chez Memphis Industries