Pour les anciens, Firepower est un bain de jouvence qui nous ramène loin en arrière à bord d’une DeLorean DMC-12 rutilante entre British Steel et Defenders of the Faith. Pour les plus jeunes, Judas Priest est loin de représenter un groupe de retraités qui n’a pas envie de compter ses « points retraites metal » tellement les Anglais viennent de découvrir au travers de l’album l’élixir de la jeunesse éternelle (l’actualité concernant Glenn Tipton nous prouve hélas le contraire).
On commence par les riffs de « Firepower » : que dire si ce n’est que du pur jus, du British Steel dépoussiéré avec le son d’aujourd’hui où Rob Halford excelle en jouant de sa voix… The Priest is really back !…. les solos sont splendides et ravageurs. Dans le basique et le guerrier, on a aussi son répondant et brulant « Flame Thrower » principalement basé sur un refrain qui s’ancre dans le limbique droit où Rob excelle avec cette montée de gamme et ces différentes nuances, criant sur la fin du titre…
Quant au premier single, « Lightning Strike », il lorgne vers les meilleurs titres de Screaming for Vengeance. La voix est magistrale, équilibrée, pure, les riffs sont acérées. Que dire concernant la voix de Rob avant le mini break, suivi du duo de solos commençant par des twin guitares qui vont se séparer vers un dialogue de quadruple croches entre Glenn Tipton et Richie Faulkner des plus réussis.
La réussite de Firepower tient aussi à la variété des ambiances que l’on croise au travers des titres. « Evil Never Dies » possède un gros riff insidieux, suivi d’un refrain accrocheur et malsain. La voix de Rob Halford y est puissante et le titre sonne étonnamment d’actualité : break acoustique calme avant que le chant ne revienne, avant une attaque priestienne du plus bel effet. L’usine à riffs de Birmingham est de retour, les solos sont tronçonnés à la chaine. Magistral !
L’intro de « Never The Heroes » vous rappellera surement la période Turbo mais rapidement le morceau va se transformer à travers un rythme mid-tempo puissant et d’une voix calme proche d’un « Blood Red Skies » à l’ambiance pesante. Accoutumance garantie. Savoir faire monter la mayonnaise, monter en gamme, arriver à un pond pour ensuite balancer les premiers solos : c’est ça l’essence même des Anglais. C’est un gros morceau, tout comme « Spectre » où le riff graisseux vous enlise jusqu’aux genoux. Plus loin sur l’album, passé « Guardians » qui fait office d’intro (jouée au piano par Glenn), on retrouve une certaine sagesse dans la rythmique de « Rising From Ruins », toute en retenue avec des riffs majestueux et une voix qui sait prendre le temps. C’est un titre classique pour Judas où l'on décèle des guitares électroniques qui restent très en retrait mais qui n’empêchera pas le tandem de bretelleurs de nous enchanter par de somptueux solos. « Lone Wolf » est assez original pour le Priest, encore plus lourd, très doom proche d’un Black Sabbath, tout comme « No Surrender » et son rythme accrocheur à contre temps, morceau assez surprenant pour les Anglais.
On change de registre avec l’attaque rapide de « Necromancer » qui ne laisse pas insensible : les voix lointaines y sont envoûtantes. Le titre ne laisse pas de respiration. Rob est possédé sur le titre déjà culte. Entre refrains, solos et voix étourdissante on en prend plein les ouïes comme sur « Traitors Gate » : grosse émotion avant que peut-être les plus beaux riffs du metal n’arrivent en vous transperçant les pores de la peau. Dommage que le refrain ne suive pas malgré de sublimes solos et un retour de chœurs virils.
« Children of the Sun » a une intro assez rock, posée, assez américaine. La voix scandée pose les bases de la ligne musicale. Le break acoustique est de toute beauté, quant à la voix elle nous ramène vers les plus grands moments du Priest tel un « Victim of Changes ». Le Metal God en a encore sous le pied. Ils ont dû prendre du plaisir à le faire avant de balancer des solos tous plus beaux les uns que les autres.
Le dernier titre, « Sea of Red » commence par une belle intro de guitares, avant que Rob s’impose tout en nuance. Ensuite la voix tombe dans un drôle de rythmique assez étonnante, on commence à s’ennuyer (enfin) avec trop de lignes vocales qui se croisent avec des chœurs assez dispensables.
A travers Firepower, la déflagration se démultiplie jusqu’à la fin de l’écoute ; les rythmiques nous auront tenu en haleine, les riffs et les solos nous auront transcendés et jamais la voix de Rob n’aura été aussi puissante et bien travaillée depuis très longtemps.
La musique de Judas Priest reste toujours mécanique et organique tel un mutant impitoyable qui au-delà de la musique traverse le temps et l’espace pour défendre le metal sans qu’un point de rouille ne vienne stopper la machine.
Lionel / Born 666
Sortie prévue le 9 mars chez Epic Records