Le troisième album des Hollando-turcs d'Altin Gün, Yol, sort le 26 février. En 12 morceaux, les six artistes nous font faire un tour complet de tous les styles de musique qu'ils affectionnent : entre les synthétiseurs des années 80 et le folklore oriental, la batterie rock et le chant lyrique, pourquoi faudrait-il choisir ?
Si cet album est légèrement différent de leurs productions habituelles, c'est surtout parce qu'il a été enregistré différemment, en plus de l'ajout de synthé clubbing un peu partout. En effet, chacun des membres envoyait ses démos aux autres, en travail à distance, et chacun ajoutait ses parties au travail de groupe. Un process PtoP disruptif quoi.
À l'ancienne, le disque s'ouvre sur trente secondes d'intro chantée d'une voix vaporeuse sur des arpèges de guitare sèche, avant de laisser place, après un vrombissement autoroutier, aux vibrations redoutables du premier morceau, « Ordunun Dereleri ».
On avait déjà repéré ce single, remix au synthé d'une chanson traditionelle turque. Le morceau monte progressivement en intensité le long de la rythmique d'intro, puis laisse place au chanteur Erdinç Ecevit Yıldız qui pose sur cette ligne solide un chant léger et mélancolique. S'intègrent alors les percussions, qui égrènent leurs petites notes lancinantes, puis les boucles au clavier, et on termine en revenant à la simplicité du début, poum-poum.
Pas le temps de digérer cette pépite que tressautent les boucles électroniques rétro de « Bulunur Mu », sur la voix franche de Merve Dasdemir. Mais aussitôt après, nouveau retournement de situation, percussions, batterie, et baÄŸlama pour un morceau plus folklorique avec « Hey Nari », directement inspiré des sonorités orientales modernisées à la cymbale.
Et nouvelle alternance avec claps et réverbérations, effets de sythés des années 80 sur « Yüce DaÄŸ BaŠŸÄ±nda », un morceau complètement pop qui mérite son clip foutraquement décalé.
On entend même des pépiements d'oiseau, sur les percussions et les claps très rythmés de « Kesik Çayır », qui fait progressivement monter des chœurs pour nous entraîner dans une transe foisonnante, avant de nous redéposer en douceur, en laissant petit à petit les sons se raréfier.
Petit intermède à base de clochettes pour flipper la galette, et on repart dans l'électro rythmée et les chants langoureux.
Un petit côté jazz nous fait rouler des hanches sur « Kara Toprak », la voix suave de la chanteuse rend l'atmosphère moite, et la boîte à rythmes laisse la place au louvoiement discret, on se damnerait pour un petit collé-serré comme si on avait encore accès aux lieux de sortie.
Allons, on se redresse, un peu de tenue, place au luth et aux distorsions dignes d'un thérémine, les traditions anatoliennes n'ont jamais été aussi modernes, on a envie de virevolter jusqu'au tournis avec « Maçka Yolları », et son petit frère direct « Yekte ».
On termine en douceur avec les percussions épurées d'« Esmerim Güzelim », dont le rythme chaloupé nous berce tendrement afin de nous dire au revoir.
On ressort de cette écoute complètement azimuté des tympans, pas un seul cil auditif n'ayant été négligé durant l'expérience. Güzel!
Sortie le 26 février chez Glitterbeat / Modulor