Aaaah le punk rock ! Ses riffs énergiques et énervés. Ses crêtes de coq colorées. Sa bêtise et sa lucidité. Sa joie de vivre et sa rage. Ses abus en tout genre liés aussi bien à la joie de vivre que la rage. Son envie de rester un kid. Ses excès pour oublier la vermine qui nous entoure. Son monde, son univers dans lequel on aime tant se réfugier. Ses amitiés, ses histoires d'amour, ses trahisons et disputes parfois digne des feux de l'amour. Cette grande famille que l'on s'est créée et que l'on aime parfois bien plus que celle d'origine. Cette grande famille que l'on quittera uniquement le jour de notre mort...
Cela doit bien faire 20 ans que je suis dans le milieu et que j'y ai fait les plus belles rencontres de toute ma vie. Pendant ces deux décennies, j'ai pu facilement m’apercevoir à quoi ressemblait le punk en Europe ou en Amérique du Nord, plus facile d'accès. Mais je n'ai jamais eu l'impression que l'on s'était intéressé plus que ça au Punk rock hors occident. Ou alors pas des masses...
Mais du coup qu'en est-il du punk rock en orient ? Plus particulièrement en Asie ? Et encore plus particulièrement en Thaïlande ? Et encore plus plus particulièrement à Bangkok ?
On profite d'un road trip que l'on s'est organisé avec Pierre (MA plus belle rencontre dans le milieu) pour s'intéresser au sujet et tenter d'en savoir plus.
C'est parti pour un mois d'aventures à travers le pays !
Arrivés à Bangkok on retrouve les p'tits gars de The Lunatix, dernier né de la scène Siam, composé de Sammy et Clément, anciennement des groupes parisiens Street Poison et Lion's law.
Ils ont débarqué en Thaïlande il y a maintenant 3 ans et s'y sont installés pour de bon. Ils seront nos guides aussi bien pour découvrir et rencontrer les divers protagonistes de la scène Bangkokoise, que pour les bons plans sur le reste du voyage et du pays.
Première soirée et retrouvailles (ouais parce que bon c'est quand même des potes) sur Coco walk dans le quartier de Ratchatewi. Ainsi que les premiers échanges sur la scène autour d'une bière, que l'on poursuivra autour de notre premier repas thaï qui nous fera perdre l'intégralité de notre bouche et 3 litres de flotte... Mais qu'est-ce que c'est bon !
On repart dès le lendemain de Bangkok pour traverser une partie du pays, visiter et découvrir cette culture toute nouvelle à nos yeux. Durant ces trois semaines on fera plusieurs milliers de kilomètres, pris tous les moyens de transports qu'il puisse exister, et rencontrer des personnes adorables et généreuses qui nous auront permis de nous familiariser avec leur culture.
C'est donc imprégnés de ce mode de vie que nous revenons à Bangkok prêts à découvrir la scène punk thaïlandaise !
On commence en affrontant les méandres de Chatuchak Market (le plus gros marché d'Asie !) pour aller à la rencontre de Kay, le proprio d'un des rares shop de goodies punk de la capitale, Crocodile punk Shop ; et de Poowanat, proprio du seul et unique disquaire spécialisé dans le rock alternatif de la capitale, Heaven and Hell.
On peut se dire facile, pratique, tout est au même endroit, c'est cool !
Mais arriver à destination s'avère être une véritable épreuve sortie tout droit de la caboche du diable ! Il faut d'abord comprendre et déchiffrer la logique illogique des allées et sections qui forment ce labyrinthe qu'est Chatuchak... Entre la chaleur et la moiteur tropicale, les allées aussi étroites que les idées d'un partisan d'extrême droite, le monde, les odeurs de cuisine épicée qui vous font saliver en permanence, passer des stands de fringues à une foire aux bestiaux puis un vendeur d'épices, il n'est pas facile de se concentrer pour retrouver son chemin. Mais après une bonne galère et une pause Pad thaï pour reprendre des forces, on trouve enfin les deux shops qui nous intéressent.
On arrive au Crocodile punk Shop, où on est accueilli par un punk, la quarantaine approchant, très souriant et chaleureux, avec un fond sonore passant de Total Chaos à The Misfits. Le magasin est tout petit mais il y a des goodies absolument partout ! Les murs sont recouverts de patchs, des sacs et des t-shirts de groupes pendouillent dans tous les sens, bracelets de force et ceintures cloutées s'exhibent à tout va. Un véritable capharnaüm de la culture underground !
Le shop existe depuis maintenant 12 ans et a toujours été localisé au Chatuchak Market (ouvert uniquement le samedi et le dimanche).
Kay est l'un des tous premiers punks de Bangkok. La scène de la capitale il l'a vu évoluer depuis le début, il a grandi avec.
Sa découverte de la musique punk remonte à une vingtaine d'années.Il nous explique que quand il avait 15 ans on le regardait bizarrement dans la rue. Les gens se retournaient sur son passage et lui demandaient si il n'était pas le Joker ! Il répondait qu'il écoutait du punk mais personne ne savait ce que c'était. Du jamais vu pour eux ! Maintenant avec internet et les réseaux sociaux les gens sont plus au courant de ce qu'il se passe dans le monde et ne font plus de réflexion sur sa dégaine.
Et puis, avec le temps et les nouveaux médias, le mouvement au sein de la ville s'est développé. Selon lui Bangkok doit compter quelque chose comme 300 punks, une petite trentaine de skinheads et à peu 30 groupes locaux dans tout le pays. Il y a beaucoup de punk rock et street punk. Du Hardcore, un peu de Oï. Et il y a aussi un ou deux groupes de Rockab'. En revanche pour le ska et le ska punk on repassera ! A moins d'aller dans le Nord du pays ou dans les îles.
Il y a en moyenne un ou deux concerts par mois à Bangkok. Beaucoup de groupes locaux qui jouent mais aussi quelques groupes occidentaux. Il se souvient par exemple du concert de Total Chaos qui a eu lieu le mois avant notre rencontre et celui de Jenny Woo qui aura lieu une semaine après notre départ... Dommage pour nous !
A l'inverse les groupes locaux jouent aussi à l'extérieur du pays mais c'est beaucoup plus rare et ça reste principalement en Asie (Chine, Singapour, Malaisie) et quelques fois en Allemagne. Mais pour ça il faut que les organisateurs ne soient pas thaïs. On suppose qu'il s'agit d'une question de budget.
Il nous met entre les mains une compil du label Punk Rock BKK, Siam Underground.
Il s'agit du volume 2 qui regroupent que des groupes thaïlandais et essentiellement de Bangkok. Pas mal de petites perles à découvrir, pile ce qu'il nous fallait !
Le shop lui donne pas mal de boulot. En dehors des weekends où il fait l'ouverture, il doit s'occuper de refaire les stocks et parfois même partir en Chine pour ça. Il aura réussi à allier boulot et passion, ce qui n'est pas donné à tout le monde d'une manière générale mais encore plus en Thaïlande.
Il est temps de se dire au revoir. L'échange fut plutôt court car nous avons tous beaucoup de travail mais très intéressant et agréable. La gentillesse incarnée !