Rage et maturité
Machine Head revient avec son huitième album studio, Bloodstone & Diamonds, qui démontre encore une fois un groupe en pleine maîtrise de son talent, malgré le départ récent d'un de ses membres fondateurs. La rage est toujours présente, sous forme moins explicite et plus maîtrisée. Robb Flynn et sa bande sont plus mûrs dans leur approche et servent un disque de qualité.
Robb Flynn, comme de nombreux artistes, n'aime pas les étiquettes. L'appellation "thrash" de son groupe Machine Head par de nombreux fans ne lui convient pas, il préfère dire que Machine Head a trouvé "sa propre niche". Cela s'applique plus que jamais à Bloodstone & Diamonds, qui contient sans ambiguïté l'identité du groupe, tout en s'éloignant drastiquement du thrash.
Cet aspect se ressent dès les premières notes de "Now we Die", titre d'ouverture de l'album. Si l'ensemble de cordes, qui prend ici bien plus d'importance que sur Unto the Locust, éloigne bien le groupe du thrash, Machine Head ne se transforme pas en groupe de metal symphonique pour autant et transpire toujours autant la rage, avec les vociférations immédiatement reconnaissables de Robb Flynn, qui n'a pas non plus oublié d'améliorer également son chant clair.
Cet éloignement du thrash ne se ressent pas uniquement dans les arrangements, mais aussi dans les tempos utilisés, bien moins élevés que dans Unto the Locust et les autres albums du groupe. Quelques accélérations se font sentir dans "Killers & Kings" ou "Night of Long Knives", mais le disque reste globalement mid-tempo.
Cependant, la colère est loin d'être partie. Au contraire, le groupe ne manque pas de taper du poing sur la table avec l'épique "Eyes of the Dead" ou les sulfureuses "Night of the Long Knives" et "Game Over". Mais Machine Head varie les plaisirs et les émotions de manière encore plus criante sur Bloodstone & Diamonds, avec "Sail into the Black" et ses airs de marche mortuaire, prend des allures tragiques sur "In Comes the Flood" et ses choeurs désespérés et n'oublie pas les mélodies accrocheuses sur "Take me through the Fire" et "Now we Die".
Le remplacement d'Adam Duce par Jason McEachern n'a pas provoqué de changement majeur dans le son du groupe. Le nouveau bassiste reste à sa place dans le mix, consolidant la rythmique destructrice de Dave McClain, et assure avec brio les choeurs. Le reste du groupe est en place, avec un Phil Demmel qui garde une maîtrise des solos dont il a le secret, même s'ils sont moins mis en avant sur ce disque. Les structures changent un peu, mais ses leads restent délicieux. Les riffs de Robb sont toujours aussi immédiats et accrocheurs.
Avec Bloodstone & Diamonds, Machine Head continue sa mue et se montre sous un jour plus mûr, plus adulte dans son approche de la musique. On peut regretter quelques longueurs (l'album fait plus d'une heure dix) et deux titres en deça de l'ensemble : "Killers & Kings", single convenu et facile, et "Beneath the Silt", compo molle qui ne va nulle part. Hormis ces deux faux pas, le groupe se délecte avec des compositions fouillées et travaillées, garde son identité mais refuse de refaire deux fois le même album. La marque des grands.