C’est après plus de quatre années d’absence que Eths revient sur le devant de la scène avec son nouvel album III sorti aujourd’hui même chez Season of Mist ! Successeur d’un Tératologie très bien accueilli par les médias et fortement acclamé par les fans; le vidéo clip du single "Adonaï" tiré de l'album n’a cessé d'interroger quant à l’évolution du groupe.
L’une des premières craintes des fans était de savoir comment Candice allait exploiter sa voix. Outre les nombreuses rumeurs passées sur internet, beaucoup furent surpris par la dominante de chants clairs sur le nouveau single. Les mêmes seront sans doute paniqués par "Voragine", la piste d’ouverture dans laquelle le chant s’immisce d’avantage entre deux lourdes séquences gutturales. Un chant clair mieux maîtrisé, mais qui souffrira d’un manque certain d’assurance. En effet, Candice semble tout axer sur son timbre de voix fluet et enfantin plutôt que sur sa solidité technique. Les deux démarches ne sont pourtant pas incompatibles avec l’esthétique artistique ciblée et auraient peut-être même pu éviter aux lignes de chant de se heurter au gros effort de production réalisés sur cet album. Production, à ce sujet donc, impeccable, signée Fredrik Nordström, au studio Fredman (connu pour avoir collaboré avec Arch Enemy, In flames). Cette relative faiblesse du chant se trouve cristallisée sur "Harmaguedon" : un morceau d’une incroyable force et redoutable d’efficacité, où les lignes claires viennent s’effondrer par endroits sous une piste instrumentale beaucoup trop massive. Mais rassurez-vous, même si le chant s’inscrit de manière plus nette dans les compositions, Candice susurre et gueule toujours autant qu’avant avec une palette d’harmoniques bien plus large et beaucoup mieux exploitée (Du gros growl bien gras au scream plus strident).
La carte tirée lors de la composition n’était sans doute pas celle de l’urgence adolescente comme ce à quoi nous avait habitué le groupe. Eths nous offre là un album plus conceptuel dans lequel les titres prennent d'avantage le temps de se développer et de s’inscrire. Un album qui délaisse un peu les ambiances glauques des débuts au profit d’une atmosphère à la fois sombre et sensuelle, posée sur une musique beaucoup plus tribale (à l’image de la pochette). Certains passages comme la fin de "Prosperina" en viennent même à faire écho de près ou de loin aux chemins explorés par Septic Flesh sur son dernier album.
L’orchestre philarmonique de Prague a été ici sollicité; et son utilisation, bien que discrète, renforce efficacement les teintes posées par la dominante théologiques/mystique/ésotérique des titres (Adonaï qui est l’un des noms de Dieu dans le judaïsme, Prosperina, divinité Romaine, Hercolubus, la planète rouge ; et plus amplement, le nom de l’album en probable référence à la Trinité Divine).
Les fondations caractérisant la musique et le son du groupe restent cependant inchangées. En écoutant cet album on reconnait la patte musicale de Eths. Les compositions jouissent toujours de riffs gras et lourds, rythmés par un jeu de batterie redoutable qui sait décupler son énergie quand le reste du quintet hausse le ton. L’auditeur pourra cependant être déstabilisé par la disparité de l’album puisqu'il met un petit moment à décoller (les pistes plus éthérées se retrouvent en tête de liste devant d’autres morceaux plus denses et expérimentaux), avant de s’achever sur un frustrant "Anatemnein", qui clôture l’album d’une manière beaucoup trop évasive du haut de ses huit minutes de composition; au risque de laisser certains sur leur faim.
En somme, Eths revient avec une volonté marquée de faire peau neuve. A l’exception du chant Français, III réunit tous les éléments fondamentaux pour partir à la conquête du marché européen .Une chose est certaine, de l’eau a coulé sous les ponts ; le groupe murit et leurs inspirations évoluent se laissant aller à quelques nouveaux essais. Le principal défi pour ce nouvel album, à l’échelle hexagonale, sera de s’inscrire dans la discographie des fans français de la première heure et, bien entendu, comme à chaque fois, de se défendre et d’exister honorablement en live !