Cradle of Filth – Midnight in the Labyrinth

Minuit passé. Le ciel est sombre, tend vers le vert. L'atmosphère est froide et humide. Le cimetière devant moi n'arrange pas les choses. La lune est flamboyante et éclaire l'église au teint livide (et hideux). En m'approchant, je sens une odeur qui m'est familière. Une vieille odeur de maison hantée, de symphonie de l'horreur. A l'entrée, un corbeau s'envole d'un panneau indiquant : « Welcome to the soundtrack of your un-life ». Je décide alors de m'engager pour un aller sans retour probable (mais pas impossible) dans le labyrinthe maudit du berceau d'un groupe bien sale il fût un temps...

« Midnight in the Labyrinth »

Le vent soufflait et ouvrait la porte à un paysage glauque. La cloche de l'église sonnait le début de mon aventure. Un bijou éclatant se présenta à moi. Une créature enflammée, endiablée, me fit signe puis baissa son masque. Émerveillé, enivré par son parfum, j'écoutais ses paroles teintées de poésie grave. Me montrant la voie, la déesse me présenta alors des roses rouges. J'humais les fleurs puis tombais dans la folie. La créature riait aux éclats en s'éloignant dans le noir. J'étais maudit, seul dans cette église hantée. La première page de ce roman aux airs gothique était écrite.

Paniquant, cherchant en vain une sortie, j'enfonça une porte. La nuit était horriblement calme. La lune me fixait, les oiseaux me narguaient. Des voix résonnaient dans ma tête, tel un rite satanico-africain (oui oui !). En courant vers la nuit, j'entendais encore les rires résonner au loin. Je m'enfonçais doucement dans la forêt sombre où le vent soufflait. Repensant à l'épisode que je venais de vivre, je m'enfonçais encore et encore dans l'obscurité. Tout à coup, j’aperçus une silhouette. M'arrêtant au beau milieu d'une forêt infinie, j'étais pétrifié par le cris des loups et des oiseaux. La pression était telle que mes veines semblaient exploser. Cette nature libre et macabre me faisait perdre la tête. A nouveau les chants résonnaient, et la forêt semblait murmurer mon nom...

Cradle Of Filth

Je me réveillais enfin de mon cauchemar. Enfin, c'est ce que je croyais. J'ouvris les yeux et fut pris d'angoisses quand j'entendis au loin cette voix si familière. « Mirror, mirror on the wall, should not grave pleasures be my all ? ». L'église, la forêt, la lune et la créature de malheur... Ca y est, tout me revient. Je bondit de ma chaise et m’enfuis de la pièce. Les chauves-souris soufflaient dans une vague dissonante, mauvais présage accompagné d'une odeur fétide et humide encore une fois familière... Derrière la porte se cachait cette créature sublime, face au miroir : «  For if I shall see thy will be done, grant me the witchcraft of thy tongue ». Elle se retourna vers une baignoire pleine de sang où gisait une jeune femme encore vivante. Le vent soufflait fort dehors, la lune reflétait l'allure menaçante des arbres. Comme parlant à une force suprême, la créature lâcha, en pointant  : «Si le sang est ce que tu désires, démon immonde, je vais te céder cette sorcière ! ». L'orage retentit. La créature s'en alla en riant, les chauves-souris étaient de sortie, et la jeune femme pourrissait là, seule, dans son bain de sang.

Quittant la scène et marchant doucement vers l'arrière salle, j'entendais des cris de douleurs, des râles. Quel spectacle sanglant s'offrit à moi derrière la porte. Des anges reposaient, pleuraient, mourraient, aveuglés par le miroir de Diane, la créature. L'un d'eux, racontait : « Versés dans la misère, nous avons reposé nus dans les ravins les plus sombres. Maintenant le soleil commence son sommeil, nous nous réjouissons, comme des serpents au réveil, enroulés pour s'attaquer à la lumière ». Il me racontait les folies de Diane, maîtresse des lieux. Il me racontait le viol et la ruine des anges.

Deux heures étaient déjà passées, quand je suivais les anges vers la liberté, vers la lueur de la nuit. La brume tombée, les anges devenus ombres s'étaient faufilés dans l'épaisse forêt... Pour tuer. Mais la beauté dormait et les anges pleuraient pour son âme immortelle. Carpathia. Et les étoiles disparaissaient une à une... Seul, dans mon coin, j'observais la tempête approcher. L'obscurité m'appelait à nouveau, les arbres s'agitaient. Diana apparut, surmontée de ses démons. Ils prirent vers la puissante pleine lune. Puis Diana, immortelle, se déplaça avec grâce, enveloppée par la nuit. Ses yeux trahirent les charmes de la lumière désormais sinistre de la lune. Un inquiétant regard hanté.

Les loups hurlaient et le temps s'animait. De l'été à l'automne, la forêt s'agitait, entre horizons verdâtres et lueurs rougeâtres. La pécheresse, qui craignait la lumière du jour, devant se laver de ses péchés, se laissait aller à la messe et sacrifiait le sang de jeunes vierges depuis des lustres, soumise à une force suprême. Mais ce soir, jamais ses rêves ne furent si maniaquement cruels. Secrètement, la créature détestait le regard fixe de ce seigneur.

La nuit folle se déchaînait, et soudain, le crépuscule apparût, enveloppant la créature. Les loups hurlaient la perte de leur reine. Le pâle clair de lune tissait un poétique sort de déclin et de mort. Comme un cauchemar de loup-garou, entre la neige et les feuilles mortes, il n'y avait plus de saison ici. Au grand désespoir, la belle séductrice ne hantera plus ce château. Le crépuscule et son étreinte l'emportait doucement.

« Hear me now ! All crimes should be treasured if they bring thee pleasure somehow. »

Mais son esprit libéré, elle brillait maintenant comme une étoile filante. Son portrait suspendu dans la galerie noir de la nuit inspirait le malaise, demandant à la mort de respirer. Mais son ombre éclairée ne rencontra rien d'autre que le désespoir. Violée de sa foi, elle embrassait désormais les troubles narcissiques gelés sur le visage du miroir. Son âme fut vendue. Et la cruauté lui apportera des orchidées.

Si ce récit est si sombre, c'est qu'il reflète parfaitement l'atmosphère d'un tel album. Sa musique pourrait, effectivement, être sans peine une BO d'un film d'horreur. L'on redécouvre ainsi les plus beaux morceaux de Cradle Of Filth. Dommage (ou tant mieux) qu'un tel disque soit destiné principalement aux fans et aux adeptes des premiers albums du groupe (V-Empire, The Principle Of Evil Made Flesh, Dusk & Her Embrace, Cruelty & The Beast). Le groupe (Dani Filth) aura travaillé pendant 3 ans (notamment avec une Sarah Jezebel Deva plutôt en forme, mais aussi avec The Rat Slice Quartet qui a travaillé sur la BO de Hellraiser) pour un résultat réussi et très intéressant. Amateurs d'atmosphères glauques, de vieux Cradle, sale et flippant, Midnight In The Labyrinth l'occasion de retrouver de vieux souvenirs horrifiques encore intacts, mais poussés encore plus loin et (à peine) remis au goût du jour !

Unna

8/10

Tracklist :

CD 1 (narration par Dani Filth et Sarah Jezebel Deva)
1 - A Gothic Romance (Red Roses For The Devil's Whore)
2 - The Forest Whispers My Name
3 - The Twisted Nails Of Faith
4 - The Rape And Rain Of Angels (Hosannas In Extremis)
5 - Funeral In Carpathia
6 - Summer Dying Fast
7 - Thirteen Autumns And A Widow
8 - Dusk And Her Embrace
9 - Cruelty Brought Thee Orchids
10 - Goetia (Invoking the Unclean)

CD 2 (orchestral)
1 - The Rape And Rain Of Angels (Hosannas In Extremis)
2 - Dusk And Her Embrace
3 - Summer Dying Fast
4 - The Twisted Nails Of Faith
5 - Funeral In Carpathia
6 - The Forest Whispers My Name
7 - Cruelty Brought Thee Orchids
8 - A Gothic Romance (Red Roses For The Devil's Whore)
9 - Thirteen Autumns And A Widow
 

NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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