Une chose est certaine, les fans de Pain of Salvation ont dû prendre leur mal en patience avant de pouvoir écouter du nouveau matériel. En effet, le dernier réel album de la formation suédoise, Road Salt Part II, remonte déjà à 2011, tandis que Daniel Gildenlöw (chant/guitare) et ses compagnons d'arme nous ont fait patienter avec l'opus de relectures acoustiques Falling Home (2014). La surprise de ce nouvel album est d'autant plus grande que Pain of Salvation semble revenir à des sonorités plus agressives, délaissées depuis Scarsick (les Suédois ayant entre temps opéré un retour vers des productions plus vintage). Avec In the Passing Light of Days, Pain of Salvation frappe fort et parvient à opérer un retour aux sources sans renier chaque période de sa féconde discographie.
Après le diptyque Road Salt, les amateurs du combo suédois pouvaient douter de l'envie de son maître à penser, Daniel Gildenlöw, de revenir à des sons plus rugueux et bruts, tels que ceux présents sur Entropia ou One Hour By the Concrete Lake. Pourtant, ce sont bien des guitares puissantes, évoquant presque les polyrythmies à la Meshuggah qui ouvrent ce nouvel album ("On a Tuesday"). Dès les premières notes, l'auditeur ne peut que constater que Gildenlöw a retrouvé une écriture rageuse, peut-être moins ciselée que sur Be ou Remedy Lane, mais tout aussi efficace. La polyrythmie précédemment évoquée permet de mettre en avant le jeu de batterie de Léo Margarit, qui propose des plans inventifs, notamment sur "Full Throttle Tribe", faux jumeau de "Rope End" (Remedy Lane), alors que la basse vrombissante de Gustaf Hielm (ex-Meshuggah) ne peut que faire songer à son ancien groupe ("Reasons").
Pourtant les mélodies et la subtilité présentes sur les deux Road Salt ne sont pas oubliées, notamment sur "Tongue of God" ou la délicate introduction de "Silent Gold" (le titre se rapprochant le plus de Road Salt). De même, le single "Meaningless" est un bijou de composition, avec un couplet presque jazzy et un refrain mélodique dont l'air entre instantanément en tête pour ne plus en ressortir. Une sorte de "Ashes" (The Perfect Element) des années 2010 en somme.
Pourtant, tout l'opus n'est pas qu'un clin d'oeil à l'illustre passé de la formation suédoise. On retrouve des éléments nouveaux, tels que ces voix harmonisées sur l'introduction de "Reasons", évoquant un Gentle Giant du XXIè siècle, ou ces sons de guitare dissonants par instants ("On a Tuesday"). De même, le travail sur les voix est toujours aussi poussé, notamment concernant la complémentarité des timbres de Daniel Gildenlöw et de Ragnard Zolberg (guitare, chant). Si chacun des membres du combo s'illustre tout au long de l'album, le leader, quant à lui, est toujours présent pour poser sa voix sur des instrumentaux sombres, tantôt susurrant ses textes habilement écrits ("Angels of Broken Things", "The Taming of a Beast"), tantôt hurlant de façon déchirante ("Reasons"), mais toujours habité.
Autre surprise de taille, on notera la présence d'un solo de guitare déchirant sur le très beau "Angels of a Broken Things", exercice peu mis à l'honneur chez Pain of Salvation, mais qui confère pourtant à certains titres une affection particulière chez les fans (sans exhaustivité "Iter Impus" sur Be, "People Passing By", "Nightmist" et "Void of Her" sur Entropia, "King of Loss" sur The perfect Element, ou encore "This Heart of Mine" sur Remedy Lane). Ici, ce nouveau solo de guitare apporte un réel plus au titre, et lui donne d'ores et déjà le statut de classique du groupe.
Si l'on devait formuler quelques reproches à cet opus, cela concernerait peut-être le titre "Taming of the Beast", un peu trop classique et simpliste pour du Pain of Salvation, et pourtant diablement accrocheur. De même, on peut trouver l'introduction de "The Passing Light of Day" un peu longue à démarrer, même si cela permet de poser l'ambiance de ce morceau, comme l'avait fait "Enter Rain" (Scarsick) en son temps.
Avec In the Passing Light of Day, Pain of Salvation réalise un nouveau chef d'oeuvre qui, sans renier la direction prog vintage prise par le groupe avec Road Salt, évoque les débuts plus violents de la formation. Les Suédois pourront ainsi sans nul doute réconcilier les fans de la première heure, qui ne jurent que par Entropia et The Perfect Element, avec les nouveaux auditeurs ayant été séduits par Scarsick ou Road Salt. Pain of Salvation prouve avec cet opus qu'il n'a jamais perdu ce qui a toujours été sa plus grande force depuis Entropia : sa créativité et le talent de son leader à se dévoiler et à transmettre ses émotions.
Sortie prévue le 13/01/2017 chez Inside Out
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