Interview réalisée par Lionel / Born 666 et Ju de Melon
C’est un Erik Danielsson calme et détendu que l’on retrouve dans un box presse pour réaliser une interview afin qu’il nous parle du prochain album de Watain : The Wild Hunt qui sortira le 19 Août prochain en Europe. L’homme est serein et ce malgré un bruit de fond conséquent dû au concert qui se déroule sur la mainstage…
Ju de Melon : Bonjour Erik et bienvenue au Hellfest afin de promouvoir le nouvel album de Watain The Wild Hunt qui sortira cet été sur Century Media Records. Auparavant tu étais chez Season of Mist. Pourquoi ce changement ? La fin d’un contrat ?
Erik Danielsson : C’était en effet la fin du contrat et on avait fait un point. On avait envie de changer et en même temps, après la sortie de notre DVD Opus Diaboli qui représentait notre quinzième anniversaire et l’histoire du groupe, sorti sur notre propre label His Master's Noise, ce qui était important pour nous et représentait une très bonne expérience. C’était comme une nouvelle étape dans notre indépendance. On avait envie de garder ce label, et Century Media représentait une très bonne opportunité pour nous et on travaille très bien ensemble.
Ju : Vous n’avez pas changé de studio pour l’enregistrer ? Toujours le Necromorbus Studio à Alvik en Suède avec Tore Stjerna. Tu aimes travailler avec lui ?
Erik Danielsson : Oui absolument. Tore s’est toujours occupé de tout enregistrer avec nous dans tous les studios. La seule différence, cette fois-ci, c’est que nous sommes restés dans le studio pendant 4 mois, et c’est un moment très long. On n’avait encore jamais fait ça et on savait qu’on devait aussi bouger sinon on allait s’entretuer, alors on a décidé d’enregistrer dans 4 endroits différents. Donc on bougeait en emportant les équipements du Necromorbus Studio où l’on allait…
Enregistrer en pleine campagne, loin de toute ville avec rien autour. C’était très important cette volonté du groupe de ne pas être perturbé par la vie de la ville. On ne voulait pas être dérangé et rester libre. On a donc enregistré pendant 4 mois dans 4 endroits différents tout en restant tous ensemble. On avait une vie de prêtre comme dans un monastère. C’était une expérience enrichissante et c’est ce qui a permis à l’album d’être ce qu’il est aujourd’hui.
Ju : Est-ce que tous les titres de l’album étaient prêts avant de rentrer en studio ?
Erik : Oui pratiquement, pendant un mois on a travaillé sur le nouveau matériel mais pratiquement tout avait déjà été écrit.
(Rire général, car en fond sonore, on entend « The Final Countdown » d’Europe, autre groupe Suédois jouant dans un autre style de musique)…
Lionel / Born 666 : Je trouve que l’album sonne plus Heavy Metal que vos précédentes réalisations...
Erik : Tu as raison, il y a plus de choses dans cet album. Bon c’est vrai qu’il y a toujours eu des influences Heavy Metal chez Watain. Depuis qu’on a crée le groupe il y a 16 ans, on a eu l’occasion d’écouter beaucoup de groupes comme Judas Priest, Metallica aussi bien que Bathory et Mayhem. C’est donc une étape logique pour nous.
Lionel : Ta voix sur « They Rode On » est claire, un peu comme celle de Blaze Bayley quand il a rejoint Iron Maiden…
Erik : (Surpris) Waouh, j’adore sa voix à Bayley. Tu sais, cela faisait 16 ans que je chantais avec ma voix black et il était temps de laisser tomber cette pu*** de voix sur un morceau (rire).
C’est le genre de titre qui demandait l’utilisation d’une autre voix. La musique et les paroles faisaient que je ne pouvais pas chanter avec ma voix normale. Il fallait faire quelque chose de différent et je suis très fier qu’on ait osé le faire. Et ce titre a été le premier écrit pour l’album. C’était donc le premier titre qu’on a enregistré, c'était une chose très naturelle à faire.
Lionel : Concernant l’Artwork, peux-tu nous aider dans la signification des symboles qu’on y trouve ?
Erik : L’idée dans la conception de l’artwork de The Wild Hunt était que les objets que tu vois sur la pochette sont des choses que l’on a acquises et qui sont avec nous depuis le début de notre carrière. Et chaque objet est en relation avec un titre de l’album. Donc je n’ai pas envie d’en dire plus car je veux que les gens écoutent d’abord l’album et se fassent leur propre opinion à son sujet. C’est donc une pochette très symbolique avec beaucoup de significations magiques et symboliques et c’est ce que je veux que les gens essayent de comprendre. C’est une peinture à l’huile de 50 centimètres et j’espère pouvoir en montrer l’originale un jour.
Lionel : Après 16 ans de carrière, quand tu écris un nouveau titre tu dois être dans une certaine condition, non ? Comme sur scène on ressent toute une cérémonie autour du groupe donc j’imagine que tu dois être dans un certain état d’esprit avant de composer ?
Erik : Tu sais dans un certain sens, Watain c’est ma vie. Tout ce que je fais, tous ce que je vis, il n’y a pas de temps mort pour Watain. Je peux écrire à n’importe quel moment, je suis constamment inspiré, mais il faut reconnaitre que je suis plus inspiré quand on arrête de tourner comme en avril de l’année dernière après la tournée aux USA avec Immortal, Solitude et Devil’s Blood. On était crevé d’avoir autant tourné.
Et après ça on devait nourrir notre inspiration émotionnellement dans la pénombre ; et là je pense que c’est un très bon endroit pour commencer à écrire sur le nouvel album. C’était très fou et très sombre pour nous, et j’espère que l’on ressent cet esprit sur le disque.
Ju : Que penses-tu de l’orientation pris par certains groupe sur le satanisme comme Ghost ou The Devil’s Blood bien que ce dernier n’existe plus. Tu y crois ou non ?
Erik : Bien sûr que j’y crois, The Devil’s Blood et Ghost sont de groupes extrêmement différents en ce qui concerne le satanisme. Ghost fait du satanisme comme Roman Polanski dans Rosemary’s Baby, c’est du théâtre. En revanche pour Devil’s Blood c’était ce en quoi ils croyaient, c’est leur Religion. Ce sont deux choses complètement différentes. C’est intéressant ce que fait Ghost et je les respecte mais pour les gens ce n’est que du spectacle. Mais j’aime bien ça un peu comme Mercyful Fate et Bathory aussi, mais ils n’étaient pas satanistes, ils n’utilisaient que les symboles. Je pense que la chose importante est de constater que tant que Ghost n’essaye pas de faire croire qu’ils sont un vrai groupe satanique, ça passera. Car ils ne le sont pas c’est évident.
Bien sûr qu’ils jouent avec ces symboles et tant que ça reste du théâtre je ne les blâmerais pas. J’ai plus de haine envers des groupes comme… (Temps de pause) enfin je ne mentionnerai pas de nom mais des groupes qui prétendent être quelque chose qu’ils ne le sont pas. Pour moi, c’est du mensonge et c’est critiquable, je n’aime pas ça.
Lionel : Et toi Erik comment vis-tu ton « satanisme » dans ta vie de tous les jours ?
Erik : Pour moi Watain est la religion parfaite. C’est le parfait chemin afin d’être en relation avec « Mes Dieux », c’est la parfaite arme magique pour faire ce que je dois faire dans la vie. Les gens sont toujours intéressés par l’aspect de la religion vu par Watain, mais je peux leur dire que Watain est ma réponse au Christianisme. Et si les gens veulent mieux comprendre, qu’ils viennent aux concerts, qu’ils lisent les paroles et ainsi on partagera ce que l’on pense a propos de notre religion.
Lionel : Que devons nous attendre pour vos prestations à venir ?
Erik : Je ne peux pas le dire sinon se serait plus une surprise…
Le but de Watain a toujours été de rendre un concert une véritable expérience. Ainsi après un concert de Watain ce que l’on veut c’est que les gens se sentent différents. Ainsi il y a plusieurs pistes pour travailler cela et nous sommes concentrés là-dessus actuellement. Mais, ce n’est pas du spectacle, c’est autre chose : prendre les gens en dehors de leur vie et de les emmener dans un endroit complètement différent de ce à quoi ils sont habitués dans leur quotidien. On travaille toujours dans cette direction.
Ju : Y-a-t-il un concept particulier dans The Wild Hunt ?
Erik : Je pense plutôt que chaque titre relève un caractère différent de Watain, les différentes expériences que l’on vit. Il y a des titres plus spécifiques, des expériences personnelles et je ne veux pas en dire plus sur ces expériences car il faut que chaque personne ouvre son esprit et en fasse lui-même son expérience. Mais la colonne vertébrale de Watain est toujours là. Les titres parlent de choses en lesquelles on croit.
Ju : On voulait revenir sur Lawless Darkness car il a eu un énorme succès et avec celui-ci Watain est devenu encore plus important. Vous avez même été interviewé par une TV française. Ainsi vous êtes devenus culte pour de nombreuses personnes avec des attaques reçues de certains politiciens français. Comment avais-tu vécu ce nouveau succès ?
Erik : Pour moi et ma vie personnelle avec Watain, on ne voit pas cela de l’intérieur. C’est plus facile pour une personne qui se trouve à l’extérieur du groupe de se rendre compte de cela. Nous, on vit en dehors de la société, dans notre propre monde et c’est ce que nous voulons. Mais d’un autre côté tu as raison, on a de plus en plus de gens qui nous suivent et qui écoutent ce qu’on dit et viennent à nos shows. Et c’est bien que le Black Metal soit représenté par un groupe comme Watain à la place de groupes comme Cradle of Filth. Vous voyez ce que je veux dire, quand un gamin de 15 ans a envie de connaître le Black Metal certains leur diront "tu n’as qu’à écouter du Watain", et je pense que c’est très bien qu’un groupe puisse représenter un tel style de musique sans faire de compromis, sans faire de simagrée en se moquant et faisant des choses stupides. Je pense que cela faisait longtemps que le Black Metal avait besoin d’un groupe comme ça. Je suis content et fier du succès que rencontre Watain parce qu’enfin le Black Metal actuel possède enfin un groupe reprénsantatif.
Ju : Beaucoup de gens font une relation entre Watain et Dissection. En es-tu fier ?
Erik : Dissection est surement la plus grosse influence de Watain avec Rotting Christ. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de comparer les deux groupes parce que ce sont deux groupes différents sur certains points et deux groupes proches aussi sur d’autres points. Bien sûr la connexion est là et notre guitariste Set (Teitan) a joué avec Dissection lors de la dernière année d’existence du groupe, et moi j’ai joué de la basse pendant les 3 derniers shows de Dissection. Mais je n’aime pas quand les gens disent qu’on fait du Dissection car cela n’a jamais été notre intention. Dissection est une légende. On n’essaye pas de prendre leur place, c’est impossible.
Ju : Que peux-tu dire encore aux fans français concernant ce dernier album ?
Erik : La France à toujours été un pays important pour Watain pour plusieurs raisons. Lawless Darkness a été un moment très excitant pour nous et beaucoup de trucs se sont passés, mais avec ce nouvel album les choses vont devenir de plus en plus intéressantes. On a hâte de reprendre la route et de venir en France.
Photo : Lionel / Born 666 / © 2013
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