Wooden Veins – In Finitude


Rendre le doom moins pesant, est-ce possible ? Cela semble évidemment paradoxal, tant c'est une des caractéristiques intrinsèques de ce genre. Les Chiliens de Wooden Veins y arrivent pourtant, et leur premier album vient donner un nouveau souffle au genre, s'y ancrant sans jamais s'y enfermer.

Le metal sud-américain est comme le vin de ce continent : on y trouve une très bonne production, mais elle n’est pas toujours assez connue du grand public. Côté metal, voici donc Wooden Veins, un quartette chilien qui sort son premier album. Les membres n’en sont pourtant pas à leur coup d’essai, puisque les trois instrumentistes sont passés par plusieurs groupes de doom de leur scène nationale. Pour le chanteur Javier Cerda, il s’agit en revanche d’une première, mais son livre Poética de Arturo H. Lobo a servi de base pour les paroles du premier album In Finitude.
 

Le résultat est des plus enthousiasmants. Les bases doom se font clairement sentir, même si le son est moins lourd et moins agressif que du doom pur. Se retrouvent cependant une pesanteur propre au genre, sans aller jusqu’à l’oppression, et une mélancolie latente. L’ensemble est lent, assez planant, et mixe des ambiances atmosphériques avec une basse et une guitare rythmique (Juan Escobar, qui s'occupe de toutes les cordes) souvent plus graves, plus lourdes, plus typiques du metal. La guitare peut aussi se lancer dans des riffs tranchants, ou adopter des motifs qui évoquent le desert rock. La batterie (Alberto Atalah) est aussi très agile, passant d’un jeu qui souligne la dimension planante des morceaux à des parties beaucoup plus agressives qui tranchent avec le paysage sonore déroulé. Le clavier (tenu par le fondateur Eduardo Poblete), s’il est très présent, n’accapare pas le devant de la scène, il reste au contraire discret, travaillant plus les ambiances et laissant les autres instruments se mettre en avant. Quant au chant, on peine à croire qu’il s’agisse de l’œuvre d’un débutant. Quasi exclusivement en chant clair, la voix de Cerda passe avec facilité des registres les plus graves aux plus aigus, avec une technique notable. Celle-ci confère en effet à sa voix une approche très cérémonieuse dans ses envolées aux extrémités du spectre sonore, une solennité qui la rapproche d’une certaine façon des chants d’église. C’est particulièrement notable sur « Mirages », morceau par ailleurs prenant à tous points de vue, et sur le morceau de clôture éponyme.
 


Et tous ces éléments sont agencés de façon très ingénieuse, avec par exemple de la double pédale sur des passages très lents, guidée par des guitares desert rock, faisant osciller le morceau entre torpeur et agressivité (« Beyond Worlds », particulièrement réussi). Aucun titre n'est en-dessous des autres, et si les morceaux peuvent parfois sembler trop homogènes pour réussir à les distinguer, cela participe aussi de l'expérience sonore proposée, l'album happant l'auditeur dans un voyage dont la destination importe peu mais survient trop rapidement. Difficile de classer cet album, on pourrait tenter de le qualifier de light doom atmosphérique, mais cela n'a aucun sens, et au fond, les étiquettes importent peu. Le groupe se définit comme une formation d’avant-garde metal, et si cela peut sembler excessif – la formation tire plus son originalité de la façon d’assembler ses ingrédients que de sonorités novatrices en elles-mêmes, elle a indéniablement trouvé dès son  premier album une identité propre et marquante.
 


Tracklist:
1. Thin Shades
2. Beyond Words
3. Herradura (by the sea)
4. Mirages
5. The Veiled Curse
6. Invern
7. Empty Arcs
8. In Finitude

Sorti le 4 juin chez The Vinyl Division

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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