Trivium – What The Dead Men Say

Les années 2010 ont assisté à un Trivium assez inégal dans les critiques entre un In Waves vraiment apprécié des fans, un Vengance Falls qui a un peu déçu et un Silence In The Snow décrié suite à des problèmes vocaux rencontrés par Matt Heafy (et par conséquent, l’utilisation de sa voix claire, chose à laquelle n’étaient pas habitués les fans). Le dernier album, The Sin and the Sentence, était déjà plus prometteur avec un retour aux sources et une voix plus criarde de Matt, bien que nous nous soyions habitués à sa voix claire,  très juste et belle. Pour le début des années 2020, le petit dernier, toujours chez Roadrunner Records, What The Dead Men Say, est-il à la hauteur des attentes de ses auditeurs ?

Trivium a une fois de plus travaillé avec le producteur Josh Wilbur. Paolo Gregoletto,le bassiste du groupe, nous confie que "Josh est quelqu’un de très doué et très professionnel. Son opinion est importante pour nous. Il est comme le cinquième membre de notre groupe lorsque nous sommes en studio." Et d’ajouter sur la façon de travailler sur cet album : "Nous avions une trame pour tous les morceaux avant d’entrer en studio, mais ça se modifie toujours. Nous avons fait trois sessions pendant lesquelles nous travaillions à chaque fois sur des morceaux différents : la première session pour trois - quatre chansons que nous travaillions, que nous modifions et remodifions jusqu’à ce que ça soit bon ; la session suivante avec d’autres morceaux et ainsi de suite".

What The Dead Men Say est aussi le nom d’un roman de Philip K. Dick, mais Paolo nous précise que le titre de l’album n'est pas en rapport avec ce roman de science-fiction. Concernant les thèmes abordés dans les différents morceaux, il explique que "quand nous écrivons des chansons, nous nous basons un peu sur tout, sur ce que nous avons entendu, vu, etc. Nous sommes ouverts à ce qu’il se passe dans le monde". En parlant d’actualité et concernant l'épidémie actuelle de covid-19, il estime  "qu’il est plus prudent de suivre ce que les autorités médicales préconisent. Il va bien sûr y avoir plusieurs concerts et événements annulés à cause du virus, pour éviter sa propagation, mais je pense qu’il vaut mieux annuler quelques concerts maintenant et attendre que la situation redevienne plus calme, plutôt que continuer comme ça et dans l’avenir être obligés d’annuler bien plus de choses. Il ne faut pas prendre ça à la légère, ne serait-ce que pour l’avenir", explique le bassiste d'origine italienne dont une partie de la famille vit toujours dans le Nord de l'Italie.

Si l'épidémie a marqué un coup d'arret pour les tournées actuelles, nous retrouverons sûrement Trivium en tête d’affiche en Europe dans les prochains mois, ou en 2021 au vu des circonstances actuelles. Paolo nous avoue aimer la France et l’Allemagne qui sont "des pays où le metal est devenu autre chose que juste une musique underground, quand on voit les festivals que vous proposez, qui font partie des plus gros festivals du monde. C’est vraiment cool de venir ici".

Mais au fait, Trivium en tournée, ça donne quoi ?  Paolo nous répond : "Nous faisons beaucoup de choses en tournée, nous aimons flâner un peu sur les réseaux sociaux, sur lesquels nous sommes très actifs. Nous aimons manger de la bonne nourriture et boire de bonnes boissons. Quand nous pouvons, nous visitons la ville dans laquelle nous nous trouvons. En fait ce que nous aimons le plus c’est juste passer du temps tous ensemble". Mais le soir après les concerts, qu’est-ce qu’ils peuvent bien faire ? "Nous sommes plus le genre de groupe à nous coucher tôt. Peut-être qu’au début de notre carrière quand nous étions plus jeunes nous faisions plus la fête, mais maintenant que nous sommes un peu plus vieux, et qu’en plus nous faisons beaucoup de tournées en tête d’affiche avec des concerts qui durent 75 voire 80 minutes, nous n’y arrivons plus tout simplement. D’autres groupes y arrivent sûrement mais nous nous n’aimons vraiment pas nous réveiller avec une gueule de bois ou être fatigués au moment de jouer".

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Mais en attendant la future tournée, voici déjà le nouvel album. Le premier titre instrumental "IX" entame un début de réponse à la question posée en introduction avec un mélange d’acoustique et de thrash à un rythme crescendo qui est assez prometteur. Et effectivement l’album sera à nouveau ponctué de moments metalcore, thrash ou heavy que le groupe sait bien mêler.

La présence d’un de ces genres n’est pas inhérente à tel ou tel morceau, mais chacun pioche dans des styles différents. "The Defiant" par exemple comprend des rythmes au tempo assez rapide propres au thrash dans les couplets mais des riffs plutôt heavy metal dans son refrain mid-tempo. Concernant la voix, ça passe du chant clair de Matt Heafy au chant hurlé du guitariste Corey Beaulieu, tel un bon morceau de metalcore. On retrouve ce style de compositions sur des morceaux comme "Bending the Arc to Fear" ou "Catastrophist", que le groupe nous a présenté au travers d’une vidéo de plus de sept minutes fin février.

Les soli sont très propres, on pensera notamment à la partie de solo suivie de son riff dans "Among the Shadows and the Stones", juste avant un break et des blast beats thrash d'Alex Bent sur sa batterie, batterie qui est toujours aussi présente dans les compositions ; l’oreille ne peut qu’être satisfaite de ces résultats.  Ce morceau est un des plus rapides de l’album, "je suis beaucoup inspiré par le death et le thrash metal. J’aime bien quand ça va vite, et on retrouve ça dans Trivium. Je ne verrais pas du tout les morceaux de Trivium plus lents, il y a un besoin pour que ça soit toujours rapide. C’est pour ça qu’on s’inspire beaucoup du thrash, Trivium est un mélange de death et de thrash avec une touche un peu plus heavy, mais il faut que ce soit rapide" nous dit Paolo qui nous précise beaucoup aimer le groupe de death thrash Power Trip. Mais ils ne s’inspirent pas directement d’autres groupes, plutôt des "nouveaux styles qui émergent sans arrêt".

On notera la production excellente de cet album nous permettant de nous délecter des lignes de basse de Paolo ; celles-ci ne sont ni mises en arrière-plan, ni étouffantes. L’intro à la basse de "Bleed Into Me" est plaisante, mais on aurait aimé qu’elle soit plus longue pour que la basse soit plus mise en avant. Il explique à ce sujet : "Je n’ai pas forcément voulu mettre la basse en avant, Josh non plus. C’est juste que quand j’enregistre en studio, j’essaie d’être le plus précis possible, d’avoir le bon son, et le plus souvent ça suffit, il y a beaucoup moins de mixage à réaliser sur mon instrument."

Côté chant, c’est une véritable panoplie de styles à laquelle nous avons affaire dans cet opus, comme dans le précédent. En effet, on retrouve le chant clair et juste de Matt sur des morceaux comme "What The Dead Men Say", "Bleed Into Me" ou "Scattering The Ashes", morceau qui d'ailleurs représente une baisse de régime du groupe dans cet album, peut-être un choix de morceau diffusable à la radio. Sa voix se fait de temps en temps plus éraillée et criarde dans des morceaux comme "Catastrophist", "The Ones We Leave Behind" ou "Sickness Unto You". Le chant plus death est également bien présent dans cet album : en voix principale dans "Among The Shadows and the Stones" ou en chœur, interprété par Corey, dans "The Defiant". Enfin, Paolo accompagne de temps en temps Matt au chant sur quelques morceaux comme par exemple "What The Dead Men Say". A la question concernant des cours de chant il répond : "J’ai pris quelques cours il y a très longtemps quand j’étais jeune mais sinon non je ne travaille pas autant que Matt, qui de toute façon est le chanteur principal, sa voix est celle qu’on entend le plus. Non, je fais quelques vocalises de temps en temps, et j’essaie de garder une vie assez saine pour que ma voix ne me lâche jamais".

Dans la lignée de son prédecesseur The Sin and the Sentence, What the Dead Men Say est un album très bien composé qui mélange bien les genres metalcore, thrash ou heavy, où on retrouve un Matt Heafy à la voix puissante. On espère maintenant que ce n’est que le début d’une pente remontante.

Tracklist
01. IX
02. What The Dead Men Say
03. Catastrophist
04. Among The Shadows And the Stones
05. Bleed Into Me
06. The Defiant
07. Sickness Unto You
08. Scattering The Ashes
09. Bending The Arc To Fear
10. The Ones We Leave Behind

Sortie le  24 avril chez Roadrunner

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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